Comboni, en ce jour

Dans une lettre à Elisabetta Girelli (1870) de Vérone l’on lit:
Nous sommes unis dans le Sacré-Cœur de Jésus sur la terre pour être unis ensuite au Paradis pour toujours. Il faut courir à grands pas sur les chemins de Dieu et de la sainteté, pour ne s'arrêter qu'au Paradis.

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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
521
Abbé Pietro Casaretto
0
El-Obeid
20. 8.1873
N° 521 (491) - A L'ABBE PIETRO CASARETTO

ACSR - Corrispondenza Casaretto



El-Obeïd, le 20 Août 1873

Nécrologie



[3381]
Nous nous empressons d'annoncer, avec la plus vive douleur de notre âme, que le Révérend Père Giuseppe Pio Hadrian, Prêtre Bénédictin de la première Congrégation de Montecassino et Missionnaire Apostolique de l'Afrique Centrale, est décédé à l'âge de 26 ans environ le 17 août 1873 à 8 heures et demie du matin, après une longue maladie chronique contractée en Europe depuis plusieurs années et méconnue par l'art de la médecine. Il est mort à El-Obeïd au Cordofan, en Afrique Centrale, avec une résignation édifiante et un courage chrétien, fortifié par tous les réconforts de notre très Sainte Religion.


[3382]
Il était né dans une des tribus de la Péninsule du Sennàr, à côté du Fleuve Bleu. Agé de quatre ans, il avait été violemment arraché et enlevé du sein de sa famille par de féroces marchands de chair humaine. Après avoir été plusieurs fois vendu et revendu en Nubie, il avait été conduit au Grand Caire d'Egypte où il avait été racheté par le Révérend Abbé Nicola Olivieri, de sainte mémoire, et conduit en Italie. Il avait été reçu par la bonté des Moines Bénédictins à Subiaco, près de Rome, et avait reçu par leur grâce les soins les plus diligents et les plus affectueux. Ayant été instruit sur les premiers rudiments de notre Sainte Religion, il avait reçu le 24 juin 1853 le Saint Baptême au Monastère de Sainte Scolastique de l'Illustre et Révérend Père Abbé Casaretto, Président de l'Ordre précité, qui actuellement est le Supérieur Général de la première Congrégation de Montecassino du Patriarche Saint Benoît. Avec grande dévotion, le 26 avril 1856, il avait fait sa Première Communion à Proto-Cenobio, où le 18 octobre de la même année il avait reçu le Sacrement de la Confirmation des mains de son Eminence, Monsieur le Cardinal De Andrea, de sainte mémoire. Le 16 février 1861, il était entré au Noviciat de l'Illustre Congrégation Bénédictine citée ci-dessus et avait pris l'habit monastique le 24 de ce même mois ; le 19 mars 1863 il avait prononcé ses premiers vœux .


[3383]
Correspondant fidèlement à la grâce divine, le jeune religieux africain avait été admirablement imprégné par l'esprit de son Saint Patriarche. A une piété et à une candeur admirables, à une conduite sans défauts, était venue s'ajouter dans son esprit une instruction solide dans les sciences sacrées avec une bonne connaissance de la Liturgie, de la musique sacrée, du dessin et de la décoration ainsi que la connaissance de quelques langues.


[3384]
Alors qu'il offrait les plus belles espérances de réussir un modèle d'une éminente piété et un religieux bien instruit, une lente maladie l'avait surpris en 1867, maladie méconnue par les plus grands médecins et rebelle à tout traitement et tout soin prodigué par l'éminente charité de ses Supérieurs, qui avaient jugé que le climat de sa patrie pourrait lui redonner sa vigueur première et sa santé.

Avec l'approbation de l'immortel Souverain Pontife Pie IX et de la Sacrée-Congrégation de Propaganda Fide, il avait été confié, l'année dernière, au Révérend Pro-Vicaire Apostolique d'Afrique Centrale, l'Abbé Daniel Comboni, pour qu'il le conduise dans ses terres natales, et qu'une fois rétabli dans sa santé, il consacrât sa vie à l'apostolat de cette Sainte Mission.


[3385]
Le 26 mai 1872, il avait reçu les Ordres mineurs au Sacro Speco, qui est le berceau de l'illustre Ordre Bénédictin, des mains de Son Excellence Monseigneur Filippo Manetti Evêque de Tripoli, Administrateur Apostolique de l'abbaye nullius de Subiaco. Le 2 juin suivant, il avait été promu au Sous-Diaconat dans le même Sacro Speco, le 9 au Diaconat et le 16 au Sacerdoce. Le 12 août, il était arrivé à Vérone à l'Institut des Missions pour la Nigrizia ; le 3 septembre il avait eu l'honneur d'être reçu, à Vienne, avec son Pro-Vicaire Apostolique, par Sa Majesté Apostolique, l'Empereur d'Autriche ; trois jours après il avait eu la joie de visiter l'illustre et ancien Monastère de Saint Pierre à Salzbourg, ainsi que celui des moniales bénédictines de Nonnberg fondé par Sainte Erentrude en 581 et qui durant 13 siècles de son existence n'a jamais été détruit.


[3386]
Ceci avait été un des plus beaux souvenirs de sa vie. Il avait admiré l'éminent esprit de son vénéré Patriarche Saint Benoît chez ces pieuses religieuses bienfaitrices de l'Œuvre de la Rédemption de sa chère Nigrizia, et avec elles il avait tissé des liens sacrés par de réciproques et quotidiennes prières qu'il avait pu maintenir fidèlement jusqu'à sa mort. Le 26 du même mois il arriva au Caire dans l'Institut des Noirs où il édifia tout le monde par ses belles vertus. Le 26 janvier de cette année, il avait quitté la capitale de l'Egypte et avec la grande caravane Apostolique, conduite par le Chef de la Mission, et s'était dirigé vers l'Afrique Centrale ; après quatre-vingt-dix-neuf jours d'un difficile et fatigant voyage à travers le Nil et le Désert, il était arrivé à Khartoum, capitale des possessions égyptiennes au Soudan où il était resté pour un mois. Ensuite il était reparti avec le Pro-Vicaire en naviguant sur le Fleuve Blanc et, en traversant le Cordofan à dos de chameau, il était arrivé le 19 juin ici, à El-Obeïd, la capitale.


[3387]
Après avoir demeuré un mois dans cette nouvelle Mission où l'air est salubre, son ancienne maladie avait refait vigoureusement surface et l'avait affaibli. Sa vie a pris fin après 20 jours de vives douleurs et après que sa santé se fût aggravée par une violente dysenterie, consécutive à une infection chronique de l'appareil digestif. Ces souffrances ont été supportées avec une joie chrétienne et une résignation édifiante, elles ont mis fin à une vie immaculée et éminemment religieuse avec la mort du juste, laissant dans la douleur ses chers confrères Missionnaires, qui ne pourront jamais oublier cette première fleur du Sacerdoce indigène de l'Afrique Centrale, embellie par les grâces éclatantes de la religieuse vertu de la plus célèbre et illustre parmi les Familles Cénobitiques de l'Eglise Catholique.



El-Obeïd, datée de notre Résidence du Cordofan, le 20 août 1873



Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale





Très Révérend Abbé Général,




[3388]
En vous faisant part de la triste nouvelle de la mort de l'Abbé Pio, je vous promets d'en écrire les détails par l'intermédiaire de Propaganda Fide.

Il est parti directement au paradis. J'ai fait part du décès au Président d'une Congrégation à Vérone, puisque le 18 août de l'année dernière je l'avais associé à celle-ci, pour que soient célébrées les 600 (six cent) Messes qui lui reviennent de droit.

Je ne peux vous dire combien ma douleur est grande ; mais que la très sainte volonté de Dieu soit accomplie.

Je présente mes respects au Père Procureur et à tous les Pères. Tous mes respects également à Monseigneur Manetti, Evêque à Subiaco.

Bénissez votre très humble et véritable serviteur,



Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique






522
Père Germano Tomelleri
0
El-Obeid
31. 8.1873
N° 522 (492) - AU PERE GERMANO TOMELLERI

APCV, 1458/317



Vive Jésus, Marie et Joseph !

El-Obeïd, Cordofan, le 31 Août 1873

Mon très cher et Vénérable Père Germano,



[3389]
Cela fait un moment que je désire vous écrire pour évoquer avec vous, en pleine connaissance de cause, vos deux chers disciples, vos confrères et fils, les Pères Stanislao et Beppi ; mais les multiples occupations ainsi qu'une certaine négligence dont je me sens coupable, m'ont empêché de le faire.

Je connais bien votre cœur depuis que vous étiez séculier ; nous mangions sous le même toit la traditionnelle part de polenta, au collège Mazza, alors que j'étais jeune et sans cervelle, et que vous étiez aussi jeune mais déjà sage et prudent. Je suis donc certain que vous me pardonnerez.


[3390]
Les deux Camilliens sont actuellement l'ornement et le pilier de mon immense Vicariat Apostolique, qui trouve en Saint Camille une aide et une protection de valeur pour la malheureuse Nigrizia.

Avec les modestes moyens que je leur ai fournis, ils ont été les premiers à fonder une nouvelle Mission en cette capitale, plus peuplée que Vérone, où ils ont fait surgir une vraie communauté chrétienne. Cette Mission qui est la vraie porte de la Nigrizia offre les plus beaux espoirs. L'Œuvre de Saint Camille peut donner ici des fruits bien plus que dans n'importe quelle autre ville d'Europe, puisque tous sont des infidèles et parce qu'il est nécessaire d'implanter toutes les Œuvres Catholiques, parmi lesquelles celles très importantes de Saint Camille.

Nous pouvons dire la même chose de Khartoum, où le climat s'est nettement amélioré par rapport à la période où les Missionnaires de l'Institut Mazza y étaient. Cependant, le climat d'El-Obeïd est meilleur ; l'été que j'ai passé à partir du 20 juin jusqu'à aujourd'hui correspond au printemps à Vérone.


[3391]
En peu de mots, le Père Stanislao est un homme capable d'être à la tête d'un Diocèse et même plus, surtout s'il reste à mes côtés, car il a une grande influence sur moi et il a donné des preuves que moi (très indigne) j'ai une influence sur lui. Nous sommes les deux petits diables, comme on nous a appelés à Rome ; je suis en mesure de tempérer ses élans qui le pousseraient plus loin que son devoir, et lui a la force de me contenir dans les limites de la prudence et de la justice.

De cet enchaînement providentiel, il résulte un grand bien : en moins de six mois nous avons ressuscité, avec l'aide prodigieuse de Dieu, cet immense Vicariat qui était moribond ; nous l'avons ainsi amené à un niveau de prospérité qu'il n'a jamais connu, même pas au temps de mon illustre prédécesseur Monseigneur Ignazio Knoblecher. Beppi, quant à lui, est un homme qui affiche cinquante ans pour son bon sens, sa prudence, ses principes, sa solidité et sa fermeté d'âme. Je le dis avec orgueil, il est devenu tel sous ma houlette, grâce à ses excellents et sains principes acquis à l'école du "Paradis" mais aussi grâce à l'exercice d'un apostolat des plus actifs.


[3392]
Ce sont deux vrais et valeureux Missionnaires, de bons et braves ouvriers de la vigne du Seigneur, ce sont deux vrais et fidèles fils de Saint Camille de Lellis. Ils se laisseraient massacrer et couper en morceaux et par conséquent ils sont capables de renoncer à n'importe quel mérite et désir pour rester fidèles à leurs quatre vœux et pour obéir à leur légitimes Supérieurs Camilliens. Leur éducation religieuse au "Paradis" de Vérone a dû être très solide. La défection de Perinelli et de quelques autres Napolitains et Véronais, qui étaient dans mon Institut du Caire, me fait apprécier d'autant plus ces deux apôtres Camilliens. Ils me donnent la conviction, d'une manière pratique, que ce que j'ai écrit dans mes Règles pour le naissant Institut Africain de Vérone, - c'est à dire que pour travailler une vigne ardue comme celle de l'Afrique, il est nécessaire d'avoir une solide instruction religieuse et d'appartenir à une école d'une extraordinaire abnégation selon l'esprit de Jésus-Christ Crucifié, en vue du renoncement à soi-même pour se jeter dans les bras de l'obéissance et de Dieu -, ne peut s'obtenir sans l'aide extraordinaire de la grâce. Ceci est d'une grande nécessité pour l'Afrique Centrale.


[3393]
Ces deux sujets sont tellement familiers du mode de vie arabe en ces pays, vie pleine de privations, que je n'ai jamais vu ainsi aucun Missionnaire d'Afrique Centrale : ils voyagent à dos de chameau, ils dorment sur une peau avec leurs vêtements de voyage, ils mangent le locma (nourriture locale) avec les Arabes et jouissent d'une santé de fer, ils travaillent comme les indigènes sous le soleil et en tout lieu. Personnellement je dois me ménager, c'est peut-être pour cela que je jouis d'un excellent état de santé.


[3394]
Cependant, en dépit de mes ordres très sévères, eux ne pensent pas à eux-mêmes, ils accourent, sans égards, là où le ministère les appelle.

Bref, il est difficile d'avoir deux Missionnaires comme eux, si bien formés pour la Nigrizia ; donc on peut imaginer combien ils me sont chers, et combien je dois compter sur leur activité.

Le jour de l'Assomption j'ai baptisé onze infidèles, parmi lesquels il y avait un mahométan. J'en baptiserai 12 le 14 septembre, et nous avons beaucoup d'autres catéchumènes qui attendent le jour du Baptême.

Si je devais vous décrire les perspectives futures qu'il y a en cette Mission qu'ils ont fondée, je n'en finirais pas.


[3395]
Il est nécessaire maintenant d'arriver à une solution définitive concernant l'avenir de ces Camilliens, qui sont ici par la grâce de Dieu, de Pie IX et du Père Guardi. Dans ma résidence principale, à Khartoum, il y a le Père Stanislao en tant que mon Vicaire Général. Beppi est ici. Mais personne ne sait que je suis en train de vous écrire.

Hier, Beppi a reçu une lettre de Guido qui lui dit, entre autres, de se rappeler qu'il est de l'Ordre des Camilliens et que par la voix de l'obéissance, il est tenu de rentrer au bercail, etc.…

Vous devez savoir, mon cher Père Germano, que j'ai été gros nigaud et peut-être le suis-je encore. Mais par son insondable et adorable sagesse, Dieu a permis que je puisse faire tant de bêtises et Il m'a fait passer à travers tant de pièges que maintenant je les flaire souvent de loin.


[3396]
J'ai traité avec le monde et avec la diplomatie la plus haute, multiforme et subtile. J'ai traité avec les saints et les canailles, avec les grands et les petits. Pour cela, je crois que, grâce à Dieu, maintenant je ne suis plus le nigaud que j'étais à San Carlo, où l'on ne pouvait connaître ni le milieu laïque, ni celui des ecclésiastiques, ni le milieu des francs-maçons, ni des papistes, bref, rien du tout ! L'on se consacrait aux études et c'était tout.

Le Père Guido a écrit en tant que vrai Fils de Saint Camille et je l'estime.

Mais il me semble entrevoir que, dans les vénérables raisons supérieures, pour une louable et juste intention, on pense peut-être rappeler ces deux Pères en Europe. Les vénérables Supérieurs Camilliens ne feraient que ce que le Seigneur leur inspire ; et je connais si profondément Beppi et le Père Stanislao, si fermes dans leur devoir sacré, qu'ils laisseraient un paradis pour obéir à leurs Supérieurs.


[3397]
C'est pour cela qu'au Nom de Dieu - puisque le Saint-Siège a décidé de me mettre ici pour sauvegarder les intérêts de plus de cent millions d'infidèles en vue de les convertir à la Foi - je m'adresse à vous, pour que vous soyez mon avocat et protecteur auprès du Père Guardi afin que les projets conçus il y a de cela six ans soient exécutés, à savoir : fonder en Afrique Centrale une Maison Camillienne, qui doit être comme le noyau et la pépinière pour pouvoir assumer une ou plusieurs missions à l'intérieur de la Nigrizia.


[3398]
Quand le fameux Rescrit Pontifical quinquennal a expiré, j'ai eu l'honneur de parler avec le Révérend Père Guardi, lequel est animé par la plus vive charité depuis qu'il est Camillien. Il a permis à ses deux chers fils, de rester en Afrique indéfiniment. Il m'a assuré que, lorsque l'on pourrait fonder une maison Camillienne en un lieu sûr du Vicariat, ayant les conditions requises par la Sainte Règle de l'Ordre Camillien et avec l'accord préalable de Propaganda Fide, il y consentirait, compte-tenu du réel désir de ces deux fils.

Or puisque je vois des nuages se dessiner à l'horizon - à Vérone, on a ouvert le noviciat, en France et en Angleterre l'on demande des Camilliens - il semble qu'est venu le moment de traiter la très importante affaire Camillienne en faveur de l'Afrique Centrale, où existent plus d'âmes, plus de malheureux, plus de nécessiteux qu'en France et en Angleterre. Ces âmes qui peuvent être sauvées plus facilement et en plus grand nombre qu'en Europe, nous ne devons pas oublier qu'elles ont été, elles aussi, rachetées par le sang de Jésus-Christ.


[3399]
Ainsi, je crois que le moment choisi par la Providence, pour jeter des bases durables et éternelles à la fondation d'une Œuvre Camillienne dans la Nigrizia Centrale, est venu.

En effet, j'ai à ma disposition les moyens nécessaires pour satisfaire les justes requêtes du Révérend Vicaire Général Guardi et toutes les conditions voulues par lui et par la Règle Camillienne. N'oublions pas non plus que ces deux incomparables Missionnaires forgés de toutes pièces pour l'Afrique Centrale, désirent sacrifier leur vie pour cette sainte œuvre. Songez que si en Europe ces deux sujets faisaient deux degrés de bien, ici ils en font trente, parce qu'ils sauvent beaucoup d'âmes, ce qui appelle sur l'Ordre Camillien les bénédictions les plus distinguées.


[3400]
Le Père Germano objectera qu'aujourd'hui il n'y a que deux Missionnaires Camilliens, et que l'Ordre en Europe est tellement mal en point qu'il ne peut pas en donner d'autres. Je réponds qu'aujourd'hui, ils sont bien deux, mais que d'ici dix ans ils y aura vingt Missionnaires Camilliens en Afrique, et quarante en plus en France, associés au glorieux Ordre, grâce à l'Afrique.

Je connais très bien les Français et leur manière de penser, bien plus que vous ou n'importe qui d'autre ne puisse les connaître. Aussi longtemps qu'en France l'Ordre Camillien se limitera aux objectifs et services hospitaliers, il ne prendra pas pied, tel que l'Ordre des Fatebenefratelli, car les Français ne veulent pas d'hommes dans leurs hôpitaux mais des femmes ; d'ailleurs presque tous les hôpitaux français sont entre les mains de femmes. Pour qu'un Ordre hospitalier prenne pied en France, il est nécessaire qu'il ait une œuvre quelconque de charité (que les Français appelle "œuvre de zèle") et en même temps d'apostolat ou bien une œuvre de prédication et de mission au peuple. J'ai visité presque tous les Etablissements de toute la France où existent plus de trois cent Congrégations religieuses masculines et féminines.


[3401]
Les Frères des Ecoles Chrétiennes ont à eux seuls 750 Maisons. Or, ni les Trinitaires, ni les Augustins, ni les Fatebenefratelli n'ont eu une heureuse issue comparés aux Instituts Missionnaires. Si l'ordre de Saint Camille s'enrichit d'une œuvre quelconque d'Apostolat, par exemple celle de l'Afrique Centrale, je peux vous assurer que les postulants viendront en foule pour s'associer à l'Ordre de Saint Camille et il y en aura pour la France, pour l'Angleterre et pour l'Afrique. N'ayant pas l'expérience que Dieu m'a donnée à ce sujet vous pouvez ne pas y croire. Mais conservez ma lettre quelques années et vous constaterez la vérité de ce que je viens de vous dire.


[3402]
Il suffirait qu'une fois terminés les pourparlers avec le Supérieur Général et avec Propaganda Fide à propos des Pères Stanislao et Beppi, je publie dans la Propagation de la Foi, dans les Missions Catholiques de Lyon, dans l'Univers, dans le Monde ainsi que dans quelques Semaines Religieuses de France, un éloge de ces deux Camilliens. En même temps j'inciterais les Français à entrer dans l'Institut Camillien présent actuellement dans le Diocèse d'Autun, en disant que, s'ils se font Camilliens, ils peuvent être Missionnaires en Afrique Centrale.

Vous verrez alors que de nombreux candidats accourront vers votre Institut ; ceux-ci pourraient être formés par le bon Tezza (d'ailleurs c'est très bien que le Maître des Novices soit un italien comme Tezza).


[3403]
Cela, je l'espère avec l'aide de Dieu et du Sacré-Cœur de Jésus à qui je consacrerai tout le Vicariat le 14 prochain.

Etant donné que ces affaires délicates et importantes ne peuvent être traitées par écrit, étant donné aussi que les Supérieurs ont le droit de bien discerner, de sonder et de connaître tout le terrain pour découvrir la pure vérité et la volonté de Dieu (la seule que je désire et que je veux, sinon on bâtirait sur le sable), j'ai décidé d'envoyer tout de suite le Père Stanislao en Europe pour qu'il conduise au mieux cette affaire et d'autres affaires mineures, pour mon compte, en Allemagne et en France. J'avais décidé de l'envoyer en janvier, mais toute chose bien réfléchie, il partira début octobre ou au plus tard avant la fin octobre.


[3404]
Il ira à Rome et à Vérone. Vous vous entendrez au mieux et moi, entre-temps, sachant que les Cœurs de Jésus et de Marie sont plus forts et plus puissants que les Pères Guardi et Germano, je prierai et ferai de nombreuses neuvaines dans mes Instituts d'Afrique, à La Salette, à Lourdes, à Notre Dame des Victoires, etc.… pour que s'accomplisse la très sainte volonté de Dieu suivant ma très sainte volonté ! Si vous avez décidé de rappeler les deux, mettez pour le moment en suspens ce projet et priez Saint Camille et la Très Sainte Vierge Marie pour que ne s'accomplisse que la volonté divine pour l'honneur et l'avantage de l'Ordre. Veuillez saluer de ma part Regazzini et tous les bons Pères. Vous verrez bien ce que le Père Stanislao est devenu en six ans : vous en serez sûrement content. Priez pour votre très affectueux ami



Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale




[3405]
P.-S. Je vous prie de tenir, pour le moment, ces choses sous silence. Traitons-les d'abord devant Dieu et espérons-en par la suite tout le bien.

Je vous prie, in visceribus Christi, de parler et d'agir en faveur de l'Afrique Centrale car ainsi vous agirez en faveur de votre Ordre illustre qui par l'esprit Apostolique en faveur de la Nigrizia acquerra cette vitalité qui actuellement vous fait défaut parmi les francs-maçons d'Europe.

Ici, dans nos rapports avec les autorités politiques, nous sommes au Paradis. Les Pachas sont nos humbles serviteurs et font tout ce que nous voulons.

Le Père Stanislao a fait trembler le Pacha de Khartoum, il y a de cela neuf jours déjà ; ce dernier a dû recourir à des médiateurs pour faire la paix. Louange à Dieu !

Souvenez-vous de moi chaque jour dans vos prières. Saluez Bonzanini que je n'ai pas oublié, dites-lui qu'il prie chaque jour pour la Nigrizia et pour son



Daniel Comboni






523
Comité de Marienverein
0
El-Obeid
2. 9.1873
N° 523 (493) - AU COMITE DE MARIENVEREIN

"Bericht des Marienverein" (1873)



El-Obeïd, le 2 septembre 1873

Respectable Comité !



[3406]
Après avoir pris en charge la Mission de Khartoum et par conséquent aussi l'école des filles, dont le nombre qui la fréquente est actuellement devenu considérable et que j'ai pourvue d'Instituteurs et d'Institutrices, mon devoir le plus urgent était de fonder un nouveau poste de Mission à El-Obeïd, la capitale du district du Cordofan. Celui-ci aussi est déjà en pleine activité et est doté du nombre nécessaire de Prêtres et d'Institutrices. Actuellement je suis sur le point de mettre sur pied une autre filiale du poste du Cordofan au Djebel Nouba et ainsi de propager toujours plus le christianisme parmi les tribus noires, en exécutant, autant qu'on puisse le faire, la tâche qui revient à la Mission. Mais pour ceci sont nécessaires, non seulement des Missionnaires, mais aussi et surtout des moyens financiers.


[3407]
Veuillez, respectable Comité, prendre en considération que la nourriture à Khartoum et au Cordofan coûte deux fois plus qu'en Europe et qu'à l'exception de la viande, du café, et du sel, le coût des autres produits alimentaires s'élève à quatre fois plus.

Les voyages en Afrique coûtent aujourd'hui le double de ce qu'ils coûtaient au temps du Pro-Vicaire Apostolique Knoblecher, tandis que la location d'une barque, qui coûtait 100 piastres, en coûte actuellement 180. Par ailleurs, à Khartoum il existe aujourd'hui deux établissements, l'un féminin et l'autre masculin, et deux aussi au Cordofan, et tous doivent être pourvus, même d'une manière modeste, de produits alimentaires, de vêtements, d'habitations, de mobiliers, d'instruments et d'outils pour les arts et métiers et pour l'agriculture et même de médicaments.

Prenant en considération tout cela, votre louable Comité comprendra qu'avec les maigres moyens financiers dont je dispose, de grandes économies ont été nécessaires pour pouvoir effectuer un si grand travail.


[3408]
Il faut prendre en considération donc, qu'en un temps si bref et avec des moyens si limités nous ayons réussi à redonner vie à un si vaste Vicariat déjà mourant ; nous avons agrandi ce qui existait déjà, fondé une autre mission à El-Obeïd et fait venir et s'y établir pour la première fois des Sœurs zélées et habiles qui donnent actuellement des cours ouverts à tous. Il me fallait former et instruire les garçons et les filles afin que ceux-ci fussent plus tard en mesure d'être Instituteurs et Institutrices parmi leurs tribus.


[3409]
J'ai réussi à former des maîtres et des catéchistes noirs compétents, mais aussi des cordonniers, des maçons, des menuisiers, etc. ... et ainsi j'ai pu en envoyer aux Missions de Khartoum et du Cordofan. Des indigènes ainsi formés sont indispensables pour l'existence d'une Mission, puisque justement ce fut le manque d'un tel personnel qui, après la mort de Knoblecher, rédusit la Mission au point de la faire disparaître, alors qu'elle disposait de toutes sortes de moyens.

Compte tenu de tout ce qui a été exposé ci-dessus, je crois avoir fait, avec grande fatigue et difficulté, tout le possible pour la prospérité de la Mission ; et par cela je crois avoir aussi acquis la reconnaissance de votre Haut Comité, des Révérends Ordinariats et de tous les Bienfaiteurs de la Mission.


[3410]
J'espère aussi, d'ici un an, et si j'obtiens de l'Europe la subvention désirée, pouvoir déclarer que, grâce au laborieux zèle de mes Confrères, le Vicariat africain est l'un des plus florissants du monde.



Daniel Comboni






524
Card. Alessandro Barnabò
0
El-Obeid
15. 9.1873
N° 524 (N.494) - AU CARDINAL ALESSANDRO BARNABO

AP SOCG, v. 1003, ff. 742 - 743



El-Obeïd, le 15 septembre 1873

Eminent et Révérend Prince,

[3411]
Grande a été hier la joie éprouvée par tous les membres de cette sainte Mission, lorsque j'ai fait la solennelle Consécration de tout le Vicariat au Sacré-Cœur de Jésus. La fête de l'Exaltation de la Sainte Croix de 1873 marque une nouvelle ère de miséricorde et de résurrection pour l'Afrique Centrale qui ployait depuis des siècles sous l'empire de Satan.

Nous avons ouvert le cœur non pas à une douce espérance, mais à une infaillible certitude que le Cœur de Jésus, qui verse ses grâces à torrents en ces temps d'universelle calamité pour l'Eglise et pour le monde, a exaucé dans son infinie pitié nos vœux et ceux de centaines de milliers de pieux Associés à l'Apostolat de la Prière et au Messager du Sacré-Cœur qui, hier, dans toutes les cinq parties du monde ont accompagné avec des publications spéciales l'Acte de Consécration, que j'ai prononcé solennellement à El-Obeïd. Nous sommes donc profondément convaincus que maintenant commence ce grand événement d'une réelle régénération de la Nigrizia, pour laquelle, sous les auspices de la Vierge Immaculée, de Saint Joseph, des Apôtres, des Saints et des Martyrs Africains, débute la fin des malheurs séculiers sous lesquels gémissent plus de cent millions d'infidèles qui composent ce Vicariat.


[3412]
Bien que par notre faiblesse, nous ne soyons pas indifférents aux multiples croix (elles sont toujours le sceau des Œuvres de Dieu !) qui nous entourent, nous sommes cependant toujours prêts aux plus dures souffrances, aux fatigues les plus ardues et même à la mort pour atteindre le grand objectif de bien consolider ces Missions de l'Afrique Centrale et d'appeler ces peuples à la Foi. Sous le glorieux étendard du Sacré-Cœur de Jésus qui a palpité sur la Croix pour ces pauvres âmes aussi, notre cri de guerre jusqu'à notre dernier soupir sera : Ou la Nigrizia, ou la mort !


[3413]
Le solennel office célébré hier selon les normes de ma Circulaire du 1er août dernier, a été précédé du baptême solennel de 12 adultes, suivi par la Confirmation de 25 néophytes de cette naissante Mission d'El-Obeïd.


[3414]
Pour vous donner un bref aperçu de la situation religieuse des marchands catholiques du Vicariat, je vous envoie une copie de ma Circulaire du 1er août dernier, (qui a produit d'excellents résultats) dans laquelle sont brièvement indiqués les principaux désordres qui dominent actuellement parmi nos chrétiens.

Il en existe un autre : la pratique de l'usure, pour laquelle je pense pour le moment ne prescrire aucune norme, vu les décisions de la Sacrée Pénitencerie Apostolique, mais je me pencherai plus tard sur ce problème. Chez tous les chrétiens, ici, l'on prête et l'on emprunte de l'argent à 5, à 10, à 15 pour cent par mois et parfois plus, c'est à dire à 60, à 120, à 180 et même à 200 pour cent. Nous avons essayé à certaines occasions, non sans résultats, d'empêcher cette usure extraordinairement juive, qu'on veut justifier surtout par le risque fréquent de perdre tout le capital ou par l'excès de gain de celui qui contracte un emprunt, touchant parfois la somme nette du cent, ou du deux cent et même du trois cent pour cent par an. Je n'ai pris à ce propos aucune mesure définitive.


[3415]
La très importante mesure prise concerne spécialement les chrétiens coopérant à la traite des Noirs et au commerce des esclaves. Ils contribuent à ce crime en fournissant fusils, poudre, argent ainsi que d'autres aides de toutes sortes. Bien qu'il soit absolument impossible actuellement de détruire cette énorme plaie dans l'Afrique Centrale, la réelle influence de la Mission catholique, les mesures prudentes et pondérées que je suis en train de mettre au point avec le gouvernement local et avec l'autorité consulaire autro-hongroise, vont cependant puissamment contribuer à essuyer tant de larmes et à frapper l'infâme trafic des esclaves, pour le bien de l'humanité et de l'Eglise catholique.


[3416]
L'esclavage et la traite des Noirs sont en pleine vigueur dans ces contrées, malgré les traités de la prétendue abolition et malgré les faux ordres de Son Altesse le Khédive aux Gouverneurs du Soudan. Plusieurs centaines de giallaba (marchands d'esclaves) partent plusieurs fois par mois depuis Khartoum et El-Obeïd, armés non pas de lances, comme aux cours des années passées, mais bien de fusils tout neufs, dernier modèle, à aiguille et à Chassepot.

Ils pénètrent dans le territoire des tribus des Noirs et donnent la chasse à ces pacifiques habitants jusque dans leurs villages. Après avoir tué tous ceux qui leur résistent, ils enlèvent par centaines les garçons, les fillettes, les femmes enceintes et les jeunes mères avec leurs enfants, ainsi que les familles entières : tous nus et à pied à travers de longs et durs chemins, ils les emmènent à El-Obeïd et à Khartoum, ou bien à travers les forêts et les déserts ils les conduisent en Nubie, en Egypte et sur les côtes de la Mer Rouge pour y être vendus ou pour les exploiter en les prostituant.


[3417]
J'ai dans la Mission des garçons et des filles enlevés depuis moins d'un mois, dont le père, la mère ou l'oncle a été tué sous leurs propres yeux, au moment de leur enlèvement. Plus de deux mille giallaba sont partis d'El-Obeïd, il y a environ un mois, avec des fusils extraordinaires, pour massacrer les habitants d'une montagne appelée Dàgio, peuplée de bien 14.000 Noirs.

D'après des nouvelles récentes, il paraît qu'on a tué tous les chefs et rendu esclaves les survivants. Le Gouvernement local, jusqu'à mon arrivée au Cordofan, recevait une taxe par tête d'esclave. Il y a deux ans le Pacha de Khartoum, prédécesseur de l'actuel Pacha, est venu, au Cordofan avec plus de mille soldats armés de fusils et de canons de petit calibre et il alla parmi les Nouba pour donner la chasse aux Noirs ; il en captura 9.400 et en tua beaucoup. Il n'en a déclaré que 1.800 au gouvernement du Caire ; la somme gagnée de la vente des 7.600 restants a été partagée entre lui-même, ses officiers, le médecin Giorgi ( qui a étudié à Pise) et les autres scribouillards.


[3418]
Souvent le Divan du Caire envoie aux Gouverneurs du Soudan l'ordre de fournir et d'envoyer en Egypte tant de centaines de belles Abyssiniennes, tant de centaines de plantureuses femmes Dinka, tant de milliers de Noirs bien robustes pour en faire des eunuques, etc. ... ceci pour satisfaire les demandes et les désirs des hauts fonctionnaires du Caire, d'Alexandrie..., et pour en faire des cadeaux.

Je me limite aujourd'hui à cela, parce que je vous expédierai la récente étude sur l'esclavage faite par le Père Carcereri à ma demande, lorsqu'elle aura été revue par nous tous et après avoir constaté la vérité de tous les points : comment voyagent ces pauvres esclaves, comment sont-ils traités ?


[3419]
Je ne parlerai que de ce que mes yeux ont vu au cours du voyage de Khartoum à El-Obeïd, pendant lequel j'ai rencontré plus de mille femmes esclaves toutes nues âgées de 2 à 20 ans, et plus de 500 garçons eux aussi tout nus mélangés aux femmes. Tous marchaient à pied poussés par les lances de ces canailles et très peu d'enfants étaient à cheval. Les jeunes mères qui portaient les enfants de moins de six ou sept ans marchaient à pied sans être attachées. Mais les jeunes, âgés de sept ou de huit ans étaient attachés, garçons et filles, en groupe de quatre, de six, de dix pour qu'ils ne s'enfuient pas. D'autres étaient attachés par le cou à une corde qui constituait le bout d'une autre longue corde tirée par une canaille. D'autres étaient liés séparément chacun par une corde à une poutre qui s'appuyait et pesait lourdement sur leurs épaules, et qu'ils portaient péniblement.


[3420]
D'autres avaient les mains liées derrière le dos, d'autres avaient les pieds enchaînés, d'autres étaient attachés à la sceva, une poutre longue de trois ou quatre mètres se terminant par deux bouts de bois (fixés avec des boulons en bois ou en fer), qui enfermaient le cou de l'esclave, et que ce dernier traînait derrière lui. Ainsi, ces esclaves voyageaient toute la nuit et une partie du jour.

La vue des cadavres que j'ai trouvés sur la route indiquait que certains qui n'ont pu supporter toute cette fatigue ont succombé.


[3421]
Ce tableau ne donne qu'une petite idée de la réalité des horreurs de l'esclavage et de la traite des Noirs qui actuellement a lieu dans ce Vicariat.

Je ne rajoute plus d'autres éléments, je dirai seulement que j'ai confiance dans la protection du Sacré-Cœur de Jésus qui consolidera l'œuvre sainte, humanitaire, très importante de ce Vicariat, et infligera petit à petit un coup terrible, sinon mortel, à la traite des Noirs et à l'Islam au Soudan. Je l'espère du Sacré-Cœur.

J'embrasse votre Pourpre Sacrée.



Votre humble et dévoué fils

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique






525
Jean François des Garets
0
El-Obeid
24. 9.1873
N° 525 (495) - A M. JEAN FRANCOIS DES GARETS

APFL, Afrique Centrale, 11



Vive Jésus, Marie et Joseph !

El-Obeïd, capitale du Cordofan,

le 24 septembre 1873

Monsieur le Président,



[3422]
Le cœur plein d'émotion et de reconnaissance, je viens de recevoir votre vénérable lettre du 12 juillet, par laquelle j'apprends que l'Œuvre de la Propagation de la Foi a accordé à mon Vicariat le chèque de 49.991 francs. Si ma plume ne peut exprimer tout ce que nous ressentons, mes chers Missionnaires et moi-même, envers vous, M. le Président, et envers tous les membres des Conseils Centraux qui ont voté pour une aide aussi considérable en faveur de cette immense Mission, je peux vous assurer que notre cœur se penche constamment de ces brûlantes régions devant Dieu, pour implorer sans cesse les bénédictions célestes sur les deux vénérables Présidents, sur les membres des Conseils et sur tous les Associés de la Propagation de la Foi du monde entier.


[3423]
Vous pouvez imaginer l'immense fruit que votre grande charité a déjà produit puisque le Vicariat, le plus grand de tout l'univers, est ressuscité et qu'il fait fonctionner, fait travailler, fait fleurir la Mission la plus peuplée, la plus laborieuse, la plus difficile et la plus redoutable du monde entier.


[3424]
Je m'empresse de vous préparer le Rapport annuel de ce Vicariat, mais il est impossible qu'il vous arrive pour le 1er décembre, même si la voie ferrée d'Egypte arrive actuellement près de Siout dans la Haute-Egypte. Je ne pourrai pas vous faire un rapport complet parce que je n'ai pas encore terminé la visite pastorale. Je dois visiter la partie orientale de la Nubie, qui s'étend jusqu'à Souakin sur la Mer Rouge, qui est sous ma juridiction et éloignée de plus d'un mois de voyage de ma résidence principale de Khartoum. Je dois visiter les Bari qui habitent le 4ème degré de Latitude Nord près des Sources du Nil, et qui se trouvent distants de plus d'un mois de voyage de Khartoum.

Toutefois, je suis certain que même du petit Rapport que vous recevrez, vous pourrez comprendre l'immense fruit, que cette admirable Œuvre, que vous présidez avec honneur, a produit en consolidant et en perpétuant la Mission de l'Afrique Centrale qui constitue la dixième partie du genre humain tout entier.


[3425]
A présent tous mes efforts sont consacrés à bien établir et consolider les deux principales Missions du Vicariat, c'est à dire celle de Khartoum qui est la base d'opérations pour porter l'étendard de la Croix vers la partie orientale du Vicariat qui s'étend du Tropique du Cancer à Scellal, jusqu'au 12ème degré de Latitude Sud et borde la Mer Rouge, l'Abyssinie, le Vicariat des Gallas et la Préfecture de Zanzibar. La mission d'El-Obeïd, vraie porte de la Nigrizia Intérieure, est la base d'opérations pour étendre la Foi catholique dans la partie centrale du Vicariat.

En effet, de cette capitale et en 4 jours on peut arriver au royaume du Darfour et, en 14 jours, à la résidence du Sultan. A trois jours d'ici, on entre dans les vastes tribus des Nouba qui sont tous païens. En un mois de voyage à partir d'ici on arrive dans le grand empire du Bornù où se trouve le grand lac Tchad, etc.…


[3426]
Je suis convaincu que c'est Dieu Lui-même qui nous a inspirés d'établir une Mission au Cordofan. Lorsque mes explorateurs, l'année dernière, sont arrivés à El-Obeïd, il n'y avait ni Croix, ni aucun signe du christianisme. L'Evangile, depuis Jésus-Christ n'avait jamais pénétré au Cordofan. Jamais une Messe n'y avait été célébrée. Aujourd'hui il y a une florissante Mission, et en plus cette ville d'El-Obeïd, composée de plus de 100.000 habitants, est le centre et la base d'opérations de toutes les Missions que Dieu nous accordera de fonder dans l'Afrique Intérieure. Voilà ce que la Propagation de la Foi a produit.


[3427]
J'ai effectué le 14 septembre la solennelle Consécration du Vicariat au Sacré-Cœur de Jésus, à la grande satisfaction de notre Pape Pie IX qui nous a accordé par Rescrit une indulgence papale.


[3428]
Lorsque je rentrerai à Khartoum, au mois de novembre prochain, je vous écrirai à propos de l'horrible traite des Noirs et du commerce des esclaves.

Les journaux ont beaucoup parlé de la suppression de l'esclavage réalisée par Sir Samuel Baker, etc. ... de la conquête de tous les pays du Fleuve Blanc jusqu'à l'Equateur par l'armée du Khédive, ainsi que de la libération des routes des Sources du Nil à Zanzibar. Ceci est complètement faux. Il n'y a aucune vérité dans tout ceci. La prédication de l'Evangile et la fondation des Missions catholiques sont ce qui pourra supprimer la traite des Noirs.


[3429]
Permettez-moi, Monsieur le Président, de vous remercier encore pour l'immense charité que vous avez eue pour ce Vicariat et pour moi, à Lyon, la dernière fois où j'ai eu l'honneur de vous revoir.

Nos travaux, nos fatigues, nos souffrances, le climat terrible, nos privations, tout cela est très doux pour nous puisque nous savons que la Propagation de la Foi, par ses dons, peut les rendre efficaces et féconds pour l'apostolat en Afrique Centrale. Veuillez daigner présenter mes hommages à tous les membres du Conseil, à votre pieuse famille, tandis que moi-même j'ai l'honneur de me signer dans les Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie,



votre dévoué serviteur

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique d'Afrique Centrale



Texte original en français, corrigé.








526
Card. Alessandro Barnabò
0
El-Obeid
12.10.1873
N° 526 (496) - AU CARDINAL ALESSANDRO BARNABO

AP SOCG, v. 1003, ff. 752 - 754



Vive Jésus, Marie et Joseph !

El Obeïd, capitale du Cordofan

le 12 octobre 1873

Eminent et Révérend Prince,



[3430]
J'ai reçu votre aimable lettre du 29 juillet qui m'a apporté une grande consolation, car je relève en celle-ci la claire volonté, les sentiments et les désirs de Votre Eminence Révérendissime concernant ma tâche difficile ; ils seront toujours, avec l'aide du Seigneur, la base de mon action.

Je vous remercie aussi de vos paternelles recommandations, que je reçois de tout cœur comme si elles venaient de Dieu Lui-même, recommandations de procéder avec beaucoup de précautions et de prudence, de ne pas faire de dettes, etc.…


[3431]
Dans ma position difficile et épineuse, la prudence est nécessaire plus qu'autre chose parce que j'ai affaire aux plus fins renards et aux plus rusées canailles du monde.

Si Dieu, comme maintenant, m'assiste pour tenir tête aux Pachas, Gouverneurs et marchands et pour en tirer profit pour la Foi ; si je peux continuer à tenir la Mission à la digne place dans laquelle elle se trouve actuellement, alors peut-être l'Eglise catholique réussira petit à petit à obtenir la réelle abolition de l'infâme traite des Noirs et à faire ce que les grandes puissances d'Europe n'ont pu accomplir avec leurs traités et leur argent.


[3432]
Pour ceci et pour bien d'autres aspects de mon ministère difficile, est nécessaire une grande circonspection. Je ferai tout pour ne pas commettre de fautes trop grandes, et j'espère pouvoir y réussir avec l'assistance des Sacrés- Cœurs de Jésus et de Marie, de la prodigieuse sagesse de la Sacrée-Congrégation de Propaganda Fide. Je n'entreprendrai jamais quelque démarche importante sans consulter cette dernière dont le discernement, la prudence et l'expérience sans pareil, sans parler du souffle de l'Esprit-Saint qui l'anime, dépassent de loin la faible perspicacité de n'importe quel chef de Mission.

Pour ce qui concerne les dettes, depuis quelques années, j'en ai une telle peur et une telle horreur que j'espère ne pas en faire. En effet j'ai tiré une grande leçon du cas de deux personnalités vénérables : l'Abbé Nicola Mazza, mon ancien Supérieur et Monseigneur Brunoni, l'actuel Patriarche d'Antioche, le premier ayant laissé ses successeurs dans l'embarras à cause d'une dette de deux cent mille lires, et le second ayant laissé au Vicariat de Constantinople un héritage peu apprécié de plus d'un million de dettes.


[3433]
Depuis que j'ai commencé l'Œuvre de la Rédemption de la Nigrizia, il y a de cela six ans, au milieu de graves difficultés de tous genres et dans des conditions financières de l'Europe exceptionnellement critiques, grâce au Seigneur et à mon économe Saint Joseph, la Providence m'a remis entre les mains plus de cent mille écus romains.

Je suis en très bons rapports avec toutes les sociétés catholiques et avec les hauts et princiers bienfaiteurs qui continuent à me montrer une efficace bienveillance. Ainsi, après avoir laissé l'Œuvre de Vérone sans un sou de dette mais bien au contraire dotée d'un fonds pour des besoins éventuellement urgents, j'ai libéré aussi mon Vicariat d'Afrique Centrale de toutes les dettes que j'ai trouvées, et sans m'endetter, je l'ai doté d'acquisitions utiles telles que maisons et terrains. Actuellement je me trouve en possession d'un bon fonds de caisse qui me permet de vivre et de mettre sur pied des œuvres selon le saint objectif de l'apostolat qui m'a été confié par le Saint-Siège.

Tout cela, Votre Eminence le constatera dans le rapport de la Mission que je ne tarderai pas à vous expédier de ma résidence principale de Khartoum.


[3434]
Cependant, même avec les bénédictions de Saint Joseph (qui a été, est, et sera toujours le roi des gentilshommes, un maître de maison, un économe plein de sagesse et de bon cœur), ne cessez pas de réveiller de temps en temps mon attention, de me réconforter et de m'éclairer par toutes sortes d'avertissements et d'exhortations, qui sont toujours sages et salutaires, sans faire l'économie de réprimandes, ni de l'argue et increpa de l'Apôtre, ceci étant un moyen de faire moins de sottises et d'avancer correctement selon l'esprit de Dieu.


[3435]
Je vais appuyer tout de suite, ainsi que dans le futur, le mandat de son Excellence Sir Bartle Frères, Ambassadeur d'Angleterre, puisque dans votre lettre, citée ci-dessus, vous m'autorisez à le faire.

Toutefois, étant donné que l'actuelle situation de l'Europe est moins sombre que dans le passé, il me semble utile de continuer à tâter le pouls et de me mettre immédiatement en rapport avec certains hauts fonctionnaires de sentiment catholique que je connais dans les Cabinets de France et de Vienne, pour voir si je peux tirer profit de ces deux puissances catholiques, spécialement la France, en faveur de la réelle abolition de la traite des esclaves.

Je préfère pour le moment, éviter l'intermédiaire des Consuls Généraux d'Egypte, qui sont tous achetés par le Khédive. Je ferai tout ceci après l'avoir soumis au sage jugement de la Sacrée-Congrégation par des lettres que je vous ferai parvenir via mon Vicaire Général Carcereri le mois de mars prochain à Rome.

Celui-ci outre ses propres affaires personnelles avec son Révérend Père Général, sera chargé d'importantes négociations auprès de Votre Eminence Révérendissime au sujet de l'esclavage ainsi que de l'utilité pratique de la difficile et épineuse Mission de mon immense Vicariat.


[3436]
Je vous avais écrit, dans ma lettre N° 7 du 25 juillet passé, comment un des grands chefs des peuples des Nouba, qui habitent le sud-ouest du Cordofan, était venu à El-Obeïd. Il s'était présenté chez moi, avec sa nombreuse suite, le matin du 16 juillet dédié à Notre Dame du Mont-Carmel, lorsque nous sortions de l'heure d'adoration du Saint-Sacrement, adoration que j'ai établie chaque mercredi, pro conversione Nigriziae dans toutes mes maisons d'Egypte et d'Afrique Centrale.

Ce chef était venu pour m'inviter à fonder une église, c'est à dire une Mission parmi son peuple qui est en partie tributaire du Gouvernement égyptien et en partie indépendant. Moi, pour y aller prudemment, après l'avoir bien accueilli avec les siens, je l'ai invité à revenir à El-Obeïd en septembre prochain.

Entre-temps, j'aurai pu recueillir des informations exactes, commencer à apprendre la langue des Nouba et flairer la pensée, les manigances et l'appui du Gouvernement du Cordofan qui, comme déjà le font les Pachas de Khartoum et du Fazogl, a expédié parmi les Teggala et dans les montagnes des Nouba, il y a de cela peu de temps, des Moufti et prêtres musulmans pour y prêcher le Coran.


[3437]
En septembre, le chef des Nouba n'a pas pu venir lui-même à El-Obeïd mais il a envoyé à sa place le Cogiùr des Nouba, c'est à dire le grand chaman, qu'en langue nouba on appelle Oecc, à la fois prêtre-médecin-magicien, qui a plus d'autorité que les chefs. Accompagné de douze ou quinze Nouba, celui-ci est entré dans la Mission le mercredi matin lorsque nous sortions de la chapelle après l'exercice habituel de l'heure d'adoration du Saint-Sacrement pro Conversione Nigritiae, le 24 septembre consacré à Notre Dame de la Pitié.

Après avoir discuté pendant trois heures avec moi, après avoir visité notre chapelle, le magasin des arts et métiers, le matériel de menuiserie, de cordonnerie, de ferronnerie, d'agriculture, de photographie ; après avoir entendu le son de l'accordéon et le jeu de l'harmonium que j'ai moi-même exécuté, après avoir entendu le chant et l'instruction des étudiants, parmi lesquels il y a des Nouba qui ont été récemment arrachés et enlevés de leurs pays, le grand chaman et sa suite sont restés bouche bée et pleins d'admiration.


[3438]
La belle statue de la Vierge Marie, la photographie et l'attitude de nos élèves Nouba l'ont particulièrement touché. Sur ce il m'a prié chaleureusement de fonder une Mission dans ses pays, de ne pas tarder à aller chez eux en me disant que nous serons reçus comme leurs pères et leurs frères.

Il est resté à El-Obeïd pendant cinq jours et chaque jour il passait plusieurs heures chez nous. Le dernier jour il m'a dit candidement : "Bien que, il y a deux mois, le chef et sa suite de retour d'El-Obeïd m'aient raconté des merveilles sur toi et sur ton serràial (établissement), je ne les avais pas crus ; et je dois avouer que je suis venu chez toi plutôt prévenu.


[3439]
Mais maintenant que mes yeux ont vu, que mes oreilles ont entendu, je crois tout et c'est pour cela que je suis le premier à te prier de venir parmi nous pour nous apprendre, à nous et à nos enfants, à prier, parce que nous savons qu'il y a Dieu, que Dieu existe, mais nous ne savons pas le prier car personne ne nous l'a appris."

Je ne veux pas prolonger cet écrit, déjà trop long par les très intéressants sujets échangés lors des entretiens que nous avons eus pendant les cinq jours de présence parmi nous de cet excellent Cogiùr des Nouba. Il a laissé à El-Obeïd certains de ses hommes pour attendre et accompagner les Missionnaires dans son pays.


[3440]
J'ajouterai seulement qu'il me semble, en me basant sur plusieurs indices, que ce soit la volonté de Dieu que nous prenions en sérieuse considération l'apostolat parmi les Nouba, après tant de siècles d'obscurité et de mort.

C'est pour cela qu'en confiant cette affaire au doux Cœur de Jésus, déjà de manière spéciale Seigneur absolu du Vicariat, j'ai décidé d'entreprendre une exploration minutieuse des pays avoisinant les Nouba ; ensuite je soumettrai un compte-rendu exact de ces nouvelles tribus à la Sacrée-Congrégation pour qu'elle décide de notre premier pas en dehors de l'orbite des possessions musulmanes, dans des régions libres et indépendantes, comme l'est la plus grande partie du pays des Nouba.

Ainsi, après avoir tout examiné, j'ai décidé d'appeler tout de suite de Khartoum mon valeureux Vicaire Général, qui se trouve déjà parmi nous à El-Obeïd. Nous sommes en train de préparer cette nouvelle exploration qui sera guidée par le Père Carcereri, accompagné d'un autre Missionnaire et de sept ou huit autres personnes. Le temps de la Rédemption de la Nigrizia me parait arrivé.


[3441]
Je suis plein de croix, mais le remède est caché dans le Sacré-Cœur de Jésus, qui tout en voulant saufs le Pape et l'Eglise, sauvera certainement la malheureuse Nigrizia.

Veuillez, Eminence, bénir celui qui embrasse respectueusement Votre Pourpre Sacrée et a l'honneur d'être



votre humble, respectueux, et obéissant fils,

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique d'Afrique Centrale






527
Card. Alessandro Barnabò
0
El-Obeid
20.10.1873
N° 527 (497) - AU CARDINAL ALESSANDRO BARNABO

AP SOCG, v. 1003, ff. 756-759



Vive Jésus, Marie et Joseph !

N° 11

El-Obeïd, capitale du Cordofan,

le 20 octobre 1873

Eminent et Révérend Prince,



[3442]
La Caravane pour l'exploration est partie d'El-Obeïd le 16 octobre dernier à 3 heures de l'après-midi en direction de la Nubie où vit au Sud-Ouest du Cordofan, un grand peuple noir, en grande partie idolâtre. D'après ce que m'a dit le grand chef et le Cogiour appelé aussi Grand Magicien, il y a dans cette région un climat salubre. Il y a aussi une centaine de montagnes dont une partie appartient au Cordofan et donc à l'Egypte. Presque tous ces peuples sont indépendants et libres. Une immense plaine sépare le Cordofan de l'empire du Darfour, se prolonge au Sud-Est, et sépare aussi le Cordofan de la Nubie. Elle est habitée par les Baggaras Omur, nomades tributaires de l'Egypte. Ce sont des assassins et des voleurs de première classe, ils professent un islamisme froid et exercent (peut-être pour le compte du Gouvernement) le métier de giallaba, c'est-à-dire bourreaux de chair humaine et commerçants d'esclaves.


[3443]
Le Grand chef de ces Baggaras était, il y a 20 jours, ici à El-Obeïd pour parler avec le Pacha, j'ai pu le contacter et me lier d'amitié avec lui. Je l'ai interrogé à propos de la Nubie et je lui ai parlé de mon probable projet de voyage pour visiter ces pays ou bien d'envoyer là-bas des Missionnaires de mon Institut ; il m'a offert alors 200 hommes armés pour m'y accompagner et me conduire lui-même dans ces pays en répondant personnellement de notre sécurité.

Je lui ai offert un sac de vivres, un marteau et des médicaments et je l'ai quitté en lui disant qu'au moment voulu je profiterais de sa bonté. Je me suis bien renseigné auprès de beaucoup de personnes, au sujet du grand chef des Baggaras et des Nubiens, en particulier chez le Sultan Hussein, descendant des Sultans du Cordofan qui détenaient le pouvoir avant que ce Royaume soit occupé par le Gouvernement Egyptien. Il jouit d'ailleurs d'une pension à perpétuité de la part du Gouvernement usurpateur et porte officiellement le titre de Sultan.


[3444]
Ce dernier est un de nos amis et c'est un véritable honnête homme. C'est lui qui nous a donné un terrain non loin de chez nous et que j'ai transformé en cimetière catholique. C'est la personne la mieux informée à propos des tribus des Noirs qui entourent le Cordofan jusqu'à un mois et plus de marche.

Le grand Pacha a été très courtois, et il m'a promis de me donner tout ce que je voudrais, des soldats, des armes, des munitions, des chevaux, des chameaux, etc. Mais l'apôtre du Christ doit marcher autrement, selon les principes de l'Evangile.

Il doit prendre toutes les mesures de prudence suggérées par une sage précaution. En général, c'est la Providence divine qui doit nous guider.


[3445]
Lorsque je lui ai annoncé que presque 200 hommes pouvaient être à sa disposition, mon valeureux Vicaire Général, le Père Carcereri, à qui revenait la responsabilité de l'expédition en Nubie, a fermement refusé. Il voulait aller parmi les Nubiens sine sacco et sine pera, en mettant toute sa confiance en Dieu.

Je l'ai tout de même obligé à partir, assez satisfait et muni :

1°.d'une lettre particulière de recommandation du Pacha au grand Chef des Baggaras dans laquelle Son Excellence lui ordonnait de traiter les Missionnaires comme si c'était lui-même.

2°. d'une lettre de recommandation du Pacha et du Sultan à tous les Chefs des pays où notre caravane devait passer en leur ordonnant de nous offrir le logement, de la nourriture et des provisions, etc.

3°. d'un guide du Gouvernement qui connaît le pays et qui est originaire de la région.

4°. d'un des scribes du Pacha, notre ami, copte schismatique, assez âgé et connu jusqu'à la montagne de Delen où il a eu deux épouses. Il m'a dit qu'il serait capable de donner sa vie pour la religion chrétienne.


[3446]
J'ai refusé les soldats, les chameaux et d'autres dons qui m'étaient offerts par le Pacha, et la caravane est partie après un triduum au Sacré-Cœur de Jésus, Père de la Mission et un autre triduum à Saint Jude Thaddée.

La caravane est dirigée par le Père Carcereri, et composée d'un autre Père, d'un laïc allemand qui en 1858 était avec moi sur le Fleuve Blanc, de serviteurs, et de cinq ou six autres personnes. L'exploration durera 15 jours, et après son retour le Père Carcereri partira pour Rome comme j'ai eu l'occasion de vous l'écrire.

Après avoir pris connaissance du rapport de l'exploration, et après avoir bien réfléchi, je rédigerai un Rapport bref mais bien détaillé sur l'opportunité de l'éventuelle installation d'une nouvelle Mission parmi les Nouba.

Je soumettrai ce Rapport à Votre Eminence et j'exécuterai ce que la Sacrée-Congrégation me dira de faire ; car je suis toujours déterminé à suivre le principe de ne jamais entreprendre une action importante sans d'abord consulter et recevoir les ordres de la Sacrée-Congrégation, députée par Dieu à gouverner et à conduire toutes les Missions du monde.


[3447]
Actuellement mon engagement principal est de bien consolider et de perpétuer les deux importantes Missions de Khartoum et d'El-Obeïd.

Khartoum constitue la base d'opérations pour étendre, petit à petit, notre apostolat jusqu'à la partie Orientale du Vicariat au-delà de l'Equateur et des Sources du Nil.

Là, il y a des centaines de tribus et plusieurs millions d'idolâtres.

El-Obeïd est la base d'opérations pour diffuser graduellement l'Evangile dans la partie Centrale du Vicariat, qui compte de très grandes tribus, des royaumes, et des empires ; et sans aucun doute plus de cinquante millions d'infidèles.


[3448]
Jusqu'à présent, grâce aux Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie, la Mission est bien en place, et moi, j'ai apparemment beaucoup d'influence sur tous les Gouverneurs du Soudan, qui m'ont accordé jusqu'à présent tout ce que j'ai demandé : le service postal gratuit, des terrains, des protections, etc...

Actuellement à El-Obeïd il n'y a pas de Consul, mais j'ai l'intention d'écrire à l'Empereur d'Autriche pour qu'il installe un Consulat au Cordofan. Ce qui serait très utile au cas où dans l'avenir les "Hosanna" du Gouvernement se transforment en "Crucifige ". Puisqu'il s'agit d'une œuvre de Dieu, il nous faut toujours y être prêts.


[3449]
Jusqu'à présent, tous les esclaves dont j'ai demandé la libération, sans exception, ont tous été libérés. Tous ceux qui se sont réfugiés dans la Mission ont obtenu le certificat de liberté et la faculté d'y rester comme je l'avais demandé.

Et pour certaines affaires de son Gouvernement, le Pacha demande mon avis. Mais comme il peut arriver que dans l'avenir il y ait de nouveaux Gouverneurs qui pourraient agir différemment, j'ai pris, dès à présent, mes précautions.

Je tâche d'acquérir auprès des Pachas actuels de grandes faveurs et des concessions afin de pouvoir les faire valoir en tant que droits auprès des futurs gouvernants. En même temps je garde mon esprit prêt à endurer n'importe quelles tempêtes et persécutions, qui d'ailleurs seront inévitables, surtout quand la Mission donnera un coup mortel à l'horrible traite des Noirs. Nous mettons donc notre espoir dans la toute puissance du Sacré-Cœur de Jésus.


[3450]
Actuellement je consacre mes soins à la préparation du matériel et des outils, je prépare les armes et les manœuvres nécessaires pour assaillir, en temps opportun, la formidable forteresse de la Nigrizia ; donc je soigne bien l'installation des Paroisses, des maisons, des écoles et des Instituts, en les dotant de règlements sages et convenables. Je fourbis mes armes afin que chaque maison, et chaque missionnaire soient armés de toutes les connaissances, les qualités et les vertus appropriées pour devenir et demeurer un instrument, un soldat et un ouvrier du Christ.

Je n'oublie pas cependant de bien étudier le peuple, l'âme et la nature des habitants de mon Vicariat, pour choisir ensuite les moyens les plus opportuns pour les gagner à la Foi.


[3451]
Je vous écris tout juste deux mots au sujet des coptes schismatiques qui se trouvent dans mon Vicariat et que je suis en train d'étudier soigneusement pour compléter mes études accomplies il y a quelques temps en Egypte sur l'Eglise Copte hérétique.

Celle-ci, à mon avis, constitue un terrain très important pour l'apostolat en Orient en faveur duquel les mesures adoptées, certainement avec prudence, par le Saint-Siège me semblent assez limitées et faibles.

Les coptes hérétiques, comme vous le savez bien, sont en Egypte entre 250-300.000. En Abyssinie, ils dépassent un ou deux millions. Dans mon Vicariat il y en a quelques milliers avec un siège épiscopal à Khartoum, quelques paroisses à Khartoum, à Dongola, à El-Obeïd, et de petites chapelles à Berber, Taca, Saucent, etc. Or, l'Eglise Copte hérétique ou d'Eutique est limitée aux Sièges suivants, ayant à leur tête ces Pasteurs :


[3452]
1°. Siège Patriarcal d'Alexandrie avec résidence au Caire : le Patriarcat vacat.

2°. Siège Episcopal d'Alexandrie : l'Evêque est un certain Morgos ou Marco.

3°. Siège Episcopal de Jérusalem, l'Evêque Basilius qui réside au Caire, fait partie de la Curie Patriarcale d'Eutique et chaque année à Pâques, il accompagne les pèlerins coptes schismatiques à Jérusalem.

4°. Siège Episcopal du Caire. L'Evêque Botros, ou Pierre, fait partie de la Curie Patriarcale du Caire.

5°. Siège Episcopal de Monutieh proche de Tantah entre le Caire et Alexandrie. L'Evêque est Johannes.

6°. Siège Episcopal de Faium, l'ancienne Arsinoé ou Crocodilopolis. L'Evêque est Isaac.

7°. Siège Episcopal de Minieh, l'ancienne Cynopolis. L'Evêque s'appelle Thomas.


[3453]
8°. Siège Episcopal de Monfallut à côté d'un grand Monastère. L'Evêque est un certain Jussab ou Joseph.

9°. Siège Episcopal de Sanaboh entre Melaui et Siut. L'Evêque est Théophilos.

10°. Siège Episcopal de Siut, l'ancienne Lycopolis capitale de la Haute-Egypte. L'Evêque est Macarius.

11°. Siège Episcopal d'Abutig, ancienne Abutis romaine. L'Evêque est Atanasius.

12°. Siège Episcopal d'Akmim, l'ancienne Panopolis, construite, semble-t-il, par Cham fils de Noé ou selon les érudits par Misraim ou Egypte, fils de Cham. L'Evêque est Jussab ou Joseph. Il a beaucoup de prêtres. A une heure de distance, il y a le village de Hamas, patrie de Monseigneur Bsciai actuel Evêque copte.

13°. Siège Episcopal de Guss ou Coptos, l'ancienne Justinianopolis pas loin de l'ancienne Thèbes. L'Evêque est Abram

14°. Siège Episcopal de Negadeh, ancienne Maximianopolis. L'Evêque n'a pas été nommé depuis plusieurs années. Entre temps, la juridiction est confiée à l'Evêque de Guss.

15°. Siège Episcopal de Gondar en Abyssine. L'Evêque, Atanasius, réside ordinairement à Adua, où réside aussi le Négus (le Roi).

16°. Siège Episcopal d'Esneh, l'ancienne Latopolis. L'Evêque est Mattha ou Mathieu, qui a fixé depuis quelques mois sa résidence à Louxor, l'ancienne Thèbes.

17°. Siège Episcopal de Khartoum en Afrique Centrale, fondé en 1840. Le nouvel Evêque n'a pas encore été nommé, parce qu'à présent il n'y a pas de Patriarche et d'après les Coptes, c'est à lui seul que revient le droit de nommer et de consacrer les Evêques. C'est une raison qui n'a pas de sens, parce que l'Evêque Mathieu a été nommé et consacré en 1873.


[3454]
Dès que j'aurai bien étudié comment convertir les coptes schismatiques de mon Vicariat, ce qui sans aucun doute sera très difficile, vu la grande corruption qui les affecte dans des pays si isolés et si enflammés (je ne m'occuperai de cela que lorsque j'aurai le temps et l'espoir d'en sauver quelques-uns), je vous écrirai immédiatement à ce propos. Pour le moment, je juge opportun de vous informer, mais certainement vous le savez déjà, que le Siège Patriarcal d'Eutique est vacant depuis quatre ans, et peut-être le restera-t-il pour quelques années encore, c'est-à-dire tant que l'actuel Khédive d'Egypte sera en vie ; en effet, ce dernier a absolument interdit d'élire un nouveau Patriarche.


[3455]
La raison en est qu'un haut fonctionnaire du grand Divan du Caire, copte schismatique et ennemi personnel d'un Evêque qui était aspirant au Siège Patriarcal, a dit à la superstitieuse mère du Khédive que Son Altesse, son fils, mourrait sous le gouvernement du nouveau Patriarche fidèle à Eutique. Ainsi, la mère a supplié son fils d'empêcher à tout prix l'élection du nouveau Patriarche ; le Khédive, très dévoué envers sa mère et aussi superstitieux, a exécuté l'ordre à la lettre. Les fidèles d'Eutique, auxquels la grâce et l'inspiration de l'Esprit-Saint font défaut car ils sont hors de la vérité, se sont soumis humblement au décret du Khédive.


[3456]
Or, le Saint-Siège, dans sa sagesse et sa perspicacité extraordinaires ne pourrait-il pas profiter de la longue vacance du Siège Patriarcal d'Eutique pour tenter la conversion de ces nombreux hérétiques ? Ces derniers, à quelques erreurs dogmatiques ainsi qu'à de nombreux vices, concernant particulièrement la concupiscentiam oculorum et carnis, joignent cependant une Foi peu ordinaire et beaucoup de vertus..... Depuis 15 ans, les protestants anglais et américains ont fait des ravages parmi les coptes schismatiques, et ont fait des milliers de disciples (évidemment pas par conviction mais plutôt de façon superficielle).

Aujourd'hui beaucoup d'entre eux, que j'ai vus, parlent l'anglais et fréquentent les écoles américaines et anglicanes au Caire, à Alexandrie, à Tantah, à Fayoum et à Siut, où ils ont réussi à convaincre les Coptes les plus riches et les plus puissants. Et a Fayoum où depuis 23 ans, il y a un hospice catholique, j'ai pu voir avec horreur l'école protestante fréquentée par plus de cent jeunes Coptes schismatiques et catholiques.


[3457]
Il faut remarquer que nos Missionnaires sont pauvres, tandis que les protestants sont très riches. Mais il faut dire qu'il y a aussi de bons sujets parmi les Coptes schismatiques. Ayant connu presque tous leurs Evêques, beaucoup de Prêtres et de nombreux fidèles, j'en suis convaincu. La grâce appartient à Dieu. Peut-être qu'au Saint-Siège les initiatives ne manqueront pas pour commencer une conquête qui sera sans doute féconde de merveilleux fruits dans mon Vicariat, et plus spécialement en Abyssinie où un seul Evêque copte sans compétence doit veiller sur un ou deux millions de fidèles.


[3458]
J'ose vous renouveler la prière que je vous ai faite, par lettre le 15 septembre dernier concernant la Fête du Sacré-Cœur de Jésus et visant à obtenir que le Saint-Père la déclare fête d'obligation de première classe avec octave dans tout mon Vicariat ; car c'est grâce au Cœur de Jésus que j'espère convertir les cent millions d'infidèles qui l'habitent.

Mon prédécesseur, Ignatio Knoblecher, qui avait fait des études approfondies sur le Vicariat, estimait la population à 90 millions de personnes, d'après sa biographie écrite par le savant Mitterrutzner.

En ce temps là, les géographes situaient les prétendues Montagnes de la Lune, au Sud du Vicariat, au 3ème degré de Latitude Nord. Aujourd'hui les géographes les situent à 15 degrés plus au Sud, où il y a des tribus très peuplées d'après Speke et Grant. Nous ne sommes donc pas loin de la vérité si nous disons qu'il y a 100 millions d'infidèles dans le Vicariat.


[3459]
Le Sacré-Cœur de Jésus, qui accorde aujourd'hui ses grâces plus qu'autrefois, son culte étant davantage répandu, les convertira tous.

Je profite de cette occasion pour vous présenter les sentiments de ma plus profonde vénération et pour me déclarer dans les Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie

votre humble, obéissant et dévoué fils

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique.






528
Père Stanislao Carcereri
1
El-Obeid
29.10.1873
N° 528 (498) - AU PERE STANISLAO CARCERERI

ACR, A, c. 19/31



El-Obeïd, le 29 octobre 1873

Attestation en sa faveur.





529
Card. Alessandro Barnabò
0
El-Obeid
4.11.1873
N° 529 (499) - AU CARDINAL ALESSANDRO BARNABO

AP SOCG, v. 1003, ff. 760-761



Vive Jésus, Marie et Joseph !



n° 12

El-Obeïd, capitale du Cordofan,

le 4 Novembre 1873

Eminent et Révérend Prince,



[3460]
L'heure de la Rédemption de la Nigrizia semble avoir sonné et Dieu même, dans sa miséricorde infinie, conduit son Œuvre sur ses chemins.

Les explorateurs que j'ai envoyés en Nubie sous la responsabilité du Père Carcereri ont été accueillis avec beaucoup d'enthousiasme par le grand chef et le sorcier du village, ainsi que par tous les habitants qui leur ont offert tout ce dont ils avaient besoin : des terrains, des maisons, et même la résidence du chef, en les suppliant de rester avec eux pour toujours.

Cette population n'est pas du tout idolâtre. Bien sûr, elle est soumise à beaucoup de superstitions, mais elle n'a jamais voulu se plier à l'Islam. C'est une population très intelligente, docile et capable d'apprécier les avantages du Christianisme. Le Grand chef que j'ai bien connu ici à El-Obeïd est un homme juste et au cœur bon, et nos explorateurs sont du même avis.


[3461]
Le Père Carcereri, après avoir bien étudié ces premiers pays Nubiens, a choisi l'endroit où il serait opportun d'installer la première Mission. Il s'agit de Uaco, que les Bagarras appelle Delen ; c'est un village situé dans une zone très belle et avec un bon climat, à 4 jours seulement d'El-Obeïd. C'est le point, totalement païen d'où nous nous étendrons petit à petit, vers tous les pays de la Nigrizia Centrale. Il y a beaucoup de superstitions, et le diable y reçoit beaucoup d'hommages ; mais la Croix le fera fuir et le Lion de Judas gagnera.

Ces peuples semblent bien disposés à embrasser la Foi.

Le Père Carcereri a promis au grand chef que nous fonderions d'ici peu, une Mission catholique à Delen, et il est rentré sain et sauf avec tous les autres à El-Obeïd. Demain je partirai avec lui pour Khartoum où j'espère arriver après 15 jours de voyage à dos de chameau.

Je vous enverrai de Khartoum un Rapport précis à propos de cette nouvelle expédition en Nubie, qui, à notre avis, ouvre une route certaine et sûre pour annoncer l'Evangile dans les régions qui constituent la partie Centrale du Vicariat.


[3462]
La Mission en Nubie présente des avantages certainement supérieurs aux autres tentatives faites par l'Eglise en Afrique Centrale depuis l'érection du Vicariat jusqu'à nos jours.

En effet les anciennes Missions de Gondocoro, au 4ème degré, et de la Sainte Croix, au 7ème degré de L.N., érigées par mon illustre prédécesseur Knoblecher sur le Fleuve Blanc étaient situées dans des pays totalement païens et plongés dans l'idolâtrie. Ses contrées étaient infestées depuis plusieurs années par des hordes de musulmans et de détestables commerçants européens et orientaux, attirés, à travers la route confortable du Fleuve Blanc, par le commerce de l'ivoire et des esclaves, etc. Ces commerçants, avec leur corruption et au moyen des plus abominables violences et sévices, ont répandu parmi ces peuples la peste de tous les vices. En revanche aucun Européen n'a pu pénétrer parmi les Nouba, ni l'Islam s'y enraciner et aucune maison de commerce n'a pu y être établie. Ces populations sont donc encore, pour ainsi dire, vierges et elles présentent tous les avantages que le Vicariat n'a jamais pu obtenir jusqu'à présent.


[3463]
C'est une nouvelle preuve que le Seigneur a vraiment guidé le Saint-Siège pour qu'il approuve la nouvelle route du Cordofan que nous avions proposée, pour choisir El-Obeïd comme la vraie Porte de la Nigrizia Interne et comme la base d'opérations pour gagner à l'Eglise Catholique le Centre de la Nigrizia.

Ainsi il n'y a pas de doute que la stabilité et la permanence de la Mission sont assurées, non seulement grâce au climat qui dans ces régions est supportable et très salubre, mais aussi grâce au caractère de ces populations païennes qui, d'après de nombreux indices semblent disposées à recevoir la Foi.


[3464]
Que le Cœur de Jésus soit glorifié, car il semble absolument vouloir le salut de ces âmes.

Daignez accepter, Eminence, mes hommages et les sentiments de ma filiale vénération avec lesquels j'ai l'honneur de me déclarer dans les Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie



votre humble et indigne fils

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale.






530
Père Stanislao Carcereri
1
El-Obeid
4.11.1873
N° 530 (498) - AU PERE STANISLAO CARCERERI

APCV, 1458/319



El-Obeïd, le 4 novembre 1873

Attestation en sa faveur.