Comboni, en ce jour

Dans une lettre à Elisabetta Girelli (1870) de Vérone l’on lit:
Nous sommes unis dans le Sacré-Cœur de Jésus sur la terre pour être unis ensuite au Paradis pour toujours. Il faut courir à grands pas sur les chemins de Dieu et de la sainteté, pour ne s'arrêter qu'au Paradis.

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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
391
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
2. 4.1871

N° 391 (367) - A MONSEIGNEUR. LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/82

Que Jésus et Marie soient loués.

Vive Saint Joseph !

Dominikanerkloster,

Vienne, le 2 avril 1871

Excellence Révérendissime,


 

[2426]
Je suis un peu préoccupé parce que je ne sais pas si Votre Excellence a reçu les 220 florins que je vous ai envoyés depuis le 23 mars. Je vous prie donc de dire au bon Abbé Losi si vous les avez reçus ou non, et Losi m'écrira tout de suite pour que je puisse prendre les mesures nécessaires en cas de réponse négative.

D'après certaines lettres de l'Abbé Losi, je me suis fait l'idée qu'il est un Prêtre honnête, un bon sujet, et qu'il a la tête sur les épaules.

Une lettre de Rome du 26 mars m'a informé que l'Eminent Barnabò, deux minutes après avoir célébré la Messe chez nos Sœurs, Place Margana, a été frappé par un malaise ; sa bouche s'est tordue, il a perdu un œil et il s'est retrouvé en danger de mort. La Mère Générale m'a écrit de Marseille le 30 mars : " Nous aurons une perte à essuyer avec la disparition de notre Père, mais il nous aidera du haut du ciel encore plus qu'il ne l'a fait sur terre ". Je regrette beaucoup. Il m'a souvent dit qu'il mourrait tout d'un coup comme tous les siens.


[2427]
Après un an et demi de réflexion j'ai décidé de vous faire savoir ce qui m'a été écrit de Cologne quand les 10.000 francs m'ont été envoyés au Caire après le discours de Monseigneur Meurin Evêque de Bombay. Le Chef d'une Œuvre doit non seulement connaître le mal, mais aussi le bien.

Comme cela a été imprimé partout en Allemagne, et surtout dans les Annales de Cologne en 1870, il faut que Votre Excellence en soit informée. Je vous envoie donc le feuillet ci-joint qui cite les derniers mots du discours tenu par Monseigneur Meurin à Cologne, il parle de notre Œuvre, de la bonne organisation de nos Instituts en Egypte, des missionnaires ; et il dit aussi à mon sujet des choses que je suis convaincu de ne pas mériter, tout comme je suis convaincu que celui qui dirige aujourd'hui le Diocèse de Vérone n'est pas ce bossu mal intentionné qui, depuis 1816, est le serviteur très fidèle et très aimant de la Maison Canossa, comme a dit un tel, dont je ne me rappelle plus le nom.

Je suis profondément convaincu de n'être rien, ou plutôt d'être un pauvre pécheur, et un serviteur tout-à-fait inutile, je n'aurais rien fait si l'incomparable charité et le zèle de Votre Excellence n'avaient pas pris en charge l'Œuvre.


[2428]
Personnellement je compte pour rien la fumée de la gloire du monde qui se dissout et disparaît aussitôt et j'aurais beaucoup de chance si, après une vie consacrée à Dieu, dans les fatigues de l'apostolat, je pouvais sauver mon âme et éviter l'enfer. Tout le reste n'est rien, et celui qui aime entendre une louange passagère et fugace est digne de compassion ; me trouvant souvent avec les grands de ce monde, j'ai toujours de nouveaux arguments pour me convaincre que la fumée du monde, les louanges et la gloire ne valent rien, mais que c'est seulement en servant Dieu, en souffrant et en mourant pour lui seul que l'on peut trouver le salut.

Mais puisque le témoignage d'un bon Evêque Jésuite sur l'organisation et l'activité de nos Instituts d'Egypte peut réconforter et rassurer le cœur paternel et la conscience de Votre Excellence, et puisque ma pauvre personne, qui n'a aucune importance, est souvent la cible d'attaques de toutes parts, il est bon que Votre Excellence, en tant que Père, juge et médecin, connaisse tout le bien et le mal afin de pouvoir corriger et justifier ses fils. Je vous envoie donc ci-joint l'article "Ein bischöflisches Zeugnifs" (un Témoignage Episcopal), que vous pourrez faire traduire ad litteram par quelqu'un qui connaît bien l'allemand, par l'Abbé Caprara, ou par Matilde votre nièce, en faisant en sorte qu'ils n'en parlent à personne. Peut-être pouvez-vous le faire traduire par l'Abbé Aldegheri.


[2429]
Pour sa seule consolation je souhaiterais que Bachit, qui ne vit que pour l'Afrique, en ait une copie. Vous en trouverez une dans une petite lettre que je laisse ouverte, pour que si vous ne le jugez pas opportun, vous puissiez l'enlever. Le Roi de Hanovre (qui est aveugle) a fait écrire pour moi une lettre par son Secrétaire le Baron Jex, dans laquelle il loue grandement l'Œuvre et il m'a envoyé 100 thalers. Vous savez sûrement qu'il est protestant.

Pendant ce voyage j'ai eu de bien maigres résultats, j'ai recueilli un peu plus de 3.500 florins et j'ai réussi à avoir une contribution annuelle de 3.000 francs. Mais la route est ouverte pour avoir davantage en des temps meilleurs. D'autres aumônes devraient arriver.


[2430]
Aujourd'hui, je déjeune chez l'Altgrave Salm-Clary qui a été, il y a trente ans Sous-Gouverneur de Lombardie, et Chef de la Députation Autrichienne auprès du Saint-Père. Hier, alors que j'étais dans ma chambre, il m'a raconté qu'il est allé lundi chez Sa Majesté l'Empereur pour lui rapporter ce que le Saint-Père avait dit à la Commission Autrichienne. Il a attendu un quart d'heure dans la salle d'attente jusqu'à ce que Beust sorte (celui-ci connaissait la raison de l'Audience de l'Altgraf), puis il est entré et a tout exposé ; Sa Majesté s'est borné à lui dire qu'il était heureux de l'affection du Pape et que lui aussi l'aimait. Il n'a cependant pas dit un mot sur ce qui pouvait se faire, il ne s'est pas compromis avec des promesses, et il n'a rien dit du regret qu'il aurait dû avoir à cause des événements de Rome.

Mais je peux vous assurer que, certainement, Sa Majesté l'Empereur d'Autriche, bien que faible de caractère, est très soucieux des désastres qui ont lieu en France et des événements récents de la république rouge de Paris ; et qu'il y pense jour et nuit. L'Empereur a dit à deux personnalités que je connais bien, qu'il est de l'avis que l'Autriche pour tenir, face à tant d'éléments différents qui veulent que leur nationalité soit respectée, ne peut que s'appuyer sur la Religion catholique, etc.


[2431]
En outre Sa Majesté a dit que ce qui se passe en France pourrait arriver ailleurs, où dominent les mêmes principes. La condition de l'actuel Cabinet Autrichien et du Ministère Hohenwart est vraiment meilleure que par le passé, et Beust se rapproche un peu du Cabinet pour pouvoir rester à son poste. Le Comte Federico Thum - qui présente ses hommages à Votre Excellence et au Marquis Ottavio et qui ne marche dans sa chambre qu'avec des béquilles quelques minutes par jour et pour sortir du lit - m'a dit qu'il croit (et son frère Leone qui est encore meilleur que lui est du même avis, et m'en a parlé ce matin) que l'Empereur espère que petit à petit la Chambre des Députés s'améliorera avec le travail du Ministère Hohenwart, jusqu'à ce qu'avec les nouvelles élections la Chambre devienne à majorité catholique. Il y aura plus tard un gouvernement qui petit à petit modifiera et supprimera peut-être la Constitution, et l'Autriche retrouvera alors sa place de protectrice infatigable du Saint-Siège, et....

Moi, Monseigneur, je suis en contact étroit avec la plus haute et la plus catholique aristocratie de Vienne ; et j'entends ces idées répétées par de nombreuses personnes. Les événements qui se déroulent actuellement à Paris et qui se dérouleront peut-être en Italie et en Espagne, nous éclairent pour nous persuader qu'avec l'athéisme, la franc-maçonnerie et le libéralisme moderne, on ne peut pas durer. Les peuples et les Rois devront se convaincre qu'il faut s'appuyer uniquement sur la véritable Foi, et que nous ne nous sauverons pas de la ruine si nous ne disons pas : Domine, salva nos, perimus.



Abbé Daniel Comboni






392
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
8. 4.1871

N° 392 (368) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/83

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Vienne, le 8 avril 1871

Excellence Révérendissime,


 

[2432]
La raison de ces quelques lignes est de vous souhaiter de très heureuses fêtes de Pâques, en tant que Père de la Nigrizia et de la chère Vérone, ainsi qu'au Marquis Ottavio et sa famille, à Monseigneur le Recteur du séminaire, l'incomparable Abbé Pietro Dorigotti, à Monseigneur le Vicaire, à Perbellini, etc.

Il vaut mieux souffrir avec Pie IX que de se réjouir avec le monde. Grande réflexion !

L'Archevêque de Paris qui a annoncé au Concile en des termes assez clairs que le gouvernement français abandonnerait le Pape si le dogme de l'Infaillibilité était défini, se trouve maintenant entre les mains des révolutionnaires et son patron est dans un exil humiliant à cause des " rouges".

Je vous prie de dire à l'Abbé Losi de m'écrire s'il a reçu les 220 florins. Notre Œuvre jouit d'une grande sympathie même auprès des protestants ; beaucoup d'entre eux viennent me rendre visite, et parmi eux il y a des ministres (prêtres) luthériens.

Mardi j'ai reçu 100 thalers d'un inconnu de la Haute Allemagne, qui m'ont été consignés par le libraire Sartori, avec l'obligation de taire le nom du donateur.

Hier, j'ai envoyé en Egypte 39 napoléons-or ; ainsi du 5 janvier à aujourd'hui (trois mois) j'ai envoyé au Père Carcereri 250 napoléons-or et 2 souverains.

Ayons confiance en Dieu, parce que in pecunia hoc tempore, Dieu nous bénit plus que beaucoup d'autres Missions et Vicariats Apostoliques. Je souhaite aussi de bonnes fêtes à l'Abbé Vincenzo. J'embrasse votre Anneau Sacré

votre indigne fils

Abbé Daniel Comboni




[2433]
P.-S. J'ai reçu d'Aix-la-Chapelle quelques prières qu'on récite pour le Saint-Père dans toute l'Allemagne Catholique, et surtout en Prusse.

C'est une belle idée de prier pour Pie IX et le Saint-Siège en invoquant tous les Saints canonisés par ce Pape, comme vous pouvez le voir dans les pages 7, 9, etc. du livret ci-joint.






393
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
20. 4.1871

N° 393 (369) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/84

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Couvent des Dominicains,

Vienne, le 20 avril 1871

Excellence Révérendissime,


 

[2434]
Le 23 mars, je vous ai envoyé 220 florins pour 500 Messes et je vous priais de me répondre immédiatement par l'intermédiaire de l'Abbé Losi si vous les aviez reçus, n'étant pas toujours sûr de l'honnêteté des employés du service postal, car plusieurs fois ils m'ont causé des dommages. Ne voyant arriver aucune réponse, le 2 avril, j'ai écrit à nouveau à l'Abbé Losi en lui demandant de bien vouloir se présenter le plus rapidement possible auprès de Votre Excellence, mais je n'ai eu aucune réponse. Je vous ai écrit le même jour à propos de ce problème, mais je n'ai pas reçu de réponse. Supposant que l'Abbé Losi avait été envoyé par Votre Excellence dans quelque village pour les confessions de Pâques, j'ai écrit de nouveau à Votre Excellence le 8 de ce mois toujours au même sujet, mais aucune réponse ne m'est arrivée. Alors le 14, j'ai décidé de porter plainte ex officio, mais jusqu'à présent je n'ai eu aucune réponse. Je commence donc à craindre que l'argent ne soit perdu. Le Ciel nous préserve d'un tel service postal !


[2435]
Monseigneur le Délégué Apostolique d'Egypte, d'après ce que le Père Stanislao m'a écrit, s'occupe de faire en sorte que le Consul Général Autrichien écrive favorablement à Vienne pour la Maison du Caire. C'est providentiel !

La Commune de Paris a accepté que l'Archevêque écrive à Thiers, à Versailles, en lui proposant que l'Assemblée régulière redonne la liberté à Blanqui, qui est un impie révolutionnaire rouge, à condition que la Commune libère l'Archevêque. Thiers et l'Assemblée ont refusé, parce que, à leur avis, Blanqui est plus nuisible à la France que l'Archevêque ne lui est utile. Monseigneur Darboy comparé à Blanqui le révolutionnaire et ce dernier compte plus que le premier ! Dieu jugera ! C'est une grande humiliation pour le pauvre Archevêque qui, après sa soumission au dogme de l'Infaillibilité, paye aussi ses erreurs passées.

Toutes mes félicitations pour la cérémonie du Vendredi Saint où Votre Excellence a fait le Chemin de Croix ! Sublime démonstration ! Bénissez



votre indigne fils

Abbé Daniel Comboni

Missionnaire Apostolique






394
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
26. 4.1871

N° 394 (370) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/85

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Vienne, le 26 avril 1871

Excellence Révérendissime,


 

[2436]
Voici les Statuts de la Société Catholique des Ouvriers fondée récemment (le 2 avril), que Votre Excellence souhaitait avoir. Ils m'ont été donnés par le Président lui-même que j'ai connu lors de la première réunion, le 2 avril.

Cette Société est vraiment très utile et efficace. Si, par hasard, dans le futur vous aviez besoin d'éclaircissements, vous pouvez en parler librement avec l'Illustre et Révérend Abbé Carlo Dittrich, Conseiller de l'Archevêque de Vienne, et Recteur du petit Séminaire Archiépiscopal de Vienne à Mariahilf (Mariahilferstrasse), il sera honoré de vous servir.


[2437]
J'ai reçu votre dernière lettre dans laquelle vous me communiquez que vous avez reçu l'argent, j'en suis content. Je n'ai pas reçu la première lettre que vous dites m'avoir écrite.

La lettre du Père Guardi est précieuse pour connaître le terrain et pour savoir à quoi s'en tenir. Après-demain je transmettrai à Monseigneur Pelami 52 napoléons-or, 4 francs et 25 centimes avec les bulletins respectifs pour 1.000 Messes.

Dans quelques jours, je visiterai le Sanctuaire de Maria Zell où j'en recevrai d'autres. J'embrasse votre Anneau Sacré, bénissez



votre indigne fils

Abbé Daniel



P.-S. Tous mes hommages au Recteur du Séminaire et à l'Abbé Vincenzo et évidemment au Marquis Ottavio.








395
Abbé Gioacchino Tomba
0
Vienne
30. 4,1871

N° 395 (371) - A L'ABBE GIOACCHINO TOMBA

AMV, Cart. " Missione Africana "

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Dominikanerkloster,

Vienne, le 30 avril 1871

Mon très cher Abbé Gioacchino,


 

[2438]
Le porteur de cette lettre est un Prêtre distingué qui était au Conclave quand le Pape Pie IX a été élu ; il a réformé, sur l'ordre du Pape, plusieurs grands Instituts religieux, comme celui de Saint Michel à Rome, etc., et il est, à présent, Archiprêtre du Chapitre de la Basilique de Saint Eustache à Rome et Doyen des chapelains qui assistent les cérémonies du Souverain Pontife, etc.

Il souhaite voir l'Institut de Canterane à Saint Carlo. A Vienne, il a toujours logé avec moi chez les Dominicains, et il a vu de magnifiques broderies ; j'espère qu'il sera frappé en voyant celles de toutes sortes qu'on fait dans l'Institut de Vérone.

Je vous prie donc de lui montrer le fameux tableau et les fleurs, etc.


[2439]
Je vous envoie le petit opuscule de la Colonie noire d'Afrique Centrale aux pieds de Pie IX : ce sont les jeunes Noires de Vérone. Il a fait une très bonne impression en Allemagne, et provoqué un grand intérêt pour la Nigrizia.

Je vous envoie aussi le feuillet Ein Bischofliches Zeugnis qui parle de mes Instituts et de moi. Je suis profondément convaincu de ne pas mériter le plus petit des éloges énoncés ici ; au contraire Dieu seul sait de combien d'actions je dois lui rendre compte ! Bien que je sois gêné, j'ose vous l'envoyer parce qu'il parle de la bonne marche des Instituts, et il rapporte le témoignage favorable d'un Evêque Jésuite, ce qui n'est pas rien, du moment que les Jésuites ne sont pas dupes.


[2440]
Quant à mes affaires, elles sont plutôt maigrichonnes. Cependant tous les Archiducs et les Princes m'ont donné quelque chose. Sa Majesté l'Empereur Franz Joseph m'a accordé une longue audience, et s'est montré très intéressé ; je ne connais pas encore le résultat de cette entrevue, mais il a en tout cas ordonné à ce Beust d'interpeller le Consul Général d'Egypte pour voir à combien s'élèveront les dépenses pour la construction de mon Etablissement. Au Ministère des Affaires Etrangères, on dit qu'il me donnera certainement une belle somme.

En outre je possède le terrain et je suis plein d'espoir malgré les temps difficiles que nous vivons.


[2441]
Vous savez aussi que Sa Majesté l'Impératrice, après plusieurs lettres que je lui ai écrites du Caire, de Rome et de Vérone, a accordé la somme de 1.000 napoléons-or pour payer entièrement la Maison de Vérone. La maison est déjà payée, et il reste encore quelques centaines de thalers. Vous voyez que ce n'est pas mal en ces temps-ci !

Un inconnu de la Haute Allemagne m'a envoyé 100 thalers en me priant de me souvenir de lui dans mes prières. Une enveloppe de 55 florins est arrivée pour moi au Couvent avec un billet rédigé ainsi: " Une famille qui désire contribuer à la plus grande gloire de Dieu offre son obole à Monseigneur Comboni et se recommande à ses prières ". Le Roi de Hanovre m'a fait écrire une lettre (car il est aveugle) dans laquelle il exalte l'Œuvre et m'envoie 100 thalers ; il est protestant, etc.

Il ne faut pas oublier que les temps sont difficiles partout. C'est donc Dieu qui agit, nous ne sommes que des arlequins. Mais il est triste de voir les horreurs de l'actuelle perte de moralité. Ici en Autriche il y a quelques améliorations, mais ce sont les Juifs qui commandent encore.


[2442]
Saluez les Institutrices, l'Abbé Beltrame, Brighenti et tous les autres.

Une de nos jeunes Noires va bientôt se marier avec un très bon garçon noir.

Vous devinez qui c'est ?... Luigia Mittera. Elle est bossue, boiteuse et toute folle ; elle semblait ne penser qu'à Dieu parce qu'elle a toujours été pieuse, et maintenant elle pense se marier. Je n'y crois pas tant que tout ne sera pas fini. Bien qu'il soit bon, ce garçon noir a perdu la tête. Priez et faites prier pour



votre affectionné et obéissant

Abbé Daniel Comboni






396
Annotation sur une lettre
1
Vienne
4.1871
N° 396 (372) - ANNOTATION SUR UNE LETTRE

ACR, A, c. 20/20



Le Caire, avril 1871 ?





397
Luigi Grigolini
0
Vienne
2. 5.1871

N° 397 (373) - A MONSIEUR LUIGI GRIGOLINI

ACR, A, c. 15/50

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Vienne, le 2 mai 1871

Très cher ami,


 

[2443]
Vous ne devez pas émettre de jugements téméraires ni penser que, même si je suis submergé par des occupations très importantes, j'ai pu oublier le si bon et si honnête ami que vous êtes. Avec qui, parmi les cliquetis des verres et les vins mousseux et exquis, en présence de notre incomparable et vénérable Recteur du Séminaire et de mon très aimé Professeur, le fort digne Archiprêtre de San Martino, j'ai établi une des amitiés les plus fermes et inébranlables. Cela signifie que votre nom ne s'efface jamais de ma mémoire, et que je n'oublie jamais, dans mes pauvres prières, d'invoquer les Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, mon Econome Saint Joseph, mes chers Saint Pierre, Saint Paul et Saint François-Xavier, pour vous et pour votre bonne famille.

Mais notre amitié, qui a commencé autour du gibier faisandé et des gratins aromatisés a été confirmée et consolidée par des sentiments communs d'amour et de vénération inébranlable envers la Sainte Eglise et le Pape. Oh ! Quand il y a cela, un humble agriculteur est plus grand et plus digne d'estime qu'un Souverain possédant la moitié du monde mais qui ne respecte pas le Vicaire de Jésus-Christ en ce qu'il enseigne, pense et aime.


[2444]
Celui qui aime vraiment le Pape devient un Apôtre parmi les siens au milieu de l'épouvantable perte de moralité de la société moderne si, en plus de professer les principes que Rome enseigne, il agit aussi bénévolement en apprenant à ceux qui dépendent de lui ces devoirs. Je suis sûr que tous vos ouvriers aimeront le Pape comme Pontife et comme Roi, parce que le Magistère de l'Eglise et des Evêques nous enseigne ce qui est conforme aux intérêts les plus sacrés des âmes. Donc, vive Pie IX, le Pape-Roi de Rome ! et nous pensons comme Lui, parce que le Pape, l'Evêque de Vérone, le Recteur du Séminaire et l'Archiprêtre de San Martino nous enseignent la vérité plus que... le Vicomte Venosta, Lanza, Sella et les autres Barabbas de la même clique


[2445]
Pour vous donner de mes nouvelles il faudrait que je vous parle pendant trois heures... autour d'un... verre ; mais je vous dirais seulement que mes Instituts d'Egypte marchent très bien. Le dimanche après Pâques, Son Excellence Monseigneur Ciurcia, l'Archevêque Vicaire Apostolique d'Arabie et d'Egypte, a honoré de sa présence mes Instituts, et mon église (sur les rives du Nil à quelques minutes de l'endroit ou la Sainte Famille a habité pendant sept ans) où il a pontifié et administré le Baptême aux infidèles convertis par mes Instituts, et la Confirmation à un bon nombre de convertis au préalable par les mêmes Instituts.

A Vienne j'ai été longuement reçu en audience par Sa Majesté l'Empereur d'Autriche, j'ai exercé une forte pression pour qu'il m'aide dans la construction de mon nouvel établissement dans la capitale d'Egypte. Sa Majesté a accueilli favorablement ma demande, et a ordonné à son ministre, ce fâcheux Comte de Beust, qui est protestant, de prendre des renseignements officiels auprès du Consul Général d'Egypte. Beust qui ne croit en rien et qui ne vient à l'église que pour être encensé, bien qu'il soit apparemment mon ami, pouvait me jouer quelque mauvais tour ; mais grâce à la Providence de Dieu, poussé par l'Archevêque et par d'autres personnes, que j'avais informées auparavant, il a fait un long rapport en ma faveur à l'Empereur de Vienne, et c'est pour cela que j'attends de ce côté là un bon subside... Mais il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

Même le Roi de Hanovre, qui est protestant, m'a très bien reçu ; puis il a fait écrire, à mon intention, par son Ministre une lettre d'éloges pour l'Œuvre de la Régénération de l'Afrique, en m'envoyant aussi son obole de 100 thalers.

Je pars dans quelques jours pour la Saxe et pour Berlin. Je vous demande de prier et de faire prier pour moi


[2446]
Après avoir salué votre famille de ma part, je vous prie de présenter mes hommages à mon cher Archiprêtre de San Martino, et de lui dire de prier pour moi. Je me déclare dans les Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, avec toute l'estime et l'affection

votre sincère ami



Abbé Daniel Comboni



P.-S. Si vous allez à Lonigo, veuillez transmettre tous mes hommages au Prince, à la Princesse son Epouse et à Mère Giovanelli






398
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
3. 5.1871

N° 398 (374) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/86

Vive Jésus, Marie et Joseph !

Vienne, le 3 mai 1871

Excellence Révérendissime,


 

[2447]
Son Excellence l'Archevêque Monseigneur Ciurcia passera sûrement la journée du Bon Pasteur, le dimanche après Pâques, dans nos Instituts du Caire, où il célébrera la Messe pontificale, baptisera et confirmera des adultes appelés par Dieu à la Foi grâce à l'œuvre de nos Instituts. Je vous en parlerai la semaine prochaine.

Jusqu'à présent, j'ai empoché plus de 9.400 francs. Voici à quel point on en est avec l'affaire de l'Empereur.


[2448]
La pétition que j'avais présentée à Sa Majesté Apostolique a été envoyée en Egypte par l'intermédiaire de Beust. Quand elle est arrivée, elle a dormi sur la table du Consul général ; mais comme j'en avais averti l'Archevêque, ce dernier, la semaine après Pâques est allé chez le Consul et il lui a recommandé l'affaire.

Le Consul a dit : " Comboni a sollicité l'Empereur pour que je demande une maison au Pacha ; j'ai déjà essayé une fois (?) et je crois qu'il ne me l'accordera pas".

Alors Monseigneur Ciurcia ajouta : " Il s'agit de tout autre chose ! Comboni a demandé à Sa Majesté de l'aider pour une maison qu'il veut construire au Caire sur le terrain qu'il possède, etc. ". Le Consul tomba des nues. Il se fit porter les dépêches, ils lurent ensemble ma pétition contresignée par une marque rouge de l'Empereur, et enfin le Consul s'est convaincu de la véritable teneur de ma demande. Il a demandé l'avis de l'Archevêque, qui lui a dit être plus que favorable. " Alors - a répondu le Consul - j'écrirai, en sa faveur ". J'avais donné l'ordre de faire le plan de la maison et de l'église. En effet Monseigneur Ciurcia avait dit au Père Stanislao de le porter au Consulat pour le 7 du mois courant, mais Dieu en a décidé autrement. Le Consul a répondu tout de suite à Vienne en faveur de ma personne, et en faveur de l'Œuvre en soi, sans présenter le plan à Sa Majesté.

Les Conseillers se sont réunis ce matin sous la présidence de Beust et ils ont décidé de formuler le Rapport dans les termes suivant :

1°. Demander à Sa Majesté combien il veut offrir de sa caisse personnelle ;

2°. Demander à Sa Majesté combien il veut que le Ministère des Affaires Etrangères donne sur les maigres fonds des Missions d'Orient ;

3°. Supplier Sa Majesté d'ordonner au Consul Général d'Egypte de recommander de façon spéciale les Instituts au Khédive d'Egypte, en lui déclarant que tout ce qu'il fera pour Comboni et pour les Instituts des Noirs, il le fera à Sa Majesté Apostolique et au Gouvernement Austro-Hongrois.

Ce dernier point est plus important que tous les autres. En Autriche il y a un grand intérêt pour la Mission. Quand ensuite nous pénétrerons vers le centre de l'Afrique, nous aurons à notre disposition les fonds de la Société de Marie.

Veuillez agréer mes hommages, et bénissez



votre indigne fils

Abbé Daniel Comboni



P.-S. J'espère que vous avez reçu les Statuts des Sociétés des Ouvriers catholiques de Vienne.






399
Friedrich F. von Beust
0
Vienne
18. 5.1871
N° 399 (375) - A FRIEDRICH FERDINANDO VON BEUST

MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES D'AUTRICHE

ASW, Reg. Admin. f. 27, fasc. 9



Vienne, le 18 mai 1871

Excellence,



[2449]
C'est avec la plus vive reconnaissance que j'ai reçu la lettre du 15 de ce mois que le Ministère des Affaires Etrangères m'a fait l'honneur de m'adresser, et dans laquelle il a daigné me communiquer le résultat de ses démarches auprès de Sa Majesté l'Empereur et la forte recommandation qu'il a faite en Egypte en faveur de mon Œuvre pour la Régénération de la malheureuse Nigrizia.

J'ai l'honneur par conséquent de présenter à Votre Excellence mes remerciements les plus chaleureux pour l'aide que vous avez daigné me faire accorder et pour tout le bien que vous m'avez fait.

Je vous assure que j'essayerai toujours d'être digne de la haute faveur et de la protection que le Gouvernement de Sa Majesté Impériale et Apostolique, dans sa grande sagesse, a daigné m'accorder.

Agréez, Monsieur le Ministre, l'expression de mon profond respect avec lequel j'ai l'honneur de me déclarer de Votre Excellence

l'humble et dévoué serviteur



Abbé Daniel Comboni

Missionnaire Apostolique

Supérieur des Instituts des Noirs en Egypte



Texte original en français, corrigé.






400
Mgr. Luigi di Canossa
0
Vienne
21. 5.1871
N° 400 (376) - A MONSEIGNEUR LUIGI DI CANOSSA

ACR, A, c. 14/87



Que Jésus et Marie soient loués.

Vienne, le 21 mai 1871

Excellence Révérendissime,



[2450]
Soyez patient ! cette lettre sera un peu longue parce que je vais essayer de vous expliquer ce que dans votre lettre du 17 de ce mois, depuis Grezzano, vous demandiez à propos de l'intérieur de la Nigrizia et du nouveau terrain qui nous est donné et se trouve à dix minutes de notre Etablissement du Caire.

Supposons que l'actuel Royaume d'Italie soit toute l'Afrique ; que la Toscane et l'Etat Pontifical de Ferrare à Frosinone soient l'Afrique Centrale, ou la Nigrizia, et que le Tyrol soit l'Europe. Dans une telle hypothèse, Vérone correspondrait à Rovereto, le Caire à Venise, Assouan à Ferrare, Khartoum à Pistoia, la tribu des Dinkas à Florence, la tribu des Bari à Sienne, et les sources du Nil à Rome.


[2451]
Le but de notre Œuvre est la conquête de l'Afrique Centrale ou Nigrizia, conquête à mener non pas par un assaut mais plutôt par un siège, de la part de nos Instituts, qui sont comme de nombreuses approches pour commencer le grand siège depuis le cours du grand Nil, le coté le plus faible de l'ennemi.

Qu'avons-nous fait jusqu'à présent ? Rien qu'un tout petit pas. Nous avons ouvert dans la ville de Rovereto un petit Collège pour former des missionnaires pour le Royaume d'Italie et surtout pour la Toscane et les Etats Pontificaux, et nous avons érigé trois Instituts à Venise pour y éduquer les Toscans et les Romagnoles, pour que, sous la conduite de Tyroliens éduqués à Rovereto et perfectionnés à Venise ils aillent, après avoir terminé leur formation, planter la Foi et la civilisation dans leurs terres natales de Toscane et des Etats Pontificaux. Ceci dit, le premier but des Instituts de Venise est la formation des apôtres indigènes de Toscane et de Romagne. Le deuxième but est l'apostolat parmi les Toscans et les Romagnoles résidant dans la Vénétie.

En d'autres termes : au Caire on forme des apôtres originaires de la Nigrizia, et on travaille pour la conversion des Noirs de l'intérieur de l'Afrique résidant en Egypte, emmenés par les marchands d'esclaves musulmans, qui sont allés les enlever dans les régions de la Nigrizia.


[2452]
Que reste-t-il à faire ? Nous devons continuer notre chemin pour réaliser notre premier but et parvenir par étapes jusqu'à l'intérieur de l'Afrique, puisque quelques Prêtres et de nombreuses Noires et Sœurs sont prêts pour l'Apostolat de l'Afrique Intérieure. Autrement les jeunes Noires (qui sont la force la plus efficace de notre apostolat) qui sont déjà prêtes (18 sur 54) risquent de vieillir et de mourir au Caire sans avoir pu travailler de façon fructueuse dans leur pays natal, où on convertit mille personnes contre cinq en Egypte.

Mais il faut pénétrer dans les régions de la Nigrizia tout en gardant les Maisons Fondamentales du Caire où le Missionnaire s'acclimate, apprend les langues et les coutumes de l'Orient, pratique le ministère Apostolique, où se forment toujours de nouveaux apôtres indigènes des deux sexes, et où on aide le Vicaire Apostolique d'Egypte surtout pour convertir les Noirs d'Egypte qui dépendent de sa juridiction.

Mais à Venise (le Caire) nous ne sommes pas chez nous. Nous devons dépendre du Patriarche et de sa Curie pour exercer notre ministère (c'est-à-dire, nous devons dépendre du Délégué Apostolique d'Egypte et des Franciscains pour exercer l'Apostolat) ; en suivant donc notre chemin, que devons-nous faire pour nous renforcer davantage en Egypte (Venise) et pour atteindre notre but qui est de nous installer à l'intérieur de la Nigrizia (la Toscane et les Etats Pontificaux) ? Voici ma réponse :


[2453]
Nous devons demander à Propaganda Fide et au Pape (qui le désirent vivement) de confier à notre Collège de Vérone et du Caire une partie de la Nigrizia à évangéliser par nous et par nos successeurs, et d'ériger dans cette région qui nous a été confiée un Vicariat Apostolique indépendant de toute autre juridiction, et dépendant seulement de Propaganda Fide, comme le sont tous les autres Vicariats. Il faut deux ou trois ans pour faire tout cela.

Supposons que Propaganda Fide confie aux Instituts de Rovereto et de Venise la charge d'évangéliser la Toscane, et qu'elle constitue le Vicariat Apostolique de la Toscane ; sans doute nommera-t-elle tout de suite un Supérieur sur proposition de l'Evêque de Rovereto, qui est le Chef de l'Œuvre, après avoir consulté le Vicaire Apostolique de Venise qui est Supérieur intérimaire de la Toscane, et qui a des pouvoirs de juridiction sur les Instituts de Venise.

Supposons aussi que l'Abbé Ravignani soit nommé Supérieur. Que fera ce chef du Vicariat Apostolique de la Toscane ? Voici la réponse en deux mots.


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L'Abbé Ravignani mesure ses forces, il évalue à peu près combien et quel genre de personnel peut fournir en dix ans le Collège de Rovereto, et quel genre et combien de personnes peuvent donner les Instituts de Venise. Il fait une exploration en Toscane avec quelques compagnons, et constate que ses forces lui permettent d'évangéliser la grande tribu de Florence et de sa Province. Il y installe des hommes et des femmes déjà formés dans les Instituts de Venise, après avoir érigé les postes de Bologne et de Pistoia avec autant d'Instituts pour lesquels, on peut le dire avec certitude, il y a les ressources pécuniaires de la Société de Marie à Vienne.

Mais l'Abbé Ravignani n'est pas chargé par le Saint-Siège de ne gagner au Christ que Florence et sa Province ; en tant que Vicaire Apostolique de la Toscane, il doit penser aussi à Lucca, Pise, Livourne, Sienne, etc. Pour cela le personnel fourni par les Etablissements de Rovereto et de Venise ne lui suffit pas.

Il pense alors demander de l'aide à certains Ordres Religieux. Il écrit donc, ou va s'entendre avec l'Evêque de Rovereto, chef de l'Œuvre. Et ce dernier fait les démarches auprès du Pape ou de Propaganda Fide et des Sociétés bienfaitrices pour décider lequel des Ordres Religieux doit être appelé pour venir en aide au Vicariat Apostolique de Toscane.

Supposons, par exemple, que nous pensions aux Camilliens. On contacte alors le Père Guardi, on évalue le nombre de missionnaires que ce petit Ordre peut fournir, et on lui confie par exemple la tribu de Lucca, en l'érigeant en Paroisse, comme si l'Evêque de Vérone appelait les Dominicains pour leur confier la Paroisse de Sainte Anastasie.


[2455]
Ceci fait, il est nécessaire de penser à Pise, Livourne, Sienne, Arezzo etc. On invite alors les Jésuites ou les Dominicains ou l'Institut de Don Bosco, ou celui des Missions Etrangères de Milan etc. pour occuper aussi ce terrain vierge.

Votre Excellence le voit bien, quand l'Apostolat catholique sera implanté en Toscane, l'Eglise pensera à la conquête de Pérouse, Viterbe, Rome et Frosinone avec l'œuvre, les conseils et l'aide des missionnaires de Toscane.

Mais si on appelle ces Ordres dans le Vicariat de Toscane, il arrivera qu'ils ne voudront pas dépendre des Prêtres séculiers de Florence ni d'un chef comme Ravignani. Dans ce cas, si l'Abbé Ravignani voit que les Camilliens se sont bien implantés à Lucca, et les Dominicains à Pise, etc. il demandera à Propaganda Fide de démembrer son Vicariat de Toscane (qui compte plus de quarante millions d'âmes) pour y former les Vicariats de Lucca pour les Camilliens, de Pise pour les Dominicains, de Livourne pour les Jésuites, de Sienne pour le Séminaire de Milan. Une fois donnée à ces Ordres l'indépendance juridique pour ne plus dépendre des prêtres de Rovereto et de Venise, nous aurons eu la grâce de contribuer à l'extension du Royaume du Christ dans la Toscane, en appelant à ce difficile apostolat les valeureux champions que sont les Jésuites, les Dominicains, les Camilliens, etc.


[2456]
Avec ces idées qui sont le noyau de notre Plan, on arrivera à résoudre légalement et canoniquement la question des Camilliens du Caire.

Mais je crois que Votre Excellence n'acceptera jamais de céder notre Institut masculin du Caire à deux Camilliens, et d'y mettre ensuite en pension nos candidats de Vérone en payant 300 francs par an et l'aumône de la Messe quotidienne. Nous qui sommes un peu libres, nous devrions être soumis à ceux que nous avons nous-mêmes appelés comme auxiliaires et non comme chefs !

Tel était le plan de Carcereri. Selon lui j'aurais dû quémander éternellement au profit des Camilliens afin de leur constituer un capital de plus d'un demi-million de francs et dépendre d'eux. Mais, maintenant il paraît qu'il s'est rendu compte de son erreur.


[2457]
Je vous ai donc expliqué le vif désir des jeunes Noires déjà prêtes à aller dans leurs contrées, et celui des missionnaires avancés dans leur chemin. Voici la raison de la nécessité que l'Institut du Caire soit stable. Celui-ci, en plus de viser les buts déjà mentionnés, sert et est encore nécessaire pour s'assurer si l'on peut ou non lancer un Prêtre européen dans l'apostolat ardu et dangereux de l'intérieur, car au Caire il y a des petits scandales, des jeunes filles nues, des hommes irrespectueux, etc. Mais à l'intérieur, les hommes et les femmes sont complètement nus ou presque. Au Caire l'hiver est comme le printemps chez nous et il ne fait pas très chaud en été, on mange et on boit comme en Europe. Mais à l'intérieur du pays, il y aura beaucoup plus à souffrir et à supporter pour Jésus-Christ.

Un Missionnaire peut donc être valable pour le Caire et pour l'Egypte et inapte pour la Nigrizia. Le Supérieur des Instituts du Caire étudie, observe et constate pendant trois on quatre ans si on peut envoyer un sujet au centre de l'Afrique, ne cum aliis praedicaverit ipse reprobus efficiatur. Et les moyens ?... Nous en parlerons à Vérone ; ayons confiance en Dieu, cherchons son Royaume et sa justice, et haec adiicentur nobis. Après...


[2458]
J'espère vous avoir tout exposé clairement : c'est très simple et tout est conforme au Droit Canonique, aux points de vue et aux lois de Rome.

Je souhaite savoir si vous avez bien compris. Je crois que c'est bien là votre pensée.

Il y a quelques années ce Plan a été jugé utopique par certains. Maintenant qu'ils constatent sa réalisation, ils disent qu'ils pensaient à cela depuis toujours et que ce Plan était le leur. Ils confirment ainsi le nôtre.


[2459]
Cela dit je n'ai qu'à ajouter une seule chose. Il faudra beaucoup souffrir par amour du Christ, se battre contre les puissants, les Turcs, les athées, les francs-maçons, les barbares, les éléments, les Prêtres, les Franciscains, le monde et l'enfer. Mais celui qui met sa confiance en soi-même se confie au plus gros âne du monde. Toute notre confiance est en Celui qui est mort pour les Noirs, et qui choisit les moyens les plus faibles pour accomplir ses œuvres, parce qu'il veut montrer que c'est Lui l'auteur du bien, et que nous, tout seuls, nous ne pouvons faire que le mal. Puisqu'il nous a appelés à cette œuvre nous triompherons, avec sa grâce, des Pachas, des francs-maçons, des gouvernements athées, des mauvaises pensées des bons, des ruses des méchants, et des pièges du monde et de l'enfer ; et nous n'arrêterons notre marche qu'au dernier soupir de notre vie.

Quand ensuite nous serons au paradis (et nous voulons y aller, vive Noé !), avec nos prières incessantes nous mettrons en croix Jésus et Marie, afin que, de gré ou de force, par nos prières, ils soient contraints de faire des miracles et de susciter des Apôtres comme Paul, et Xavier, jusqu'à ce que, le plus tôt possible, les cent millions de personnes de la malheureuse Nigrizia soient converties.


[2460]
Je ne parlerai pas maintenant de Hohenwart qui vous salue, ni de mon Prince Löwenstein qui est à Vienne et qui est en train d'arranger avec le Prince de Liechtenstein un legs perpétuel pour nos Instituts Africains, ni ce que Henri V Comte de Chambord m'a dit le 16 février 1869 : " si jamais je me retrouve à ma place sur le trône de France, votre mission de la Nigrizia ne manquera de rien " ; je ne parlerai pas non plus de l'affirmation du Nonce de Vienne qui voit une bénédiction spéciale de la main de Dieu sur notre Œuvre et sur mon voyage en Autriche, ni des espoirs qui existent déjà avec la Lloyd's autrichienne, ni de mes félicitations pour la fête de Saint Joseph, dans la cathédrale, ni des 100 napoléons-or que j'ai envoyés hier au Caire, ni des 1.400 francs que j'ai envoyés de Lyon au Caire, ni des 12.347 francs et 62 centimes empochés de janvier à aujourd'hui, ni des 1347 lettres que j'ai écrites entre-temps, ni de mon souhait que Monseigneur Pelami soit reçu au Séminaire pendant les deux jours de son séjour à Vérone, ni des timbres que j'emporterai d'Allemagne (il y a aussi un précieux timbre du Luxembourg qui était sur une lettre que j'ai reçue de l'Evêque Adames). Je ne dis rien de l'enthousiasme suscité à nouveau en Allemagne pour l'Afrique, ni de la remarquable opinion que m'a exprimée le Cardinal Archevêque de Vienne : " On peut certainement dire que l'espoir de voir la conversion de l'Afrique Centrale n'est pas perdu grâce à ce nouveau Plan sérieux " (en Autriche, cet espoir avait été perdu, et il y a deux mois, en me refusant l'aumône, on me disait et on m'écrivait : ad quid perditio haec).

Je ne parlerai pas non plus du bien que le Nonce m'a fait, ni des témoignages de nombreux Evêques, ni des aumônes secrètes que m'envoient des personnes inconnues et qui veulent garder l'anonymat ; (parlez de Barnabò avec Monseigneur Pelami ), ni du Comte Thum qui sort de chez lui en carrosse avec des béquilles, ni de ses salutations et de celles de sa femme adressées à Votre Excellence et au Marquis, etc. Je veux maintenant en venir à la triste communication (que Dieu soit béni etiam in adversis) du 15 avril que j'ai reçue en ces termes :



Du Ministère des Affaires Etrangères



Révérend Monsieur,


[2461]
Suite à votre humble proposition à ce Ministère Impérial et Royal des Affaires Etrangères, Sa Majesté Impériale, Royale et Apostolique avec la Souveraine Résolution du 6 mai courant, a gracieusement daigné vous accorder sur les fonds ministériels une subvention de 300 florins autrichiens

Sa Majesté a bien voulu aussi vous concéder avec la Résolution du 7 mai une autre subvention de 300 florins de sa caisse privée.

Pendant que ce Ministère s'honore de vous transmettre la présente communication en réponse à votre humble demande de mars dernier à Sa Majesté dans l'intérêt de la Mission Apostolique confiée à vos soins, vous êtes invité à vous présenter à ce dicastère, duquel vous recevrez les sommes mentionnées ci-dessus.

Pour ce qui concerne votre demande ultérieure pour que votre Œuvre soit recommandée à Son Altesse le Khédive d'Egypte, je vous communique que le Consul Général Impérial et Royal d'Egypte vient de recevoir à ce propos les instructions nécessaires.

Veuillez recevoir, Monsieur, l'assurance de toute mon estime.



Pour le Ministre des Affaires Etrangères

Baron Belieben, Consulteur Aulique




[2462]
Je n'ai pas du tout aimé le tour de passe-passe d'une lettre de recommandation aussi froide au Vice-Roi d'Egypte de la part du Ministre Beust, après qu'il m'ait dit de si belles paroles. Pour qu'une telle lettre de recommandation soit forte et efficace auprès du Khédive, elle aurait dû être écrite au nom de l'Empereur.

Le 16 de ce mois, j'ai donc écrit une lettre de remerciement à Sa Majesté Apostolique en lui demandant cette grâce. Notre chère mère Marie a exaucé notre vœu. J'ai moi-même porté la lettre au palais et je l'ai confiée à une personne de confiance. Hier, on m'a communiqué la nouvelle que Sa Majesté l'Empereur a ordonné au chef de son cabinet privé, le Conseiller Braun, de faire écrire au Consul Général d'Egypte de recommander l'Œuvre au nom de l'Empereur lui-même.

Que Jésus et Marie soient loués.

Donnez votre bénédiction et priez pour votre indigne fils



Abbé Daniel Comboni



P.-S. L'intérêt que Sa majesté Apostolique montre pour nous est un bénéfice pour le présent et le futur.