Comboni, en ce jour

Dans une lettre à Elisabetta Girelli (1870) de Vérone l’on lit:
Nous sommes unis dans le Sacré-Cœur de Jésus sur la terre pour être unis ensuite au Paradis pour toujours. Il faut courir à grands pas sur les chemins de Dieu et de la sainteté, pour ne s'arrêter qu'au Paradis.

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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
1071
Chanoine Cristoforo Milone
0
El-Obeid
17. 05. 1881

N° 1071; (1026) - AU CHANOINE CRISTOFORO MILONE

"La libertà Cattolica" XV (1881), p.509

El-Obeïd, le 17 mai 1881


Bref billet.

1072
Directeur Museo Missioni Catt.
0
El-Obeid
17. 05. 1881

N° 1072; (1027) - AU DIRECTEUR DE LA REVUE "MUSEO DELLE MISSIONI CATTOLICHE"

"Museo delle Missioni Cattoliche", (26/6/1881)

Vive Jésus, Marie et Joseph !

El-Obeïd, le 17 mai 1881



Cher Monsieur le Directeur,

[6734]

Il n'y a pas un mois que je vous ai envoyé de cette capitale un document, c'est-à-dire une lettre de recommandation écrite en ma faveur par un Pacha musulman qui gouverne, au nom du Khédive d'Egypte, un territoire cinq fois plus grand que celui de l'Italie entière, il s'agit de Rauf Pacha, Gouverneur du Soudan. Je vous ai envoyé cette lettre pour faire connaître au monde la protection dont jouit l'Eglise catholique parmi les musulmans, surtout sous le drapeau du Khédive d'Egypte.

Oui, ces gouverneurs reconnaissent que notre Sainte Religion contribue fortement au bien moral et matériel des peuples, et ils sont surtout convaincus que dans ces régions, les établissements de nos Missions catholiques sont le monument le plus splendide de la civilisation européenne en Afrique Centrale.

Je vous envoie maintenant un autre document dans le même but, évidemment pour la gloire de Dieu et de l'Eglise. Il s'agit d'une autre lettre écrite par le même Gouverneur Général et que j'ai reçue hier soir. Vous pouvez la lire ici traduite dans notre langue :

[lettre de Rauf Pacha, voir lettre au Cardinal Giovanni Simeoni du 17/5/1881, N.1069 §§ 6731-6733]


[6735]

Comme il y a beaucoup de voleurs et d'assassins qui hantent le territoire de la Mission que nous avons fondée au Djebel Nouba, suite à la prière de ses chefs et de nos Missionnaires, nous avons invoqué l'aide du Gouvernement pour les faire partir et assurer notre sécurité.

Je pars demain pour aller chez ces tribus avec des Missionnaires et la Supérieure des Sœurs. La traite des esclaves, grâce aux fortes mesures prises par l'actuel Khédive d'Egypte, a reçu un grand coup ; je vous écrirai à ce sujet dans l'avenir, si Dieu me laisse en vie. Priez, etc.



+ Daniel Comboni Evêque

et Vicaire Apostolique d'Afrique Centrale


1073
Père Giuseppe Sembianti
0
El-Obeid
18. 05. 1881

N° 1073; (1028) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/121

N° 21

El-Obeïd, le 18 mai 1881


Mon cher Père,

[6736]

Je vous envoie ouverte la lettre adressée aux sœurs Peccati, et je vous prie d'avoir la patience de la lire et puisque j'ai été très pressé, de voir si j'ai marché droit (je ne dors que très peu à cause de la chaleur...).

Pour le vrai bien de la Nigrizia, et selon les intentions d'un de ses véritables bienfaiteurs, il me semble qu'il faudrait, en trouvant toujours le bon moment, suggérer aux sœurs Peccati, que l'argent qu'on leur donnera en plus dans les cas urgents, il faudra le tenir en compte après la mort de l'une d'entre elles, par exemple en donnant à la survivante non pas les 2.500 lires prévues mais plutôt 2.000 ou 1.800, car en ce cas il n'y a plus qu'une seule et non deux personnes.

Je ne peux pas dire cela, moi-même hic et nunc, après tout ce qui s'est passé, mais vous, vous pouvez le suggérer, quand vous le voudrez, comme celui qui défend jalousement les intérêts de la Nigrizia. Pensez-y.

Je suis encore ici parce que les chameliers ne sont toujours pas arrivés.

Trois de mes chameaux avec lesquels je suis allé chez les Nouba sont morts (105 thalers), et je dois en trouver d'autres. Mes sept chevaliers m'attendent depuis sept jours. Aujourd'hui, j'ai envoyé quelqu'un chez le Pacha pour qu'il oblige les chameliers à venir.


[6737]

Je vous ai envoyé dernièrement la lettre de Marzano qui m'était adressée, et qui contenait la description du magnifique nouveau temple consacré à Notre Dame du Sacré-Cœur, etc. J'avais aussi ajouté un extrait d'une lettre en français que l'Abbé Arthur m'avait écrite à propos de la pratique des Sacrements à Khartoum, et il serait bon de la publier dans les prochaines Annales.

Je vous envoie maintenant une autre magnifique lettre que Rauf Pacha m'a écrite le 10 mai dernier, et qui montre en quelle haute considération est tenue l'Eglise catholique au Soudan, et comment elle est respectée, à la différence des ces canailles des gouvernements de l'Europe particulièrement de la France et de l'Italie.

J'ai envoyé à Lyon le dessin de l'intérieur et de l'extérieur de l'église, réalisé par M. Gavaziano, un Protestant qui est ici chez nous. Peut-être l'Abbé Luigi me remettra-t-il d'ici peu une photo de la façade qu'il a prise ce matin.


[6738]

Pardonnez-moi si je ne réponds pas à vos lettres car aujourd'hui je suis très pris par les nombreuses lettres que je dois écrire aux ministres d'Egypte, et à Rauf Pacha, auquel ce matin j'ai envoyé un télégramme pour qu'il accorde à l'officier qui commande les 100 soldats, un inspecteur européen, un excellent catholique qui est ici, afin que tout soit bien fait et selon les règles...

[Ici manque une partie de la feuille]


[6739]

....... peut-être le veut-il ainsi parce que pour Vérone j'avais chargé Squaranti quand il était avec moi à Khartoum. Mais Squaranti connaissait Vérone mieux que moi et il avait plus de bon sens que l'Abbé Bortolo.

Puis, il me dit qu'il fait un essai pour voir si cela lui convient, pour le reste il veut rester libre de pouvoir rentrer en Europe quand il le veut et de se libérer même de la Mission. Que le Seigneur le bénisse !

Entre temps il m'a demandé de lui envoyer la permission écrite pour le retour (ce que j'ai fait) pour pouvoir rentrer avec Callisto. A vrai dire sa santé n'est pas trop bonne, et s'il avait souffert ce que......[il manque des mots]...... il serait déjà mort.

[Il manque la moitié de la feuille]

Priez pour votre



+ Daniel Comboni






1074
Abbé Francesco Giulianelli
0
El-Obeid
18. 05. 1881

N° 1074; (1029) - A L'ABBE FRANCESCO GIULIANELLI

ACR, A, c. 15/28

El-Obeïd, le 18 mai 1881

Cher Giulianelli,

[6740]

Après les 3.000 francs je n'ai plus reçu un centime. Je vous l'ai écrit et j'y ai joint une lettre pour Holz, pour lui demander 6.000 francs. Je n'ai pas vu un centime, ni de vous, ni de la part de Holz. Je suis vraiment dans l'embarras.

Vous avez mal fait d'écrire à Lyon et à Cologne, pour demander de l'argent.

En dépit de vos sollicitations, ces Sociétés n'ajouteront pas un centime de plus à ce qu'elles ont déjà décidé d'après les Rapports et les demandes du Vicaire Apostolique. Par contre vous auriez dû écrire à vos connaissances qui n'ont pas de contact avec moi. Certainement vous auriez reçu quelques dons, un peu plus que ce que j'aurais pu recevoir.


[6741]

Vous devez toujours m'envoyer les lettres et tout ce que vous recevez de Lyon, de Cologne, de Vienne, des Sociétés, des bienfaiteurs, etc., comme le faisait l'Abbé Bortolo, parce que, bien qu'elles vous soient adressées, selon les dispositions que j'avais données, elles m'appartiennent, et que sur la base de ces lettres je fonde mes demandes annuelles pour obtenir des subsides.

Envoyez-moi donc les lettres que vous avez reçues de Lyon, de Vienne, de Cologne, etc.

Jusqu'à nouvel ordre de ma part, c'est-à-dire tant que vous serez si peu nombreux au Caire, je vous ordonne de ne plus acheter de provisions ordinaires en Europe, comme du fromage, du jambon, du saucisson, etc., sauf les tomates en conserve, ou des macaroni de Naples, pour les envoyer au Soudan.

Sans envoyer quelqu'un pour l'accompagner, vous pouvez expédier à Souakin un tiers du vin acheté, en l'adressant à Monsieur A. Marquet, qui est mon Procureur.


[6742]

Je vous recommande d'économiser le plus d 'argent possible, ne dépensez que le strict nécessaire. Dès que vous recevrez l'argent de Lyon, en juillet, vous enverrez tout de suite 6.000 francs à Vérone au Père Sembianti, vous donnerez 6.000 à Bonavia (si vous pouvez, parce qu'il part en août, sinon plus tard) ; vous ne garderez que 2.000 francs pour les frais du Caire, et vous m'enverrez tout le reste à Khartoum. Vous m'enverrez aussi tout l'argent qui, jusqu'au mois d'août, arrivera de Cologne et de Vienne.

Obéissez aveuglement à tous mes ordres, et ne faites pas comme vous avez fait quand je vous ai ordonné d'envoyer tout l'argent que vous recevez, et quant "aux trois pelés et le tondu" qui sont au Caire, débrouillez-vous.

Maintes fois j'avais écrit à l'Abbé Bonomi et à l'Abbé Fraccaro de se débrouiller quand je leur avais ordonné de ne plus envoyer au Caire de lettres de change à payer ; et ils se sont débrouillés ; ils ont eu confiance en Dieu, et Dieu les a aidés.


[6743]

En vous disant "débrouillez-vous", après avoir avez payé les 18.000 francs et plus pour les nécessités du Caire, je voulais dire : "maintenant que vous avez payé les dettes du Caire, vous pouvez en faire d'autres, et permettre qu'avec tout l'argent que vous m'enverrez je puisse payer mes dettes du Soudan ". N'est-ce pas raisonnable et juste ?

J'ai agi mille fois de cette façon avec les Supérieurs du Soudan où j'ai des dépenses énormes, et ils ont obéi parce qu'ils avaient confiance en Dieu. Je pensais que vous feriez la même chose, et d'autant plus vous qui priez tellement le Seigneur avec vos paroles et vos désirs ardents. Mais je vois que vous avez vraiment peu de confiance en Dieu et que vous n'êtes pas très obéissant. Nos bons missionnaires du Soudan ont davantage de confiance. Mais vous qui êtes un homme faible et sans confiance en Dieu, vous vous êtes plaint, non seulement à moi (au Supérieur parlez donc toujours clairement et sincèrement, dites ce que vous pensez, car il vous aidera et vous dirigera de ses conseils), mais vous vous êtes plaint aussi auprès de mes sujets, comme vous l'avez fait avec l'Abbé Bortolo, et peut-être avec d'autres personnes.

Je ne vous reproche rien, mais je croyais que vous aviez davantage confiance en Dieu, et vous avez fait comme ce boulanger qui avait dit à mon Supérieur de Collège : "Monsieur, pour les choses spirituelles, je crois en Dieu, et pour les choses temporelles, je crois aux napoléons-or". J'ai dit aussi à l'Abbé Arthur, Supérieur de Khartoum, de se débrouiller; il se débrouille, et il ne me demande plus d'argent.


[6744]

Albert Sebastian a déjà quitté le Cordofan pour rentrer en Europe afin de devenir Prêtre. Il voulait être Prêtre à tout prix, alors que pendant tout le voyage pour El-Obeïd, et même ici il s'est montré tellement orgueilleux, entêté et désobéissant, qu'à cause de ces défauts je ne l'ordonnerais pas, même s'il possédait toute la science de Saint Thomas.

Puisque je lui avais dit que pour le moment je ne pouvais pas lui donner de l'argent, parce qu'il n'y n'en avait pas, il est parti, contre ma volonté et en dépit de tout le monde, avec de l'argent qu'il avait trouvé.

Depuis lors, donc, il n'appartient plus à notre Société. Je vous interdis de le recevoir ou de l'héberger dans notre maison et je vous interdis aussi de lui donner de l'argent, pas même un centime, ni pour vivre en Egypte, ni pour aller en Europe ou ailleurs, et cela contrariis quibuscumque non obstantibus.


[6745]

Ayez la bonté de demandez au Supérieur des Jésuites s'il a reçu la lettre de change de Bavière que j'ai endossée pour son Collège.

Je salue et je bénis de tout mon cœur ma cousine Sœur Faustina, je n'ai pas le temps d'écrire, mais elle doit m'écrire souvent. Cette cabocharde , bouche-trou ne m'a pas écrit depuis longtemps. Je bénis les autres Sœurs, le Père Pietri, les Frères, etc. Je vous souhaite une bonne fête pour la Saint Luigi, jour de la fête du Délégué Apostolique.


[6746]

Ayez davantage de Foi en Dieu, et ayez plus de charité envers nous, et envoyez-nous de l'argent. Je vous mets dans le Cœur de Jésus, et je le prie de vous donner la Foi que vous n'avez pas; vous avez plus de qualités extérieures qu'intérieures, mais faites des efforts et priez Jésus, il vous donnera tout.

Envoyez-moi de l'argent. Donnez à l'Abbé Bortolo tout ce qu'il veut et tout ce qu'il désire pour l'Europe. S'il était venu à El-Obeïd, il y aurait perdu sa vie, et j'ai failli la perdre aussi.

La nouvelle église du Cordofan est magnifique. J'ai déjà envoyé une description à Rome, Vérone, Cologne, etc. Que Jésus soit loué.



+ Daniel Evêque

et Vicaire Apostolique


1075
Card. Giovanni Simeoni
0
El-Obeid
20. 05. 1881

N° 1075; (1030) - AU CARDINAL GIOVANNI SIMEONI

AP SC Afr. C. v. 9, ff. 133-138

N° 8

El-Obeïd, le 20 mai 1881

Eminent et Révérend Prince,

[6747]

Dans mon établissement du Caire, mon excellent Missionnaire l'Abbé Giovanni Dichtl a élevé, a donné une éducation religieuse et a enseigné la langue italienne à un jeune garçon noir âgé de 13 ans environ. Avec la permission de Monseigneur Ciurcia, l'approbation et la recommandation du Père Ermenegildo, Père Gardien des Franciscains du Caire, j'ai baptisé ce jeune homme lors de mon passage en Egypte.


[6748]

Puisque j'ai vu qu'il possède un bon esprit, une solide piété et un bon engagement, avec l'avis de mes compagnons, d'un Père Jésuite, et de nombreux autres religieux qui l'ont connu, je m'adresse à votre immense charité et à votre zèle ardent pour vous supplier de faire accepter ce jeune garçon par le Saint-Père dans le Collège Pontifical Urbain de Propaganda Fide pour la prochain année scolaire 1881-1882.


[6749]

Espérant que la charité de Votre Eminence me ferait cette grâce pour le bien de mon Vicariat ardu et laborieux, j'ai permis que ce jeune aille dans mon Institut de Vérone dès le mois de mars afin qu'il soit instruit et convenablement préparé pour entrer dans ce Collège.

Il s'appelle Pietro Fang, et j'espère qu'il correspondra à la grâce de sa vocation, qui l'anime depuis longtemps, il veut devenir Prêtre pour travailler et mourir pour ses frères africains.


[6750]

Les chameaux que nous attendons depuis deux semaines pour aller au Djebel Nouba ne sont pas arrivés parce qu'ils sont épuisés par la soif à cause du manque d'eau qui sévit ici. J'ai déjà écrit au Gouverneur Général pour lui dire qu'il faut prendre des mesures importantes et que cela est certainement possible.

En attendant, je dépense de 15 à 20 écus par jour, et parfois on ne trouve même pas d'eau. Les jeunes pleurent à cause de la soif et demandent à boire.

Comme je suis Evêque et Vicaire Apostolique, on a voulu que j'accepte un peu d'eau pour me laver, mais je dois me servir de la même eau 3 ou 4 fois; ensuite, cette eau est bue par les jeunes Noirs. Les souffrances que nous endurons à cause de la soif, de la chaleur, surtout moi qui suis corpulent et bien en chair, qui ai mon tonneau qui m'alourdit (comme le dirait Monseigneur Vespasiani Evêque de Fabriano et de Matellica, qui avait un gros ventre qu'il appelait tonneau), ces souffrances donc sont impossibles à décrire. En outre, je n'ai jamais faim et je dors très peu.


[6751]

Mais j'ai une grande consolation en voyant tous mes Missionnaires (sauf un, c'est-à-dire Rosignoli de Frascati qui travaille assez bien, ce n'est pas mal, mais il aime avoir son confort, toutefois c'est un bon Prêtre, et il restera dans la Mission tant que ça dure. Actuellement il est au Djebel Nouba; sauf aussi l'Abbé Rolleri, qui est malade, et qui, dès la première fièvre qui l'a frappé à deux jours de Khartoum, voulut y retourner, et au bout de 15 jours, m'a demandé de retourner en Europe pour se soigner), j'ai donc une grande consolation, disais-je, en voyant tous les Missionnaires et toutes les Sœurs toujours joyeux, contents, et toujours davantage prêts à souffrir et à mourir. Ils parlent de la faim, de la soif, des maladies mortelles comme si c'étaient de belles choses.

Je suis convaincu qu'en ce qui concerne l'abnégation et l'esprit de sacrifice, aucune Mission n'a de Missionnaires plus solides que les miens, qu'ils soient séculiers ou réguliers. Pour compter sur un Missionnaire, et dire que l'on peut disposer de lui en Afrique Centrale et Equatoriale, il faut qu'il passe au moins deux ans sur le champ de bataille. S'il lutte durement pendant deux ans, on peut alors compter sur lui. Il ne faut pas trop compter sur les ferveurs manifestées en Europe (et cela est valable pour tous les Instituts). Par exemple, l'Abbé Rolleri est resté 11 ans en Egypte, mais il n'a jamais voulu venir en Afrique Centrale. On est mieux en Egypte qu'en Europe. Mais quand Rolleri a eu ici la première fièvre, un mois et demi après son arrivée, il a demandé à repartir en Europe; il n'est donc pas un bon Missionnaire pour l'Afrique Centrale, car il faut y porter la croix, conditio sine qua non, pour accomplir son propre devoir.


[6752]

Je ne veux dire du mal de personne, et je voudrais que tout le monde fasse plus que moi, beaucoup de bien à l'Afrique, ma bien-aimée ; mais comme homme pratique et expérimenté pour tout ce qui touche à l'Afrique (parce qu'il me semble qu'on m'a accordé une confiance totale, même au-delà de la vérité), avant de donner un avis et un vrai jugement sur les Missions, sur les miracles, et les activités de Monseigneur Lavigerie et de ses Missionnaires d'Alger en Afrique Equatoriale, je me permets de conseiller à Votre Eminence d'y aller très doucement, et avec beaucoup de circonspection comme l'aurait certainement fait notre sage et regretté Père l'Eminent Barnabò avec son regard perçant et son expérience des hommes, du monde et des saintes Missions.

Votre Eminence et les Eminents Cardinaux de la Sacrée Congrégation, animés par la charité apostolique la plus ardente, la plus exquise et la plus authentique, qui caractérise les successeurs des Apôtres et ceux qui siègent auprès du Vicaire du Christ, ont favorisé toutes les requêtes indues et pas assez pondérées de cet Eminent Prélat, dont le jugement, la fermeté et la charité envers ses confrères Evêques Missionnaires ne sont pas à la hauteur de sa dignité. Mais je doute de la réalité des résultats et je soupçonne que les chiffres sont plus modestes.


[6753]

Sincèrement je serai très heureux s'il convertit toute l'Afrique, et je serai content d'être le dernier des serviteurs, mais les nouvelles que je reçois du Nyanza ne sont certainement pas bonnes. Il est vrai que le Père Livinhac, Supérieur du Nyanza Victoria, est un valeureux Missionnaire sur lequel on a compté à juste raison ; et il a bien compris que l'on ne peut pas s'empresser comme on le croyait. On m'a dit que lui et ses compagnons se trouvent dans une mauvaise posture. On m'a dit aussi qu'au bout de deux ans ils vivent encore dans des cabanes, et qu'ils n'ont pas une maison comme celle que j'ai fait construire à Khartoum pour les jeunes Noirs. Ce sont les nouvelles arrivées à Khartoum par le dernier bateau à vapeur de Ladò.

Je prie de tout mon cœur Jésus et Marie pour ces Missionnaires afin qu'ils réussissent.


[6754]

Comme Votre Eminence me l'a ordonné, dès son arrivée à Khartoum, l'Abbé Luigi Bonomi a cessé d'être Vicaire Général, et l'humble Missionnaire en a été très content, personne n'a autant d'abnégation, d'esprit de sacrifice que lui, mais les bonnes manières, en certaines occasions, lui font parfois défaut.

En toute hâte j'embrasse votre Pourpre Sacrée...


Votre humble et dévoué fils

+ Daniel Comboni Evêque

et Vicaire Apostolique


P.-S. Je serais heureux si les nouvelles reçues de Nyanza étaient fausses. Prions et espérons.


1076
Père Giuseppe Sembianti
0
El-Obeid
21. 05. 1881

N° 1076; (1031) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/122


Vive Jésus, Marie et Joseph !

N° 22

El-Obeïd, le 21 mai 1881


Très cher Père

[6755]

J'ai lu avec regret dans votre dernière lettre que vous avez des difficultés pécuniaires, et que vous ne pourrez joindre les deux bouts jusqu'au mois de juillet. L'Abbé Giulianelli est muet comme une carpe, et depuis mon départ du Caire, il ne m'a envoyé que 3.000 francs. A Khartoum et ici je me creuse la tête pour le problème de l'argent, toutefois il n'y a pas un centime de dette ; il faut 10 thalers et plus par jour pour acheter l'eau, et hier, il n'y en avait pas. Saint Joseph doit donc faire son devoir. Je ne demande pas de grâces, mais la justice. Soyez tranquille et content, et ayez confiance en Dieu.

D'autres lettres, qui ne seront pas inutiles, partent aussi avec ce courrier.

Si quelqu'un envoie de l'argent pour qu'il me soit envoyé, il est entendu qu'avec cet argent vous devez aussi penser aux besoins de Vérone et de Sestri. Gardez le reste à ma disposition, et suivez mes ordres.


[6756]

Si l'on a affaire avec Saint Joseph, on a affaire avec un honnête homme, et il est tellement honnête qu'il pense d'abord à l'esprit et à nos âmes, à l'essentiel de l'Œuvre, et ensuite à l'argent. Il a toujours été un homme sérieux, et il doit l'être maintenant pour moi car je suis vraiment dans l'embarras ; mais Joseph m'a plusieurs fois tiré d'embarras, et penseriez-vous qu'il me laisse tomber maintenant ? Bref, souffrons un peu pour l'amour de Jésus, parce que la Croix de Jésus, et même un seul petit morceau de sa Croix, vaut davantage que tous les trésors de l'univers. En attendant, priez, et faites prier.

Je veux écrire à Prague, et après m'être recommandé (parce que charité bien ordonnée commence par soi-même), je veux recommander les Sacramentines de Vérone, et cela par intérêt, car qui sait combien elles prieront pour nous !

Je salue et je bénis tout le monde, l'Abbé Luciano..., et dans le Cœur de Jésus, sum miser


+ Daniel Evêque


1077
Card. Giovanni Simeoni
0
El-Obeid
22. 05. 1881

N° 1077; (1032) - AU CARDINAL GIOVANNI SIMEONI

AP SC Afr. C., 9, ff. 139-144

N° 9

El-Obeïd, le 22 mai 1881



Eminent et Révérend Prince,

[6757]

Finalement, tous les chameaux pour Djebel Nouba, grâce à l'aide du Gouvernement, sont ici dans notre cour, et je pars dans deux heures avec les Missionnaires et les Sœurs pour arriver cinq heures après sous un baobab colossal (adansonia) qui nous protégera toute la nuit.

Dans ma dernière lettre, je vous ai parlé des projets et des Œuvres de Monseigneur Lavigerie, du temps qu'il fallait avant de pouvoir avoir une opinion juste sur la réalité des choses, sur la véritable réussite, etc. ...

J'ai maintenant l'intention de vous parler d'une autre affaire concernant l'autre partie de l'Afrique, c'est-à-dire l'Egypte. Je vous enverrai un Rapport exact, plus tard, après ma visite pastorale, qui offrira évidemment matière à réflexion à la Sacrée Congrégation sur tout ce qui a été fait, sur tout ce qui est encore à faire et encore plus sur l'organisation la plus convenable des Missions africaines surtout en Afrique Centrale.

Je vous parlerai aussi d'un problème très important que ma conscience m'oblige à soumettre à la sagesse de la Sacrée Congrégation. Pour moi, hic et nunc, ce problème me semble un véritable casse-tête.

C'est-à-dire, utrum nec ne expediat, je me demande s'il est providentiel pour les intérêts catholiques dans une partie de l'Afrique Centrale (qui est cinq fois plus vaste que la France) que le gouvernement du Khédive d'Egypte ait conquis une si grande partie de l'Afrique Centrale, et qu'il soit utile qu'il continue, selon le plan déjà établi par Mahhammed Ali, dans la mesure du possible, ses conquêtes à l'intérieur de l'Afrique.

Dans le cas contraire, il faut que je sache à quoi m'en tenir et exercer mon influence, qui n'est pas des moindres, auprès du Divan d'Egypte, du Gouverneur Général du Soudan, ...

Ici il est donc nécessaire que je fasse, un préambule.


[6758]

Quand j'écris, je propose, et j'expose mon avis à Votre Eminence et à la Sacrée Congrégation, je sous-entends que mon avis est très modeste et jamais absolu; donc, quand j'expose humblement et avec soumission mon avis à Votre Eminence ou à la Sacrée Congrégation, si, après avoir réfléchi, vous pensez le contraire de ce que je pense, je suis prêt à revenir en arrière immédiatement, à changer d'avis, et à penser comme Votre Eminence et la Sacrée Congrégation.


[6759]

Par exemple, actuellement, je suis profondément convaincu que c'est une erreur d'avoir accordé à Monseigneu Lavigerie quatre Pro-Vicariats Apostoliques, qu'il ne pourra pas vraiment occuper, pas même au bout de trente ans, même s'il avait quatre fois plus de forces que maintenant, et que c'est une erreur de les lui avoir accordés au détriment de mon Vicariat, en me retirant le principal terrain d'action de mon Institut, le principal objectif des Œuvres et des établissements que j'ai créés avec tant d'efforts et à grands frais et surtout avec l'aide abondante de la grâce de Dieu qui m'a guidé.

Il s'agit des régions situées entre le 9ème degré de Latitude Nord et l'Equateur; or nous connaissons déjà, outre plusieurs dialectes, les deux principales langues de ces régions, la Denka et la Bari (et les Missionnaires français avec tout leur zèle, n'arriveraient pas à accomplir ce travail, même en dix ans).


[6760]

Tout cela a porté aussi préjudice à mes finances et a affecté particulièrement le montant du chèque annuel que me donnait Propaganda Fide. Avoir accordé, disais-je, quatre Vicariats à Monseigneur Lavigerie sans avoir prudemment attendu la réussite réelle des premiers efforts dans les deux premiers Vicariats accordés depuis 1878 a été, à mon humble avis, une véritable bévue de la part de Votre Eminence et de la Sacrée Congrégation.

Cela montre qu'en ce qui concerne l'Afrique Centrale, Propaganda Fide possède toute la sagesse humaine, tout le zèle apostolique et la charité évangélique, tout l'amour de Jésus Christ et des pauvres Africains, elle montre toute sa faveur pour les Œuvres de Dieu, parmi lesquelles je cite spécialement l'Institut bien méritant, fondé par le très zélé et Eminent Archevêque d'Alger pour l'Evangélisation de l'Afrique Equatoriale, toutefois Propaganda Fide montre aussi qu'elle a une connaissance insuffisante du territoire en question.

Il y a eu un peu d'empressement dans la prise de décision, et la Sacrée Congrégation s'est éloignée dans ce cas, sans doute pour de saintes raisons, de la sage pondération, et de la maturité de réflexion qui lui ont toujours été habituelles, parce qu'elle n'a pas recueilli les informations nécessaires pour atteindre ses saints buts, auprès des personnes qui pouvaient les lui donner (je ne parle pas de moi, il y a des gens qui en savent plus que moi).

Elle n'a pas non plus interpellé, comme l'Eglise l'a toujours fait, les chefs des Missions concernées, auxquels on avait l'intention de soustraire une partie des territoires sous leur juridiction (et ici je parle de moi).

Il est bien entendu que cela n'est pas obligatoire pour la Sacrée Congrégation, mais c'est une pratique habituelle fort prudente. Propaganda Fide est toujours absolument libre de donner, de retirer, et de faire tout ce qu'elle veut, sans entendre, ni consulter personne.


[6761]

Or, si Votre Eminence et la Sacrée Congrégation me font comprendre que je me trompe, et que mon opinion n'est pas juste, et que vous et Propaganda Fide vous avez bien agis et avec sagesse à propos des quatre Pro-Vicariats susnommés, je me rétracte immédiatement, et je dirai : asinus ego, et je pense et j'estime que ce que Votre Eminence et la Sacrée Congrégation ont décidé est bien fait, est fort sage et fort prudent.

Mon préambule étant fait, je veux parler d'une autre affaire qui concerne l'Eglise, l'Orient, les Missions Apostoliques, et même en partie mon Œuvre. La voici en quelques mots.


[6762]

Maintenant c'est le moment favorable, préparé par la Providence pour prendre des mesures radicales afin d'améliorer le très important Apostolat catholique en Egypte, et de lui donner un nouveau dynamisme, qui aura des effets splendides, non seulement en Egypte, et sur les descendants de ses anciens habitants qui sont Coptes, mais aussi dans l'empire éthiopien et dans une bonne partie de l'Afrique Centrale.


[6763]

Depuis longtemps, je suis étonné qu'on ait tant tardé pour prendre cette mesure sage et essentielle, longuement réclamée, mais je me suis dit : "il doit y avoir des raisons supérieures à mes idées étroites ; donc, je baisse la tête".

Mais maintenant, après que Votre Eminence ait fait venir, avec beaucoup de sagesse et de perspicacité, les Pères Jésuites au Caire (c'est un grand acte qui fait honneur à la charge de Votre Eminence, beaucoup plus que les quatre...), après avoir pu examiner et voir de mes propres yeux ce que deux Jésuites tout seuls ont pu réaliser, la profonde connaissance qu'ils ont acquise de l'Egypte, la bonne méthode suivie pour convertir une haute personnalité, les idées qu'ils ont, et le personnel actif et fort capable dont ils disposent en Syrie pour l'Egypte, après avoir vu beaucoup d'autres choses, qu'il m'est impossible de citer maintenant..., je me suis dit : "c'est le moment de réaliser le coup d'état décisif, et nécessaire qui apportera beaucoup de bien à l'Egypte, beaucoup de profit à l'Orient, et beaucoup de joie à la Sacrée Congrégation et à notre aimé, zélé, sage et providentiel Saint-Père Léon XIII.

De grands événements se préparent en Orient ; je vois très clairement que la sagesse et la sagacité de notre Souverain Pontife sauront en tirer le plus grand bien pour l'Eglise. L'Egypte est le quartier général de l'apostolat catholique et de la civilisation chrétienne de plus d'un quart de l'Afrique.


[6764]

De plus, je suis fermement convaincu, en tenant compte de tout, qu'avec les seules institutions qui existent déjà actuellement, même sans en créer de nouvelles, mais seulement en développant celles qui existent, à condition qu'elles soient dirigées par un chef rempli de Dieu, de sa sagesse, de son amour, un chef énergique, actif, entreprenant, zélé, et surtout doté de reins solides pour pouvoir supporter tous les coups des adversaires, je suis sûr, disais-je, que l'on peut obtenir avec la grâce divine un bienfait dix fois plus important que celui que l'on obtient actuellement à cause d'un grand obstacle qui entrave l'apostolat, et qui s'oppose directement au développement du ministère apostolique en Egypte.

Et quel est cet obstacle ?


[6765]

C'est le monopole franciscain, qui tient dans ses chaînes l'apostolat catholique de l'Egypte, et qui en empêche substantiellement le développement.

Et quel en est le remède ?....

Le remède devrait être un acte très prudent et fort sage de la Sacrée Congrégation et du Saint-Père, à savoir: de ne plus nommer de Vicaires et de Délégués Apostoliques choisis dans l'Ordre Séraphique, mais de nommer dorénavant à la suprême direction des affaires d'Egypte des Prélats séculiers, pourvus des qualités ci-dessus, lesquels armés de courage et d'énergie, devraient augmenter le nombre des paroisses en Alexandrie et au Caire, fonder des Collèges de Jésuites à Alexandrie, Le Caire et à Siut, établir des résidences et des églises où la Parole de Dieu soit prêchée, augmenter le nombre des écoles, etc. et favoriser cent autres activités qui découleraient de ces œuvres...


[6766]

Il faudrait prendre cette mesure essentielle tout de suite, et cela en peu d'années préparerait le terrain pour une autre décision fort utile du Saint-Siège : rétablir le Patriarcat latin d'Alexandrie, surtout dans le but de l'opposer au misérable Patriarcat copte schismatique (qui aujourd'hui est gouverné par un âne pieux !), ainsi que pour obtenir petit à petit la conversion des coptes schismatiques d'Egypte et d'Ethiopie.


[6767]

Je devrais ici présenter l'une après l'autre les principales raisons pour lesquelles j'expose à Votre Eminence ce coup d'état opportun et nécessaire, je devrais brosser aussi un tableau de l'actuelle situation religieuse en Egypte, et un plan d'action à proposer à la Sacrée Congrégation, ou plutôt à imposer au nouveau successeur de Monseigneur Ciurcia, qui devrait être élu rapidement.

Les chameaux m'attendent, et je dois partir tout de suite pour le Djebel Nouba. Cependant je voudrais quand même ajouter, qu'en ce qui concerne les raisons de cette proposition que je viens de présenter à Votre Eminence, vous saurez les voir et les discerner. Vous connaissez mieux que tous l'état actuel, ou plutôt le tableau de l'actuelle situation religieuse en Egypte, et pour ce qui concerne le plan d'action à imposer au nouvel élu, la Sacrée Congrégation a tout le temps pour l'élaborer, car avant de le mettre à exécution, le nouvel élu devra attendre avec calme et prudence pour flairer, étudier, examiner, pondérer diligemment... tout... les hommes..., les problèmes... et puis il se mettra au travail. Il a besoin d'au moins deux ans... pour renforcer ses épaules et recevoir des coups, ad gloriam Dei

Rappelez-vous, Eminence, le préambule que j'ai fait au début de cette lettre; j'embrasse votre Pourpre Sacrée, et je me déclare



votre indigne et obéissant fils

+ Daniel Comboni Evêque

et Vicaire Apostolique


1078
P. Jules Chevalier
0
Djebel-Nouba
28. 05. 1881

N° 1078; (1033) - AU PERE JULES CHEVALIER

"Annales de N. D. du Sacré-Cœur" (1882), pp. 14-15

Djebel-Nouba, le 28 mai 1881

Mon bien Révérend et très cher Père,

[6768]

J'en viens maintenant à vous parler de Notre Dame du Sacré-Cœur.

Grâce à l'aide toute puissante de cette Souveraine du Sacré-Cœur de Jésus, nous avons réussi, à force de sacrifices, et au milieu des maladies et des peines, à construire à El-Obeïd, ville d'environ cent mille âmes, capitale du Cordofan, l'église de Notre Dame du Sacré-Cœur, Reine de la Nigrizia. Cette église est le plus beau et le plus grand temple qui ait jamais existé en Afrique Centrale.

Cette église est entièrement recouverte de plaques en fer galvanisé, afin de pouvoir résister aux pluies torrentielles de la saison des pluies, et elle a été construite par les mains des Missionnaires, de nos Frères coadjuteurs et de nos Africains, sous la direction de l'un de mes jeunes Missionnaires qui en a été l'architecte.


[6769]

Ce qu'il faut remarquer dans cette œuvre, vraiment miraculeuse, c'est qu'en Afrique Centrale, il n'y a presque pas d'outils, ni d'autres moyens de construction, de sorte qu'il a fallu tout faire avec les mains et les doigts des Missionnaires et des membres de la Mission ; cela a entraîné une fatigue inouïe. Ajoutez à cela la rareté de l'eau que nous étions obligés d'acheter à des prix exorbitants. Il nous a assurément fallu la protection toute spéciale de Notre Dame du Sacré-Cœur pour accomplir cette œuvre en son honneur.


[6770]

Ma joie a été grande, après toutes les peines et les souffrances endurées, quand j'ai pu célébrer les offices de la Semaine Sainte, et célébrer solennellement une Messe Pontificale le jour de Pâques dans notre belle et extraordinaire église de Notre Dame du Sacré-Cœur !

Nous n'avons que la petite statue de la Vierge que vous nous avez donnée à Issoudoun, et qui a été endommagée lors du désastre qui m'est arrivé sur le Nil, quand l'eau a pénétré dans notre barque et a tout abîmé.

C'est pourquoi je vous prie, mon cher Père, d'acheter une grande et solide statue en bois, de la bénir vous-même, et de me l'envoyer.


[6771]

De plus, dans toutes les Missions, le nom de Notre Dame du Sacré-Cœur est sur toutes les lèvres, et cela pour les grandes grâces obtenues suite à son invocation. Ce culte à Notre Dame du Sacré-Cœur est dû au zèle que propage ma Supérieure Provinciale d'Afrique Centrale, Sœur Teresa, à laquelle cette dévotion a été toujours chère depuis qu'elle a eu le bonheur d'apprendre à la connaître à Osimo, en Italie.


[6772]

Une des grâces les plus éclatantes que nous avons reçues est la guérison vraiment miraculeuse de Sœur Victoria, la Supérieure de la maison de Khartoum, qui avait été atteinte à El-Obeïd d'un cancer, dont, d'après l'avis des médecins, elle devait mourir. Après un vœu de la Supérieure provinciale et les prières à Notre Dame du Sacré-Cœur, cette Sœur a pu faire le voyage d'El-Obeïd à Khartoum, voyage extrêmement long et fatigant, et elle est arrivée à Khartoum d'où elle devait partir pour l'Europe. Mais elle y est restée car elle avait recouvré sa santé.

On vous enverra des détails précis sur cette guérison miraculeuse.


[6773]

Il y a un an, une autre Sœur, qui à El-Obeïd était à l'article de la mort, a été guérie elle aussi, après avoir adressé des prières à Notre Dame du Sacré-Cœur, et maintenant elle est en parfaite santé.

Je n'ai plus la force d'écrire. La chaleur, le manque d'appétit et de sommeil, les longs voyages que j'ai faits pendant trois mois, à dos de cheval, de chameau et de dromadaire, tout cela m'a réduit à une extrême faiblesse. Nous avons extrêmement souffert de la soif au Cordofan, et nous dépensons encore pas moins de 40 à 50 francs par jour pour acheter de l'eau, qui est sale et saumâtre. Comme je suis Evêque, on me donne de l'eau pour me laver, la même eau doit me servir pour trois ou quatre fois.


[6774]

Le salon d'où je vous écris cette lettre est une petite hutte en paille dans laquelle il faut que j'ouvre un parapluie pour me protéger de la pluie.

J'ai une malle qui me sert de chaise, et à côté, un petit lit de Missionnaire.

La lumière passe par quelques trous toujours ouverts qui font office de fenêtres.

Eh bien ! nous sommes très heureux, et moi plus que tous les autres...

Ici, j'ai mes Missionnaires et quatre Sœurs de ma Congrégation qui n'ont aucune peur des lions et des hyènes qui nous entourent.


[6775]

Les peuples parmi lesquels nous nous trouvons sont vraiment farouches, mais nous avons confiance, Notre Dame du Sacré-Cœur fera pour eux ce que nous désirons.

C'est de ce pays que j'ai écrit en 1875 ma lettre circulaire sur la consécration du Vicariat de l'Afrique Centrale à Notre Dame du Sacré-Cœur.

Ici, nous avons presque fini de construire une église qui est la merveille de ce pays, et un des autels sera dédié à Notre Dame du Sacré-Cœur.

Adieu, mon très cher Père, je vous bénis, ainsi que toute votre communauté, et je me recommande à vos prières.


+Daniel Comboni

Evêque de Claudiopoli

Vicaire Apostolique d'Afrique Centrale

Texte original français, corrigé.


1079
Père Giuseppe Sembianti
0
Djebel-Nouba
29. 05. 1881

N° 1079; (1034) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/123

N° 24

Delen (Djebel Nouba), le 29 mai 1881

Mon cher Recteur,

[6776]

Hier à midi, avec les Abbés Luigi et Vincenzo, les Sœurs Amalia et Caterina, avec 12 chameaux et d'autres animaux, accompagné de six soldats à cheval avec un Bazi-Buzuk, et montant le cheval de Son Excellence Mahhammed Saïd Pacha Gouverneur du Cordofan, après quatre jours et demi de voyage je suis bien arrivé ici au Djebel Nouba, et nous avons été très bien reçus, bien que nous soyons arrivés à l'improviste.

J'ai accepté cette escorte que le Gouvernement a voulu me fournir pour honorer ma dignité et mon statut, parce que dans cette région il y a beaucoup de voleurs et d'assassins qui tuent à tout moment, On peut même affirmer que ces populations exercent les métiers de voleurs et d'assassins d'hommes, de femmes, de jeunes garçons et de jeunes filles, en commençant par leurs chefs, et par notre Cogiour, prêtre-roi qui envoie ses sujets, et même son fils, pour voler et enlever les gens et en faire des esclaves.

Ainsi, il y a quelques semaines, ce Cogiour a envoyé son fils pour lui procurer des esclaves, mais ce dernier a été pris et capturé, et comme le Cogiour a envoyé de l'argent pour le racheter, les Baggara lui ont volé aussi l'argent.


[6777]

A cause de notre arrivée, la terreur s'est emparée de tous ces assassins. Mais, aidés par la Croix qui a vaincu le monde et les puissances infernales, nous dompterons aussi ces peuples farouches.

L'église construite ici par notre cher Abbé Losi et par l'abbé Léon Henriot, est très solide et belle; c'est une vraie merveille dans ces régions.

Dans quelques jours je partirai pour Golfan avec les Abbés Luigi, Losi, Léon, Vincenzo et quelques laïcs, et je ferai le tour de ces montagnes (accompagné aussi du prêtre-roi le Cogiour Kakoum); nous explorerons tout, surtout Carco (patrie de Bachit Miniscalchi), qui est, avec Golfan, une espèce de quartier général de l'esclavage et nous choisirons l'endroit pour y fonder la Mission Centrale parmi les peuples Nouba. Il faut faire vite, sinon cela ne sera plus possible à cause des pluies.


[6778]

Je bénis tout le monde; saluez la Supérieure et Virginie, priez beaucoup pour nous. Mes hommages à l'Eminent Cardinal, au Père Vignola, à l'Abbé Luciano, au Curé de San Giorgio, et à tous les Pères des Stigmates, à Monseigneur Bacilieri, à Casella, etc.

Votre affectionné dans le Seigneur

+ Daniel Evêque

et Vicaire Apostolique


P.S. Pour ce qui concerne les moyens, ayez confiance en Dieu. Si, avec l'aide de Dieu, nous croyons fermement et avec force au "quaerite regnum Dei..." je suis convaincu que se réalisera aussi le "haec omnia adiicientur vobis".

L'Abbé Rolleri a demandé conseil à l'Abbé Losi pour savoir ce qu'il devait faire, s'il devait rester ou aller en Europe. L'imbécile a...

[il manque la suite de la lettre].


1080
Père Giuseppe Sembianti
0
05.1881

N° 1080; (1035) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 21/1 n.21


Mai 1881

Bref billet.