Comboni, en ce jour

Dans une lettre à Elisabetta Girelli (1870) de Vérone l’on lit:
Nous sommes unis dans le Sacré-Cœur de Jésus sur la terre pour être unis ensuite au Paradis pour toujours. Il faut courir à grands pas sur les chemins de Dieu et de la sainteté, pour ne s'arrêter qu'au Paradis.

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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
321
Abbé Gioacchino Tomba
0
Le Caire
30. 7.1869
N° 321 (301) - A L'ABBE GIOACCHINO TOMBA

AMV, Cart. " Missione Africana "



Vive Jésus, Marie et Joseph !

Le Caire, le 30 juillet 1869

Mon très cher et Révérend Abbé Gioacchino,



[1930]
Quelques lignes pour vous donner de nos nouvelles et pour vous prier de rappeler à l'Abbé Beltrame la promesse qu'il m'a faite, de m'envoyer une copie des rapports qu'il a expédiés de Khartoum et du Fleuve Blanc à Vérone, sauf le dernier que je possède. Il me l'a promis aussi en votre présence. Je lui ai déjà écrit une fois, mais je n'ai aucune réponse. Je m'adresse à vous afin que vous puissiez agir et que je puisse avoir ces rapports qui me sont actuellement nécessaires. Dites au cher Abbé Beltrame que même s'il est très occupé, une promesse d'honnête homme est une obligation.


[1931]
Je serais heureux d'avoir des nouvelles de l'Institut Saint Carlo et de celui de Canterane, mais je n'ai pas de chance, car personne de l'Institut ne m'écrit.

En ce qui concerne les Africaines de l'Institut de Vérone, elles vont bien, même Caltuma. Elles sont vraiment très bonnes. Elles sont affligées parce qu'elles ne reçoivent pas de nouvelles de la part de leurs Institutrices, de leurs tantes, de leurs mères et de leurs supérieures. On s'encourage mutuellement. Nous ferons contre mauvaise fortune bon cœur !

Quant à moi, mes trois Instituts vont à merveille. Le jour de l'Assomption je baptiserai 5 Africaines, âgées de 17 à 21 ans. Je n'ai pas le temps de vous décrire les conquêtes qui sont en train de se faire. On a mal parlé de mes Instituts dans toute la Vénétie à cause du Père Zanoni qui a perdu la tête. Il a écrit contre moi et contre ses compagnons à l'Evêque de Vérone, à Propaganda Fide, et au Délégué Apostolique de l'Egypte. J'ai répondu avec patience, en peu de mots et par des faits.


[1932]
Cette persécution a fait gagner à mes Instituts 10 ans de temps. J'ai eu des signes d'amitié et de bienveillance aussi de la part de notre Evêque le Délégué Apostolique et de notre Curé local. Monseigneur le Délégué m'a commandé entre autres de fonder un troisième Institut.

J'ai trois grandes maisons : deux payées pour la durée d'une année, et l'autre payée pour la durée de sept ans. En très peu de temps, j'ai doté mes Instituts d'une rente de 20.000 francs par an, de 20.000 francs en mobilier, en lingerie, en savon, en sucre, en café, en huile de Nice et beurre de Moravie pour un an et demi. Ils ont suffisamment à manger et à boire. Je suis gros, gras, grand, blanc et rouge, pas encore Bienheureux, fort et costaud, et content, beaucoup plus que Napoléon III, etc. J'ai donc de bonnes raisons pour remercier Dieu et espérer sa bénédiction pour l'avenir.

Les noms des trois Instituts sont les suivants :

1. Maison du Sacré-Cœur de Jésus (missionnaires).

2. Maison du Sacré-Cœur de Marie (Sœurs de Saint Joseph de l'Apparition).

3. Maison de la Sainte Famille (Sœur Caterina Valerio Tertiaire Franciscaine de Vérone), qui est le siège d'une école fréquentée par des musulmanes et par des hérétiques de toutes sortes ; parmi les 5 Institutrices il y a Luigia et Domitilla.

Priez pour le pauvre Daniel Comboni et pour ses Instituts. Ici, il fait 38°.

Mes salutations aux hommes et aux femmes.



Votre affectionné

Abbé Daniel Comboni






322
Mgr. Luigi Ciurcia
0
Le Caire
2. 8.1869
N° 322 (302) - A MONSEIGNEUR LUIGI CIURCIA

AVAE, c. 23



Vive Jésus, Marie et Joseph !

Le Caire, le 2 août 1869

Excellence Révérendissime,



[1933]
J'ai tardé à répondre à votre digne lettre du 13 juin. Tout d'abord pour réfléchir sur son contenu selon votre sage conseil ; deuxièmement, parce que j'ai jugé opportun de répondre avec des faits au point capital que vous avez soulevé, concernant la recherche et l'aménagement d'une autre maison séparée. Cela m'a coûté beaucoup de démarches, d'humiliations, de dépenses et de soucis, mais, avec l'aide du ciel, tout a été couronné par la bonne réussite de l'opération.

Je crois pouvoir donner une réponse satisfaisante aux quatre points que vous avez cités dans votre lettre, et je commenterai certaines observations qui, comme vous le dites dans votre lettre, vous ont été faites par la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide.


[1934]
Tout d'abord, le jugement du Cardinal Barnabò ne me semble pas trop exact à propos du fait que mon institut manque d'une base solide.

Or, Votre Excellence est tout à fait au courant qu'il a les bases que toutes les autres Institutions religieuses naissantes possèdent, sauf la propriété des immeubles et des terrains et je nourris le ferme espoir qu'une telle base, bien enracinée dans la Providence qui seule est arbitre des temps et des événements, sera toujours plus solide. En effet, mon Institut repose d'abord sur la protection paternelle de Votre Excellence, dont le consentement à l'existence de l'Institut, et la fermeté et charité pour en protéger la vie sont la garantie la plus sûre de son bon fondement.


[1935]
En deuxième lieu, vous savez quelle est la protection accordée par le gouvernement de Sa Majesté l'Impératrice de France.

Troisièmement, sa forme et son but sont tels qu'il ne peut et ne doit pas provoquer de susceptibilité et de peur chez aucune des Congrégations qui existent déjà sur place et qui, jusqu'à présent, lui ont prodigué leur bénévole compassion. Son but est très clair : l'évangélisation de la race noire. Cela pour ce qui concerne son activité à l'extérieur.


[1936]
Pour ce qui concerne sa vie à l'intérieur, l'Institut féminin peut compter sur le soutien des Sœurs de Saint Joseph de l'Apparition, dont la Règle a été approuvée par l'Eglise et dont le Protecteur est le Cardinal Préfet de Propaganda Fide. L'Institut masculin a pour le moment quatre jeunes Prêtres de bonne volonté et en bonne santé qui ne manquent pas des talents convenables pour accomplir les obligations de leur ministère.

Au cas où je mourrais, ou si le Séminaire de Vérone ne pouvait plus suffisamment fournir de nouveaux sujets pour continuer l'Œuvre vous pouvez compter, si vous le jugez opportun, sur l'Ordre des Camilliens.


[1937]
Mon Institut a en outre toujours eu ses Règlements et Horaires modelés sur ceux des autres Instituts, mais avec les particularités du but qui est le sien.

Il a commencé et il poursuit sa tâche en faveur des pauvres Noirs abandonnés à toutes sortes de misère.


[1938]
En ce qui concerne les moyens de subsistance, mon Institut peut compter sur la bienveillance consolidée et le fort soutien des pieuses Associations approuvées par l'Eglise dans le but de secourir l'Apostolat Catholique, ainsi que sur l'appui d'illustres et puissants bienfaiteurs qui relèvent de mes connaissances personnelles.

1. La Société de Cologne pour le Rachat des Noirs s'est engagée par écrit à me donner 5.000 francs par an et verbalement pour 10.000 francs. De fait, pendant une année et demi, elle a donné 18.300 francs.

2. La Propagation de la Foi de Lyon et de Paris (grâce à l'efficace recommandation de Votre Excellence) a fait don de la somme de 5.000 francs avec la promesse de l'augmenter en fonction du développement de l'Œuvre.

3. J'espère bien avoir encore les subsides de la Société de Saint Ludovic de Munich (qui a donné en deux fois 1.500 francs) ; la Société de l'Immaculée Conception pour l'Orient de Vienne (a donné 100 francs), la Société du Saint- Sépulcre de Cologne (a donné 500 francs), les Ecoles d'Orient de Paris (ont donné 200 francs), la Sainte Enfance de Saint François de Sales et l'Œuvre Apostolique de Rome, de Lyon et de Paris etc.

4°. Il y a aussi l'application des Messes quotidiennes des quatre Prêtres missionnaires.


[1939]
5. Sans presque rien demander j'ai pu obtenir, en très peu de temps, 9.642 francs provenant de bienfaiteurs privés, parmi lesquels figurent Sa Majesté l'Impératrice Marianne de Prague, Son Altesse le Prince Royal de Saxe et son Epouse, le Prince de Löwenstein (il a déposé 1 million aux pieds du Saint-Père), le Prince Alessandro Torlonia, le Baron de Havelt, le Cardinal de Schwartzemberg, le Cardinal Archevêque de Vienne, le Prince Archevêque de Salzbourg, la future Reine du Portugal, etc.

6°. Le Gouvernement Français m'a permis d'économiser plus de 11.000 francs en m'offrant le passage des personnes et le transport lors de mes deux expéditions de 1867 et 1869 et j'attends de lui une importante aide sur son fonds pour l'Orient, car certains responsables du Département des Affaires Etrangères me l'ont fait espérer.

7°. Les Instituts sont dotés de meubles, d'outils domestiques, de lingerie et d'objets de culte pour une valeur de 20.000 francs.


[1940]
En ce qui concerne la maison, vous le savez bien, j'ai fait de nombreuses démarches auprès de Son Altesse le Vice-Roi, pourvu de recommandations valables, pour obtenir gratuitement la maison. En dépit de tous les obstacles, de tous les refus et de l'esprit défavorable qui règne généralement envers les Noirs, j'espère vraiment avoir bientôt deux maisons, dues à la générosité du Gouvernement égyptien ou bien à l'argent que la Providence voudra me mettre dans les mains. De toute façon, hic et nunc les Instituts disposent de deux maisons payées pour la durée d'une année, et d'une troisième pour la durée de sept ans. La Maison masculine (que nous appelons Maison du Sacré-Cœur de Jésus) est à plus de 800 pas de l'Institut confié aux Sœurs de Saint Joseph (que nous appelons Maison du Sacré-Cœur de Marie) et à 175 pas de l'école dirigée par Mère Caterina Valerio, Tertiaire Franciscaine (école que nous appelons Maison de la Sainte Famille). Lorsque les Instituts étendront leur action vers l'Afrique Centrale, ce qui est leur but spécifique, j'espère que Votre Excellence aura la bonté de nous donner une des maisons déjà existantes dans cet immense Vicariat.

A tout cela il faut ajouter que l'étendue des sources des subsides, sur laquelle je peux compter pour l'avenir, quand l'Œuvre se développera, est beaucoup plus grande.


[1941]
Mais ayant toujours aimé et désiré les croix comme un moyen de salut et aussi de développement des saintes œuvres, et comme le Bon Jésus a toujours été prodigue dans ce sens malgré mon indignité, je suis heureux d'adorer avec une totale résignation les dispositions de la Providence, qui a permis que notre bien-aimé Cardinal Préfet dans ses plaisanteries puisse nuire à mes ressources.

En effet, il a fait résonner aux oreilles de beaucoup de gens que Comboni est un fou..., un fou furieux...à lier avec 14 chaînes. Cette voix s'est répandue à Rome, dans toute l'Italie, en France et peut-être aussi en Allemagne, ce qui a refroidi de nombreuses personnes qui étaient disposées à m'aider ; ainsi cela m'a empêché aussi de faire certaines démarches qui, lors de mon dernier voyage en Europe, auraient pu me faire encaisser plus de cent mille francs.


[1942]
En fonction de ce que je viens de vous dire, il ne me semble pas pouvoir conclure que mon Institut manque d'une base solide. Beaucoup d'Instituts d'autres missions ont des bases moins solides que le mien qui ne compte après tout que 18 mois de vie. Il a soutenu en si peu de temps tellement de tempêtes et d'épreuves que s'il n'avait pas eu une base solide, il aurait succombé depuis déjà longtemps.


[1943]
A ce propos, l'autre proposition de l'Eminent Cardinal ne me semble pas exacte non plus, c'est-à-dire qu'à cause du manque d'un logement convenable, il y a eu les inconvénients qui lui ont été rapportés.

L'aménagement de mon Institut, vu les circonstances spéciales, avait été fait selon les normes. Depuis le début, il a eu des Règlements adaptés au lieu et au but ; il a eu des horaires quotidiens, des horaires pour le temps des Exercices Spirituels et pour la retraite mensuelle etc. Ces règlements et ces horaires ont été et sont toujours respectés. Je possède une lettre autographe de Zanoni, seul auteur des déplorables épisodes, dans laquelle il déclare que la division des logements et le règlement intérieur de mon Institut sont insupportables, trop sévères et faits pour des Chartreux.


[1944]
Si le manque d'un aménagement selon les normes a été la cause des inconvénients que nous avons eus, ces derniers auraient dû se passer beaucoup plus facilement chez un jeune de 28 ou de 22 ans que chez un vieux religieux de 49 ans. Mais qui oserait parler en mal de mes deux jeunes compagnons sinon le Père Zanoni, qui s'est reconnu lui-même indigne de vivre parmi eux et qui a quitté notre Institut, de la façon que vous savez bien, depuis presque un an ? Cela n'a pas relevé d'un manque d'aménagement selon les normes, mais plutôt d'un mauvais agissement que Dieu a permis au Diable pour mettre à l'épreuve ses Œuvres, afin que ces dernières deviennent plus solides et que l'enfer soit vaincu.

Peut-on parler d'inconvénients dus à un manque d'aménagement selon les normes dans le cas de Judas dans le Collège Apostolique, du Frère Elie aux côtés du Patriarche Séraphique ou des apostasies au sein de l'Eglise et des Ordres Religieux ?


[1945]
Il est douloureux de voir qu'on attribue à mon Institut les fautes d'un individu. Certes, il y a eu des problèmes, mais chez l'accusateur et non pas chez les accusés. Je souhaiterais donc que Votre Eminence considère ce cas de façon toute particulière comme il l'est effectivement, et au lieu d'accuser continuellement l'Institut, il devrait au contraire en constater sa réelle innocence, face à une perfidie indigne qui rejette sur l'Institut ce qui n'est que sa propre faute.

Le Cardinal Préfet ne pourra pas non plus m'accuser d'imprudence à cause du fait d'avoir confié au Père Zanoni la surveillance immédiate de l'Institut féminin.

Ce vieux avait la barbe blanche et 49 ans sur ses épaules. Il avait assumé, en outre, pendant 15 ans des charges importantes dont celle de Préfet dans une maison de son Ordre, à Mantoue. Pour moi, cela a été une garantie suffisante pour lui faire confiance ; et, à vrai dire, j'aurais douté plus de moi-même que de lui.

Que le Seigneur soit béni pour avoir décidé de me donner avec cet incident une grande leçon qui me sera très utile pour agir avec davantage de circonspection pour l'avenir.


[1946]
Pour revenir aux explications que Votre Excellence a eu la bonté de me demander et qui concernent le Père Guardi, l'Ordre Camillien et mes deux chers compagnons, le Père Carcereri et le Père Franceschini, auxquels font allusion les observations et les insinuations que Son Eminence le Cardinal Barnabò vous a écrites, voici les véritables faits :

En mars 1867, comme tous les autres Ordres en Italie, l'Ordre des Ministres des Infirmes a été supprimé. Les Pères Carcereri et Franceschini ne voulant pas rentrer chez eux dans leurs familles, comme tant d'autres l'ont fait, ont demandé avec deux autres compagnons à partir pour des Missions à l'étranger. Ils souhaitaient d'ailleurs le faire depuis longtemps. Le Père Guardi, qui était à cette époque Procureur Général, en cédant aux désirs du Père Provincial qui gardait de grands espoirs vis-à-vis des deux jeunes, leur a refusé, à ce moment-là, son consentement, et leur a conseillé d'attendre l'évolution des événements .


[1947]
Entre temps, l'Evêque de Vérone, connaissant l'intention des deux religieux qui voulaient partir en mission, pensa les envoyer en Afrique et a appuyé leur demande auprès du Saint-Père par le biais de la Sacrée Congrégation des Evêques et des Réguliers. Il faut dire que l'Evêque avait au préalable informé Sa Sainteté à propos du refus qu'ils avaient essuyé de leur Général. Cette demande fut exaucée avec le Rescrit Pontifical du 5 juillet qui a mis les Pères sous la juridiction de l'Evêque de Vérone pendant 5 ans. Leurs Supérieurs ont toutefois contrarié le départ, et ils ont même essayé de les faire rentrer après leur arrivée en Egypte. Le Cardinal Barnabò-même, poussé par le Père Guardi, dont il est familier, a essayé par une lettre du 15 septembre dernier de convaincre Carcereri et Franceschini de rentrer. En considérant toute l'insistance du Très Vénérable Cardinal Préfet et du Père Guardi devenu entre temps Vicaire Général de l'Ordre des Camilliens, j'ai été frappé par une crainte sérieuse de perdre pour l'Afrique non seulement ces deux sujets qui comprennent très bien l'importance de notre Œuvre, mais aussi d'autres sujets du même Ordre, qui possèdent les mêmes qualités et les mêmes dispositions pour supporter le difficile apostolat de l'Afrique Centrale.


[1948]
Ainsi, j'ai réfléchi sérieusement avec le Père Stanislao sur la façon de concilier le bien de la Nigrizia et les intérêts de mon Œuvre naissante avec les déclarations insistantes du Très Eminent Cardinal Préfet et les raisonnables désirs du Père Guardi.

Si Votre Excellence est d'accord, nous sommes donc arrivés à cette solution, qu'il est très opportun d'envisager, peu à peu, la fondation, à l'intérieur de l'enceinte de mon Institut masculin ou dans les alentours, d'une petite Maison Camillienne qui aura pour tâche de venir en aide aux Instituts des Noirs, assumant particulièrement le soin des malades, et avec l'intention de confier plus tard à l'Ordre des Ministres des Infirmes, une fois que l'Œuvre sera développée, l'évangélisation d'une des nombreuses tribus de Noirs qui sont en Afrique Centrale. Pour cela notre Œuvre n'aurait pas de difficulté à leur céder une partie de ses ressources.


[1949]
C'est bien l'idée à laquelle je me référais dans une de mes dernières lettres. Idée que nous avons méditée attentivement et qui, à notre avis, pourrait se révéler une heureuse et raisonnable solution, et qui serait aussi très avantageuse pour la pauvre Nigrizia. Voilà, c'est tout ! Voilà ce qu'on avait pensé.

Le Père Carcereri au début de l'année y avait fait allusion auprès du Père Guardi, mais il n'y a pas eu de suite. Je ne vois donc pas pour quelle raison le Père Guardi parle d'une initiative qui ne lui a jamais été demandée, et parle de "compromettre son Ordre " qui n'a jamais été interpellé officiellement par personne, ni pour mes Instituts, ni pour la Mission.


[1950]
En outre en ce qui concerne le Père Carcereri et le Père Franceschini, bien attachés à leur Rescrit, ils ne se sont jamais sentis détachés de leur Ordre. Au contraire ils se sont opposés au le Père Guardi qui menaçait de les considérer ainsi. Ni moi, ni l'Evêque de Vérone, ni d'autres personnes, que je sache, nous n'avons considéré les deux Prêtres comme étant détachés de leur Ordre. Je me trouve donc dans la même situation que Son Eminence, c'est-à-dire que je ne sais pas pourquoi le Père Carcereri et le Père Franceschini sont considérés comme étant détachés de leur Ordre.

Je suis en condition de vous assurer, Excellence, que ni moi ni l'Evêque de Vérone, n'avons fait de démarche à ce propos auprès de cet Ordre insigne.


[1951]
Nous vivons grâce à Dieu et sous la protection de Votre Excellence. Malgré la difficulté de l'entreprise à laquelle nous nous sommes consacrés et que nous entendons mener à bon port, malgré les terribles tempêtes qui nous touchent, appuyés sur Notre Seigneur Jésus-Christ et sur Votre Excellence, nous ne craignons rien.

Dans l'attente, nous persévérons dans la prière. Les traités signés avec le Christ sont plus sûrs que les traités signés avec les puissances de ce monde ; " demandez, et il vous sera donné " est donc plus solide et sûr que le traité de Vienne de 1815, que le traité de Paris de 1856, que celui de Nikolsbourg et celui de Prague, et aussi que la Convention du 15 septembre 1864, etc.

Eh bien, beaucoup de personnes prient pour notre Œuvre. Nous réussirons donc à atteindre notre but malgré le monde et le diable.

Daignez agréer, Excellence, mes plus sincères remerciements, également pour votre belle lettre du 19 dernier. Nous vous demandons votre bénédiction paternelle, et avec les sentiments de la plus profonde vénération et gratitude, je me déclare



votre humble et indigne fils

Abbé Daniel Comboni






323
Mgr. Joseph De Girardin
0
Le Caire
7. 8.1869
N° 323 (303) - A M0NSEIGNEUR DE GIRARDIN

AOSIP, Afrique Centrale



Vive Jésus, Marie et Joseph !

Le Caire, le 7 août 1869

Monseigneur,



[1952]
Au mois de décembre dernier, j'ai eu le bonheur, étant à Paris, de vous faire connaître dans un petit rapport l'importance de mes Instituts d'Egypte pour préparer des éléments valables à la conversion de la Nigrizia Centrale.

A cette occasion, je vous ai présenté aussi la lettre de recommandation de Monseigneur Ciurcia, Archevêque d'Irenopole, Vicaire Apostolique d'Egypte et Supérieur du vaste Vicariat de l'Afrique Centrale, afin de solliciter de l'Œuvre de la Sainte Enfance qu'elle vienne en aide à une Œuvre dont dépend, sans aucun doute, la conversion de nombreux peuples noirs de la Nigrizia Centrale.


[1953]
Vous avez eu la bonté de me faire espérer des aides importantes dans la prochaine répartition générale des aumônes de l'Œuvre. En effet, nous rachetons aussi de la mort éternelle beaucoup d'enfants infidèles, surtout de la race noire, qui ont été rejetés, abandonnés ou qui sont tombés malades. Mais jusqu'à présent, Monseigneur, je n'ai rien eu.

Me voici donc vous renouvelant mon humble pétition en vous priant de venir en aide, dans le plus bref délai possible, à mes trois maisons que j'ai fondées en l'espace de 18 mois seulement et avec d'énormes sacrifices.

Vous savez bien que c'est au moment de la fondation qu'il nous faut posséder de bien grandes ressources pour oser nous lancer le plus vite possible, avec des éléments formés en Egypte, vers le Centre de l'Afrique, pour aider ainsi les populations les plus malheureuses et les plus délaissées de la terre.


[1954]
J'ai eu deux fois l'occasion de vous expliquer la portée, l'importance et l'histoire de la Mission de l'Afrique Centrale érigée par Grégoire XVI.

Je me borne à présent à vous dire deux mots au sujet de mes Instituts d'Egypte destinés à former des Missionnaires noirs, garçons et filles, qui deviendront ensuite des apôtres dans leurs pays natals.

Le premier Institut est celui des missionnaires et il s'appelle Maison du Sacré-Cœur de Jésus. Il y a quatre Prêtres missionnaires, un laïc, et trois Africains. Ils s'occupent de tout ce qui concerne le ministère sacerdotal et surtout d'instruire les élèves noirs et les catéchumènes. Ils assurent aussi la direction spirituelle des deux autres Instituts.


[1955]
Le deuxième Institut est celui des Institutrices noires et il s'appelle Maison du Sacré-Cœur de Marie. Pour sa direction, j'ai appelé les Sœurs de Saint Joseph de l'Apparition. Cette Maison est composée de trois Sœurs et de 17 institutrices noires. Son but est de former de bonnes Institutrices pour l'éducation et l'apostolat des filles de l'Afrique Centrale. Elles instruisent les catéchumènes.

Annexée à cette maison, il y a une infirmerie, un petit hôpital pour les malades noirs et pour les enfants abandonnés.


[1956]
Le troisième Institut est appelé Maison de la Sainte Famille parce qu'il se trouve à 25 pas de la Sainte Grotte où a demeuré la Sainte Famille exilée en Egypte pendant sept ans. Cette maison est habitée par deux Sœurs cloîtrées du Tiers Ordre, que j'ai amenées moi-même de Vérone suite à la suppression des Ordres religieux en Italie. Avec les Sœurs, il y a aussi cinq Institutrices noires qui enseignent l'arabe, l'italien, le français et le denka.

Cette école est fréquentée par toutes sortes d'hérétiques et d'infidèles. Elle jouit d'une grande réputation car ce sont des Noires qui y enseignent.


[1957]
Vous comprenez bien, Monseigneur, que pour fonder trois maisons, pour les équiper du nécessaire et pour maintenir aussi cinquante personnes, il faut beaucoup d'argent. Pensez que ces trois maisons constituent le foyer principal de l'apostolat en Afrique Centrale. C'est la mission la plus difficile et la plus importante du Catholicisme, étant donné que l'Evangile n'a jamais pénétré parmi ces populations qui comptent plus de 100 millions d'infidèles.

Je vous parle en connaissance de cause, car j'étais parmi les Missionnaires qui sont allés, après six mois de voyage continu, jusqu'au 4ème degré de Latitude Nord. Des 39 Missionnaires que nous étions, nous ne restons que 6, parmi lesquels je suis le seul à travailler encore en Afrique, et 33 ont trouvé la mort dans ces pays.

Après douze ans d'apostolat très difficile, je viens vous demander une aide importante car j'en ai un extrême besoin. Je sais que vous n'aidez pas seulement la Chine, mais aussi la malheureuse Afrique. Je vous prie, les larmes aux yeux, de venir à mon secours. Dieu récompensera votre zèle et les pieux Associés seront bénis par une foule d'âmes sauvées.

Veuillez agréer, Monseigneur, l'assurance de ma plus haute considération et recevez l'expression de ma reconnaissance



votre dévoué serviteur

Abbé Daniel Comboni

Missionnaire Apostolique de l'Afrique Centrale

Supérieur des Instituts des Noirs en Egypte



Texte original en français, corrigé.






324
Autographe sur photo
1
Le Caire
7. 8.1869
N° 324 (304) - AUTOGRAPHE SUR PHOTO

AFV, Versailles



Le Caire, le 7 août 1869





325
Contrat de location
1
Le Caire
9. 8.1869
N° 325 (306) - CONTRAT DE LOCATION

ACR, A, c. 18/34



Le Vieux Caire, le 9 août 1869





326
Claude Girard
0
Le Caire
27. 8.1869
N° 326 (307) - A CLAUDE GIRARD

AGB



Vive Jésus, Marie et Joseph !

Le Caire, le 27 août 1969

Mon très cher ami,



[1958]
Je vous prie de parler dans votre Journal "Terre Sainte" de la distribution des prix des Frères des Ecoles Chrétiennes. Ce fut vraiment un moment magnifique. Faites un bon article, mais ne dites pas que c'est moi qui vous ai écrit. Je suis encore au début de mon activité et il faut que j'aie certains égards ici en Egypte. Voici une synthèse :

"Le 23 août fut un des plus beaux jours pour la capitale de l'Egypte et pour les Catholiques. Ceux qui, dans l'après-midi, auraient parcouru les rues du Caire, auraient rencontré une foule immense et diversifiée de personnes provenant non seulement des quartiers peuplés de la ville, mais aussi de la périphérie : Bulai, Vieux Caire, Scubra, etc.

Le but de cette extraordinaire affluence était le grandiose établissement des Frères des Ecoles Chrétiennes là où la jeunesse la plus distinguée d'Egypte et de la colonie européenne, faisait sa kermesse annuelle.


[1959]
C'est un lieu où, dans les temps anciens, les sages de la Grèce venaient apprendre les sciences, consulter les lois.

Ici, où les vestiges des monuments séculaires révèlent encore l'immense développement du génie artistique de leurs ancêtres, règne aujourd'hui et depuis plusieurs siècles la plus déplorable ignorance, à cause de la loi du Coran.

Ici, je disais, on peut assister à de magnifiques pièces de théâtre, jouées avec une admirable spontanéité et simultanément en trois ou quatre langues comme l'arabe, le français, le turc, l'italien, l'anglais, le grec et l'hébreu.

Ici, on peut aussi voir des représentations vraies, nobles, libres et caractéristiques, on peut écouter des concerts de chorales avec piano et instruments à cordes ou à vent, et quelques-uns des meilleurs musiciens jouant avec une sûreté, une aisance et une précision uniques.

On y trouve aussi des expositions de tableaux, de dessins et de cartes géographiques, des calligraphies de tous types, des copies et des originaux, des recueils de zoologie, de botanique et de minéralogie. On ne peut pas décrire les innombrables formes d'architecture et les mille productions du génie.

Tout cela était exécuté par des garçons ingénieux partagés en 5 classes et 11 sections et par des enfants de l'école gratuite répartis en deux classes et 5 sections, tous d'un âge compris entre 6 et 15 ans. C'est un spectacle qui surprend et ravit non seulement les Orientaux mais aussi les Européens.


[1960]
Nous saluons avec une grande joie cette époque dans laquelle se réveille en Egypte l'amour pour la science, et c'est avec une profonde émotion que nous y avons assisté.

Le zèle admirable des Frères des Ecoles Chrétiennes, dont le directeur est l'incomparable Frère Ildefonso, méritait absolument cette approbation solennelle donnée par toutes les catégories de citoyens, les chefs de tous les Instituts de la capitale, les Evêques, les personnalités les plus distinguées, civiles et militaires, et des Européens.

Cette magnifique distribution des prix était dirigée par le digne représentant de la France au Caire, Monsieur Franco, et y assistaient les Consuls d'Angleterre, de Belgique, de Perse, de Grèce, d'Espagne et de Prusse, ainsi que de nombreux membres du gouvernement Egyptien comme Leurs Excellences Affiche Pacha, Arek Pacha, Hussein Bey, le Préfet de police et beaucoup d'autres personnalités de la maison du Vice-Roi et du Gouvernement.


[1961]
L'Institut des Frères des Ecoles Chrétiennes est l'un des éléments les plus importants de l'apostolat catholique et de la civilisation chrétienne et européenne en Egypte.

Ici, on apprend et on admire tous les progrès réalisés dans les études par les Européens. Le bien que font ces généreux Fils du Vénérable de La Salle sera démontré dans l'avenir.

L'Institut des Frères pour le moment, est déjà influent et propage la civilisation dans l'univers entier avec ses 1300 maisons. Il a déjà donné d'importants résultats en Egypte. Beaucoup de ceux qui ont terminé leur éducation avec honneur, ont déjà assumé d'importantes fonctions dans le régime et tous les bureaux des différents départements du gouvernement y recourent.


[1962]
Nous sommes heureux de faire nos éloges les plus justes et les plus sincères à ces vrais initiateurs de la civilisation morale et intellectuelle de l'Egypte et d'en jouir avec eux.

La France, généreuse protectrice et propagatrice de la civilisation européenne est bien récompensée par les Frères car, à travers eux, elle étend son influence en Orient. Elle le mérite, car là où il y a une cause catholique et humanitaire, il y a toujours la France. Mais les Frères servent surtout la cause de l'Eglise par l'exemple admirable qu'ils donnent aux peuples par la sainteté de leur vie et par les sublimes valeurs morales et spirituelles qu'ils gravent dans les cœurs de leurs élèves".


[1963]
Mon cher ami, faites vous-même avec ces données un très bel article sur le journal la "Terre Sainte ". Je vous assure que même en Europe ou à Paris nous voyons rarement une distribution solennelle des prix semblable et si magnifique comme celle du Caire.

J'ai beaucoup souffert et j'ai aussi eu des satisfactions ; mes Instituts vont de l'avant. L'Evêque de Vérone nous écrit rarement, je ne sais pas pourquoi, mais nous sommes très estimés par le Délégué Apostolique et par tout le monde.

Mes salutations à votre épouse, aux enfants et aux Pères de La Salette, etc.



votre éternel ami

Abbé Daniel Comboni



Texte original en français, corrigé.






327
Mgr. Luigi di Canossa
0
Le Caire
2. 9.1869
N° 327 (308) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/68



Que Jésus et Marie soient loués.

Le Caire, le 2 septembre 1869

Excellence Révérendissime,



[1964]
Nous sommes impatients de recevoir vos précieuses lettres, car nous en sommes dépourvus depuis deux mois. Monseigneur le Délégué est à Damas depuis un mois pour soigner sa santé. Nous avons eu une chaleur étouffante pendant tout l'été ; il faisait entre 40 et 45 degrés dans nos chambres. Au soleil et devant la porte d'entrée il faisait entre 60 et 66 degrés à partir de midi et jusqu'à trois heures.

Notre cher Père Bortolo en a beaucoup souffert, maintenant il va mieux ; si j'avais cinquante missionnaires comme lui, je convertirais la moitié de l'Afrique. Au-delà de mes espoirs et de son apparence extérieure il a les qualités éminentes et spécifiques d'un vrai missionnaire. Que Dieu nous le garde longtemps pour l'édification de nous tous et pour le bien de la Nigrizia !


[1965]
Le Père Zanoni m'a écrit en me proposant de revenir. Il m'a manifesté son intention de créer, dans une autre localité et selon notre Plan, une nouvelle maison et il s'est offert corps et âme. Nous savons qu'il a déclaré ne manifester son idée à personne, pas même à l'Evêque de Vérone. Il n'a ouvert son cœur qu'à Madame Marguerite Tommasi, laquelle, d'ailleurs, en oubliant ce qui s'est passé entre elle et moi, veut travailler pour l'Œuvre en accord avec Zanoni. J'ai adopté le système suggéré par Votre Excellence : ne rien dire ! et je n'écrirai jamais à Zanoni. Je serais plutôt d'avis, en accord avec mes compagnons, de ne pas nous associer du tout avec Madame Tommasi, laquelle ne pourra que porter discrédit à l'Œuvre à cause de son imprudence et de ses bavardages, en compromettant la dignité de l'Œuvre. Il faudrait pour elle le double de ce qu'elle récolte, en vivant aux dépens de l'Œuvre et en abusant du mandat qu'on pourrait lui confier, pour pourvoir à ses besoins personnels. Si par hasard elle se présentait chez Votre Excellence, demandez-lui la note détaillée des lieux et des personnes auprès de qui elle a récolté les offrandes de l'année dernière, car c'est le devoir de toute bonne administration, de rendre compte de tout. Eh bien, vous verrez qu'elle en sera incapable !


[1966]
Nos trois maisons fonctionnent bien. Monseigneur le Délégué m'a écrit une lettre en me disant qu'il a fait à nouveau un rapport au Cardinal en notre faveur. Comme je lui avais fait un rapport sur nos Maisons avant son départ pour la Syrie, il m'a réécrit pour me demander d'en faire une autre copie pour Propaganda Fide. Monseigneur, ayons confiance en Dieu qui a décidé que notre Œuvre naisse au pied de la croix. Le jour de la Saint Gaétan, le Duc de Modène m'a écrit de sa main une belle lettre en incluant une coquette obligation de la Banque Autrichienne de 500 francs. Ayons confiance en Dieu.


[1967]
Nous vous supplions de nous envoyer, par l'intermédiaire du Père Angelo da Pirano, notre institutrice Angela Degani, la Mère Valerio la formera comme missionnaire pour l'Afrique. Je n'ai pas assez de papier pour vous en démontrer la nécessité et l'utilité. Le Père Carcereri, la Mère Caterina et moi-même, nous vous prions au nom du Christ d'exaucer nos souhaits, et de nous envoyer Angela Degani.

Nous aurons beaucoup d'affaires à régler à l'époque du Concile. Nous y participons avec la prière et les croix, qui nous sont si chères.

Mille salutations de ma part au Marquis Ottavio, à l'Abbé Vincenzo, à Mgr. le Vicaire de la part de votre

humble et dévoué fils



Abbé Daniel Comboni



P.-S. Recevez les plus sincères salutations de la part de ceux qui demandent votre Sainte Bénédiction.

Avant hier j'ai baptisé une petite fille à l'article de la mort. Il y a deux heures, le Père Carcereri en a baptisé une autre.








328
Mgr. Luigi di Canossa
0
Le Caire
8. 9.1869
N° 328 (309) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/69



Que Jésus et Marie soient loués.

Le Grand Caire, le 8 septembre 1869

Excellence Révérendissime,



[1968]
Votre Excellence est, peut-être, en train de faire les Exercices Spirituels, et je ne doute pas que vous prierez pour vos enfants d'Afrique.

Le Seigneur est prodigue de bénédictions, et aussi généreux dans les croix qui sont le moyen nécessaire pour accomplir ses Œuvres. Je vous écris avec un seul œil, car l'autre souffre d'une ophtalmie égyptienne.


[1969]
Je vous prie de recommander au Clergé de Vérone de prier pour nous pendant les Exercices Spirituels au Séminaire. Nous ferons de même. La toute puissance de la prière est notre force.

Bien que la Société de Cologne m'ait envoyé 5.000 francs il y a 40 jours seulement, le jour de la Saint Gaétan (jour où j'ai reçu de la part du Duc de Modène une très belle lettre avec un titre d'obligation de Rotschild à Paris) j'ai écrit au Président de la Société afin qu'il m'envoie encore 5.000 francs qui, ajoutés à d'autres sommes, me permettraient d'acheter une petite maison à un bon prix.

Voici la réponse du Président et des membres de l'illustre Société :



Cologne, le 19 août 1869

"Très Révérend Père,




[1970]
Nous avons reçu votre lettre contenant des rapports très intéressants sur votre sainte Œuvre. Et voici que la bonté divine a permis de rassembler en séance extraordinaire tous les membres de notre Comité pour délibérer et discuter de vos propositions. Nous comprenons bien que posséder une Maison pour vos Instituts serait beaucoup plus intéressant que de payer fortes sommes d'argent pour la location. Jusqu'à présent, nous avons tout confié à votre admirable zèle et à votre grande sagesse. Nous ferons de même pour les dépenses extraordinaires que vous allez faire.


[1971]
Nous sommes convaincus que vous agissez en toute conscience dans l'intérêt de notre Œuvre, et nous avons donc décidé de vous accorder la somme de 10.000 francs (500 napoléons en or) totalement à votre disposition, et que vous recevrez par notre banquier de Cologne M. A. Schaffhausen.

Monseigneur Meurin de la Compagnie de Jésus, Evêque de Bombay en Inde, que vous avez reçu au Caire, nous a fait un très beau rapport sur vos Instituts dans un discours très éloquent tenu dans la "Burgergesellschaft" dimanche dernier Ces bonnes nouvelles ne font qu'augmenter notre intérêt pour votre sainte Œuvre et nous encouragent à vous aider au mieux de nos possibilités.

Nous vous informons que Sa Majesté l'Impératrice de France est en train de partir pour l'Egypte.

Veuillez agréer l'assurance de notre profond respect et croyez au sincère dévouement que tous les membres du Comité de la Société de Cologne vous consacrent pour la conversion des Noirs".

[suivent les signatures du Président et de tous les membres].



Texte original en français, corrigé.




[1972]
Monseigneur, dix mille francs, accompagnés des belles déclarations de ces Messieurs qui avaient pris l'engagement de ne m'envoyer que 5.000 francs par an, et qui cependant, au bout de 21 mois m'ont envoyé 28.300 francs. Ce n'est pas une blague !

Un membre de la même Société m'a écrit une lettre en anglais dans laquelle il résume le discours de l'Evêque de Bombay concernant le Plan, l'Œuvre et le pauvre Abbé Daniel. Je rougis en lisant les éloges prononcés par l'Evêque Jésuite, car je suis profondément convaincu de ne pas les mériter et d'être le serviteur le plus inutile de la terre ; mais je les accepte à cause de l'intérêt pécuniaire. L'argent est une grande tentation de notre Seigneur Jésus Christ !


[1973]
Ce même Evêque ainsi qu'un autre, a parlé aussi dans les même termes pendant le Conseil de la Propagation de la Foi de Lyon. Je vous enverrai plus tard une copie de la lettre du Président. L'Abbé Negrelli m'a écrit de Reichstadt en me disant que Monseigneur Bragato tient mes pétitions à disposition pour les présenter au moment le plus opportun à Leurs Majestés.


[1974]
Nos Missionnaires sont en bonne santé. Le Père Carcereri, sous le soleil de l'Afrique, n'a pas été malade, même une heure. La Maison du Sacré-Cœur de Marie va bien aussi, sauf deux Sœurs qui ont été très malades. Un bon docteur du Caire ne vient plus car je ne lui ai donné que 20 francs. C'est un Italien de Pise.

En revanche mon médecin turc, assez compétent, qui vient presque tous les jours depuis un an et demi, n'a jamais voulu un centime, sauf mon amitié. Il prie tous les jours Mahomet pour nous, et il dit que des hommes pareils n'existent pas sur terre. De si bons musulmans sont tout de même rares.

Mes hommages au Marquis Ottavio et à sa noble famille, à Mgr le Vicaire, à Perbellini et à l'Abbé Vincenzo. Recommandez-nous aux prières de l'Abbé Dorigotti, le Recteur du Séminaire. La lettre de la Supérieure des Canossiennes en Chine nous a apporté beaucoup de joie. Il faut faire une chaîne de prières.

J'embrasse votre anneau sacré, et je me déclare dans les Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie



votre humble et dévoué fils

Abbé Daniel Comboni



P.-S. La Mère Caterina ainsi que la Maison de la Sainte Famille vont très bien.






329
Adresse à Pie IX
0
Le Caire
19. 9.1869
N° 329 (310) - ADRESSE A PIE IX

"L'Unità Cattolica" n. 232 (1869), p. 1076



Le Grand Caire, le 19 septembre 1869

Bienheureux Père,



[1975]
En ce jour consacré aux douleurs maternelles de la Vierge Immaculée, et en nous rappelant celles que vous subissez aujourd'hui pour la plus noble des causes, nous sommes très heureux de nous associer aux mille autres catholiques du monde entier pour vous témoigner notre filiale affection, aussi dans cette merveilleuse circonstance du Concile Œcuménique qui n'est sans doute pas le dernier des splendides événements de Votre glorieux Pontificat.

Nous vivons au milieu des sables inhospitaliers du désert d'où nous vous redisons notre amour filial et notre foi qui nous ont amenés il y a quelques mois à vos pieds pour nous réjouir avec la noble jeunesse catholique italienne à l'occasion du 50ème anniversaire de votre Ordination Sacerdotale.

Nous voudrions vous consoler des amertumes que vous causent nos frères mal conseillés et vous assurer de notre ferme dévouement à la cause que vous représentez et soutenez avec courage.


[1976]
Lancés sur ces terres lointaines par la volonté divine et par votre parole sacrée, loin de diminuer en nous l'affection et la vénération pour vous, nous pouvons affirmer au contraire que cette affection devient chaque jour une réalité plus sacrée, une merveille plus surprenante, un amour plus fort.

Dans la triste solitude qui nous entoure, votre nom est le plus doux de nos souvenirs, votre image la plus agréable de nos compagnies, votre histoire l'objet le plus fréquent de nos conversations. Nous prions chaque jour pour vous, nous parlons de vous, nous pensons à vous et nous souffrons avec vous ; jamais la nuit ne nous surprend sans que nos élèves aient un soupir ou une prière pour vous.


[1977]
Pontife et Roi vénérable, que le Ciel vous garde pour de longues années à la gloire de l'Eglise, pour la défense de la justice, pour le réconfort de la société, pour le soutien des bons et pour la prospérité des Missions Catholiques, car en vous sont résumés les intérêts spirituels et sociaux de la pauvre humanité.

Tout le monde, même sans le vouloir, vous regarde et, devant vous, tous tremblent ou espèrent. Jamais un Pontificat Catholique n'a été si intéressant pour le monde entier, et c'est grâce à vous ; jamais non plus aucun Pontife Romain n'a été un véritable représentant de Dieu sur terre comme vous.

Nous désirons de tout cœur que vous puissiez voir l'aboutissement du Concile Œcuménique, la grande Œuvre à laquelle, sans doute par une inspiration divine, vous avez mis la main. Nous espérons que vous pourrez vous réjouir des effets salutaires que nous attendons avec vous de ce Concile : la conversion de tant d'esprits dévoyés et la réorganisation de notre société bouleversée.

En vous présentant comme hommage et petite aide l'offrande de 25 lires italiennes, nous vous redisons notre totale obéissance de la volonté et de l'intelligence aux décisions du Concile, et nous sommes prêts à les enseigner et à les défendre, comme révélations manifestes de Dieu, même avec le sang et au prix de notre vie.


[1978]
Nous vous supplions humblement que soient recommandés spécialement pendant ce Concile, avec les intérêts et les besoins de toutes les autres missions, ceux des missions de notre trop malheureuse Nigrizia, car ils sont, jusqu'à présent, sans comparaison, les plus grands et aussi hélas ! les plus désespérés.

Et pourtant parmi les Noirs aussi, Très Saint-Père, il y a des brebis qui appartiennent à votre troupeau. Parmi les Noirs aussi, et nous pouvons l'affirmer en nous fondant sur notre expérience, il y a des cœurs capables de vous aimer et parmi eux Dieu prépare de grandes consolations pour l'Eglise et pour son Vicaire.

L'heure du salut pour cette nation doublement malheureuse semble avoir finalement sonné ; le cri séculaire de sa détresse a déjà trouvé une réponse dans votre cœur paternel et nous souhaitons qu'une étincelle de votre charité pour la Nigrizia soit partagée entre les Pasteurs du monde catholique, et soit capable d'engendrer une multitude d'Apôtres zélés et un concours efficace et concordant du peuple chrétien et ainsi réaliser la fatidique parole du prophète qui, poussé par l'Esprit-Saint, et en prophétisant le salut des Noirs a dit : " Coram illo procident Aethiopes." (Devant lui se prosterneront les Ethiopiens).


[1979]
C'est le vœu des Missionnaires, des Sœurs et des Institutrices qui forment les Africains dans nos Instituts et dans l'Ecole féminine du Vieux Caire. Ils présentent devant vous quatre néophytes adultes, arrachés aujourd'hui-même aux ténèbres de l'infidélité, et régénérés dans le Baptême.

C'est aussi la prière de ces néophytes qui, avec d'autres qui les ont précédés dans la grâce du Baptême, ont fait aujourd'hui leur première Communion pour vous. C'est aussi le même espoir que les catéchumènes déposent à vos pieds, dans l'attente de vous appeler leur Père.

Que votre sainte bénédiction sur nos cœurs ardents fasse en sorte qu'un des joyaux précieux de votre glorieuse couronne soit la Nigrizia rachetée.



Abbé Daniel Comboni



[suivent les signatures des membres des Instituts]






330
Mgr. Luigi di Canossa
0
Le Caire
9.1869
N° 330 (311) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/70



Que Jésus et Marie soient loués

Le Caire, septembre 1869

Excellence Révérendissime,



[1980]
Dieu merci, la chaleur est passée, et nous sommes en plein automne. Dans nos chambres on n'a que 27 ou 28 degrés Réaumur, et cela seulement de midi à trois heures. Toutefois, nous sentons le poids du long silence de notre vénérable Père Supérieur, notre Evêque et Pasteur. Depuis trois mois nous n'avons pas de vos nouvelles, ni de lettres des personnes de votre entourage.

J'ai saisi l'occasion de quatre Baptêmes solennels célébrés dimanche dernier, fête des Sept Douleurs et avec l'Indulgence Plénière du Bon Pasteur (à la barbe de notre bien-aimé Cardinal Barnabò qui a écrit à Lyon en disant que notre œuvre n'avait que 40 jours d'indulgence à Vérone), dans la chapelle du Sacré-Cœur de Marie ; les baptisés sont deux filles africaines idolâtres d'environ 20 ans, une musulmane de 25 ans et un garçon de 15 ans.

Je disais donc vouloir saisir l'occasion de cette cérémonie et de la première Communion d'autres précédemment baptisés pour présenter à Notre Sainteté Pie IX comme hommage et aide au Concile Œcuménique, une adresse avec une somme très modeste mais donnée de bon cœur de la part de nos trois Instituts pour la Régénération de l'Afrique, et j'ai expédié le tout à notre vénérable Abbé Margotti afin que, s'il le croit opportun, il la publie dans l'Unità Cattolica.

La cérémonie du Baptême a duré trois heures et tout le monde pleurait de joie. Je ne peux pas vous exprimer la soif de Baptême qui animait surtout les trois converties.


[1981]
Au moment de l'Evangile, je leur ai tenu une homélie en arabe, ainsi qu'un petit sermon avant et après la communion. Y assistait entre autres une musulmane qui a demandé tout de suite à devenir chrétienne. Mais elle en fut, par la suite, empêchée par ses parents ; aujourd'hui, elle fréquente notre école. Le lundi suivant, j'ai accepté dans l'Institut une Noire de 27 ans qui essayait de nous contacter depuis deux mois, car elle avait été frappée par le témoignage de l'une de nos converties de l'année dernière et qui est maintenant en Haute-Egypte.


[1982]
Vous voyez, Monseigneur et notre très cher Père, qu'on picore bien ici, comme on dit à Vérone. Mais nous picorerons davantage et même plus quand nous aurons les 300.000 francs que nous tirerons de l'Amérique.

L'Impératrice Caroline de Salzbourg m'a envoyé 150 florins par l'intermédiaire de la Société de Cologne ; mais ce guignol de Monsieur Girard envoie des objets de culte à tout le monde sauf à moi. Il en envoie à ceux qui n'en ont pas besoin, comme les Arméniens, et il a envoyé récemment des caisses de chasubles et de lingerie à un prêtre défroqué d'Alexandrie, lequel vend sur place la marchandise à très bas prix pour payer l'expédition.

Je lui ai communiqué tout cela dans une lettre que je viens de lui écrire. Envoyez nous votre bénédiction et saluez de notre part le Marquis Ottavio. Recevez les salutations de tous et surtout de votre



Abbé Daniel