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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
1011
Mgr. Ignazio Masotti
0
Souakin
10. 01. 1881

N° 1011; (967) - A MONSEIGNEUR. IGNAZIO MASOTTI

AP SC Egypte, n.22, ff.438-439

N° 2

Souakin (sur la Mer Rouge),

le 10 janvier 1881

Excellence,

[6423]

Je viens d'être informé que le Révérend Père Normand, Supérieur de la Mission des Jésuites en Syrie et en Egypte, ira en Europe, et sûrement à Fiesole et à Rome.

S'il va à Rome, permettez-moi de vous dire, qu'il serait vraiment opportun que vous le convoquiez dans votre bureau, ou chez vous. Il faudrait que vous l'interrogiez en tête à tête sur l'état et la condition religieuse de l'Egypte, et que vous lui soumettiez un à un mes points de vue présentés dans ma dernière lettre sur l'Egypte.

Si mes propositions se révélaient inexactes ou complètement fausses, je suis prêt à revenir en arrière, parce que mon avis personnel n'est rien par rapport à celui d'un Jésuite aussi expérimenté, bon et incisif comme le Père Normand, et aussi par rapport à votre avis et à celui de Propaganda Fide.


[6424]

Mais vous verrez que le jugement sera le même. Tout cela pour la plus grande gloire de Dieu et pour le bien de l'Afrique

Je pars aujourd'hui de Souakin avec ma caravane et j'entre dans le désert.

Je me recommande à vos prières et au doux Cœur de Jésus. Je suis heureux de me déclarer



votre très humble et dévoué serviteur

+ Daniel Evêque

et Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale


1012
Son Père
0
Souakin
10. 01. 1881

N° 1012; (968) - A SON PERE

AFP, Novara

Souakin sur la Mer Rouge,

le 10 janvier 1881

Bref billet.

1013
Père Giuseppe Sembianti
0
Khartoum
29. 01. 1881

N° 1013; (969) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/10

Khartoum, le 29 janvier 1881

Fête de Saint François de Sales



Mon cher Recteur,

[6425]

Nous sommes arrivés à Khartoum depuis le Caire en 29 jours. Le bateau à vapeur nous attendait depuis de nombreux jours à Berber; nous avons étonné tout le monde. Jamais un voyage ne s'est aussi bien passé. Tous sains et saufs. Sœur Victoria déborde de joie.

A part l'inconvénient qu'il n'y a pas d'écoles pour jeunes filles, et qu'aucune Sœur ne connaît un mot d'arabe, j'ai trouvé la Mission très bien, il y avait beaucoup d'abnégation, d'esprit de sacrifice et un grand courage.

Je n'ai pas le temps, j'écrirai plus tard. Je salue et bénis les deux Instituts, la Supérieure, et Virginie. J'écrirai à ces dernières plus tard, car je suis submergé de travail.


[6426]

Priez beaucoup et faites prier. Ecrivez-moi directement au Cordofan.

Nous fonderons une Mission magnifique chez les Nouba. Je prends avec moi l'Abbé Bonomi qui, avec l'Abbé Losi, connaît bien les Nouba.

Oh ! Le démon a peur de nous ! L'Afrique Centrale va beaucoup mieux que ce que l'on croyait, et que ce qu'ont dit à Propaganda Fide les Franciscains qui s'opposent au bien qui n'a pas été fait par eux. Je parle des Franciscains d'Egypte qui n'ont jamais vu le Soudan.

Moi, je vais de l'avant, car j'ai confiance en Dieu seul, et en vous, qui me préparez de bons Missionnaires. Mes respects au Cardinal et au Père Vignola...


[6427]

La Foi et Jésus. Le monde dut-il s'écrouler, le Christ triomphera en Afrique Centrale !

Mon ancienne idée de fonder un Institut de Sœurs en Syrie est en train de mûrir. Les Jésuites la trouvent magnifique, et ils m'aideront. Mais, surtout, que les Franciscains ne le sachent pas ! Plus tard ils le sauront. En temps voulu je ferai intervenir le Saint-Père quand je lui écrirai à ce propos. Mais ne seront pas contents les... [il manque la suite].


+ Daniel Evêque


1014
Son Père
0
Khartoum
01. 02. 1881

N° 1014; (970 ) - A SON PERE

ACR, A, c. 14/127

Khartoum, le 1er février 1881


Mon cher Père,

[6428]

Après être partis du Caire, nous sommes arrivés à Khartoum en seulement 29 jours, avec une caravane de 16 membres de nos Instituts. C'est presque un miracle.

Mais après Dieu, je dois remercier le Khédive, ou souverain d'Egypte, qui a donné l'ordre à tous les gouverneurs de la Mer Rouge, de Nubie et de toutes les régions où je passais, de se mettre à mon service. C'est pour cela que j'ai trouvé des chameaux prêts à Souakin, et le bateau à vapeur à Berber qui m'attendait depuis 11 jours, lequel nous a transportés ainsi que plus de 200 caisses en 5 jours seulement à Khartoum sur le Nil, où j'ai trouvé l'Abbé Bonomi et les Sœurs qui nous attendaient impatiemment. L'Abbé est un véritable Missionnaire, et un bon administrateur.


[6429]

Ici, je n'ai pas trouvé un seul centime de dette, mais au Cordofan oui ; mais hier matin, j'ai tout payé avec 2.400 thalers que j'ai déboursés en espèces; ainsi, je n'ai pas un seul centime de dette, ni à ma charge, ni à celle de l'Œuvre, que ce soit en Europe, en Egypte ou en Afrique Centrale.

J'ai ordonné la construction d'une église au Caire. L'église paroissiale d'El-Obeïd est déjà terminée, et c'est la plus belle de toute l'Afrique Centrale; de plus, elle est entièrement payée.

Je me porte très bien, et tous les membres de la Mission vont très bien aussi. Cette lettre est la seule et la première que j'écris depuis mon arrivée à Khartoum.

Je n'ai pas encore écrit une seule lettre pour Vérone. J'ai reçu la vôtre de Limone, et en voici la réponse.


[6430]

Je salue et bénis Teresa, les parents, le Recteur, l'Abbé Luigi, les amis, ceux de Riva. Domenico vous salue.

Il pleurait dans le désert et il disait qu'il n'était pas habitué à tant de souffrances, et que sans boire de vin à midi et le soir, il ne pouvait pas vivre.

Les deux Allemands, l'Abbé Johann et l'Abbé Joseph sont de véritables Missionnaires. L'Abbé Bortolo Rolleri vous salue; je suis content qu'il soit avec moi: il donne un très bon exemple; par ailleurs, je sais aussi vivre avec le... diable! La Mission marchera bien malgré les attaques des ennemis, mais tout doit obéir au Christ.



Votre fils affectionné

+ Daniel Evêque

et Vicaire Apostolique


1015
Père Giuseppe Sembianti
0
Khartoum
05. 02. 1881

N° 1015; (971) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/107

Khartoum, le 5 février 1881

[6431]

Faites envoyer immédiatement par le Curé de Montorio les deux caisses de cire que j'ai achetées...

Ecrivez à la Société Rubattino à Gênes à propos des deux sacs de riz envoyés par le Frère Grigolini pour sa nièce Teresa, et d'un autre sac de riz envoyé à Sestri. Mais je crains qu'il ait mal fait les choses, car je n'ai pas reçu le riz à Souakin, et rien également n'a été reçu à Sestri. Ordonnez-lui que tout me soit envoyé à moi personnellement, car c'est seulement quand les envois sont faits à mon nom qu'on ne paye pas les droits de douane en Egypte et à Souakin.


[6432]

Je suis submergé par les problèmes. Tous s'adressent à l'Evêque, le premier Pasteur, et je ne peux pas me dispenser de répondre, surtout en ce qui concerne le gouvernement des âmes.

Je vous prie, par devoir de conscience, de bien faire étudier l'arabe aux sujets dont la vocation est sûre.

Mon Dieu ! Je suis très gêné de devoir faire un compte-rendu du Vicariat à la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide ! Les âmes sont abandonnées ! les familles catholiques livrées à elles-mêmes, et les misères morales se multiplient! Bref, 3 Sœurs arabes (Virginie, Giuseppina et Germaine) faisaient davantage de travail pour les âmes que les 15 Sœurs que nous avons ici, y compris Victoria et Sœur Grigolini.


[6433]

Hier, un Syrien catholique que personne ne connaissait est mort, juste après qu'on lui eut donné l'absolution. Il avait emprunté à un musulman une esclave, qui a été immédiatement réclamée par son propriétaire; mais comme elle était enceinte de 7 mois de ce catholique, j'ai refusé de la céder au musulman, pour l'âme du futur enfant. Nous avons un procès, mais je suis en train de le gagner.

Si Sœur Germana et Sœur Virginie avaient été là, ce Syrien aurait eu une femme chrétienne.

Le courrier vient d'arriver, et je reçois votre chère lettre; je vous répondrai rapidement.


Votre affectionné

+ Daniel


1016
Giovanni Pagnone
0
Khartoum
05. 02. 1881

N° 1016; (972) - A GIOVANNI PAGNONE

ACR, A, c. 15/171

Khartoum, le 5 février 1881

Déclaration de démission.

1017
Registre des mariages
0
Khartoum
06. 02. 1881

N° 1017; (973) - DU REGISTRE DES MARIAGES DE KHARTOUM

ACR, A, c. 10/1 i

Khartoum, le 6 février 1881

1018
Card. Giovanni Simeoni
0
Khartoum
08. 02. 1881

N° 1018; (974) - AU CARDINAL GIOVANNI SIMEONI

AP SC, Afr. C., v. 9, ff. 113-118v

N° 2

Khartoum, le 8 février 1881

Eminent et Révérend Prince,

[6434]

Pour la première fois, la seule jusqu'à aujourd'hui, il est arrivé qu'une caravane importante, composée de 16 Européens dont des Sœurs, des Missionnaires, des catéchistes et des Frères coadjuteurs soit partie du Caire et soit arrivée à Khartoum au bout de 29 jours seulement. Il a toujours fallu plus de deux mois, et parfois même trois ou quatre.

Ceci est tout d'abord dû à la bénédiction de Dieu, puis à l'immense bonté du Khédive d'Egypte, qui a ordonné à tous les Pachas et à tous les Gouverneurs des provinces par où je devais passer, de me prêter la plus grande assistance possible. L'excellent Baron de Schoeffer, ministre résident austro-hongrois en Egypte m'a également beaucoup aidé. A Souakin, au bord de la Mer Rouge, j'ai trouvé à ma disposition les 50 chameaux qui m'étaient nécessaires pour traverser le désert qui sépare la Mer Rouge du Nil.


[6435]

A Berber, le bateau à vapeur qui avait été envoyé par Rauf Pacha Gouverneur Général des possessions égyptiennes au Soudan, m'attendait depuis 11 jours pour me transporter, ainsi que mes compagnons et les provisions jusqu'à Khartoum.

Ensuite, j'ai été courtoisement reçu par tout le monde, et surtout par Rauf Pacha, qui s'est mis à ma disposition pour tout ce que je voulais et il me l'a prouvé de fait. Je parlerai de tout cela dans ma prochaine correspondance ; quand toutes les promesses se seront transformées en actes, et les actes confirmés par la persévérance de la haute protection qu'il nous a accordée.


[6436]

C'est n'est pas le moment de donner à la Sacrée Congrégation des informations détaillées sur mon Vicariat. Je veux tout examiner de mes propres yeux, soigneusement et calmement, et surtout consciencieusement, parce que l'on ne peut pas tromper le Bon Dieu.

Mais d'après ce que j'ai vu de mes yeux jusqu'à présent, et ce que j'ai relevé des dernières nouvelles reçues des Missions de l'intérieur, mon Vicariat marche beaucoup mieux que ce à quoi je m'attendais, et mieux que ce qui a été rapporté à la Sacrée Congrégation et à Votre Eminence par des rapporteurs ignorants et peu charitables.

J'ai remarqué depuis longtemps que mon Vicariat a de nombreux ennemis qui lui ont fait beaucoup de mal ainsi qu'à moi-même, soit en faisant parvenir de fausses informations à Rome, soit en refroidissant un grand nombre de mes bienfaiteurs et en particulier la Propagation de la Foi (qui cependant est très bienveillante envers l'Afrique Centrale, parce qu'elle a l'esprit de Dieu, et possède une grande sagesse et une ardente charité), en leur faisant comprendre à tort que l'Œuvre de Monseigneur Comboni n'a pas beaucoup d'importance, qu'elle ne fait rien, etc...


[6437]

Mais moi, Eminent Prince, je n'ai peur de personne au monde, sauf de moi-même, et je m'examine tous les jours. Je me recommande avec ferveur aux Cœurs de Jésus, de Marie et de Joseph; je connais très bien les ennemis de mon œuvre, et je n'ai pas du tout peur d'eux.

Bien qu'ils m'aient fait, et qu'ils me fassent peut-être encore, beaucoup de mal en Italie, en France et en Allemagne, je ne les crains pas parce que les mensonges et les rapports peu pondérés ont la vie courte, et parce que les Œuvres de Dieu, qui ont pour but la gloire divine et le salut des âmes, doivent passer par le creuset de la Croix, qui est l'unique signe de salut et de victoire.


[6438]

Au bout de 10 ans, la Sacrée Congrégation constatera ce que mon Œuvre a fait en Afrique Centrale, et ce qui a été fait par ceux qui, sans la préparation nécessaire, les études et les entraînements préalables, se sont lancés imprudemment dans des entreprises difficiles, sans avoir auparavant suffisamment étudié le terrain envahi de ronces.

Je serais content de me tromper, mais j'ai bien peur de la véracité de ce que je dis, parce que j'ai fait de sérieuses études et que j'ai de l'expérience en la matière.

Du reste, je présente et je présenterai toujours humblement mes idées uniquement à Propaganda Fide et au Souverain Pontife et à personne d'autre, parce que je n'ai dans le cœur que le bien de l'Eglise et de l'Afrique, pour lesquelles je donnerai cent vies si je les avais.


[6439]

Les rapports et les médisances sur mon œuvre en Egypte m'ont également fait du mal, il s'agit:

1°. De ceux qui font de l'apostolat en Egypte un véritable monopole.

2°. De ceux qui, sans avoir jamais rien fait pour l'Afrique Centrale, même s'ils en avaient la possibilité, parlent mal de mon Vicariat, sans rien savoir.

Celui qui vit en Egypte peut parler de l'Afrique Centrale, comme peut en juger celui qui vit à Paris ou à Vérone.

De toute façon, tout cela a été permis par Dieu que je bénirai toujours.


[6440]

Dans mon Vicariat actuellement tout le monde est en bonne santé, malgré la grande chaleur. En général chez mes Missionnaires et mes Sœurs (élèves de mes Instituts de Vérone) du Vicariat, règne un excellent esprit d'abnégation et de sacrifice.

Je suis arrivé avec ma caravane à Khartoum le 28 janvier dernier; pourquoi donc n'ai-je pas encore écrit un mot à Votre Eminence ?


[6441]

Tout d'abord, j'attendais une réponse à mes demandes faites à Votre Eminence à Rome, et jusqu'à présent, je n'en ai pas.

Ensuite, j'ai voulu bien m'informer ici à Khartoum à propos de deux douloureuses nouvelles qui m'ont été annoncées à mon arrivée. De toute façon, relata refero, sans en prendre la responsabilité. L'une concerne l'Abyssinie, l'autre la Mission de Nyanza Victoria à l'Equateur.


[6442]

Le Consul austro-hongrois M. Hansal (avec lequel je me suis parfaitement entendu au sujet des plaintes à l'égard de l'Abbé Bonomi, un homme un peu dur, mais d'une grande abnégation et d'un grand esprit de sacrifice, et qui vient avec moi chez les Nouba, où il a été le premier Supérieur), les commerçants chrétiens de Khartoum, qui ont des affaires avec le Ghalabat et avec l'Abyssinie, et trois musulmans abyssiniens chassés de là, m'ont assuré que le roi Jean a promulgué une loi (poussé par les prêtres coptes schismatiques et par l'Evêque hérétique) en vertu de laquelle il oblige tous ses sujets à pratiquer sa religion copte hérétique, et tous les autres, catholiques ou mahométans à devenir coptes hérétiques ou émigrer, (le salut de l'Abyssinie et des Galla se trouve en Egypte).

On m'a dit qu'en Abyssinie, il n'y a même pas un Missionnaire Lazariste, et encore moins un Evêque, et qu'ils se sont tous réfugiés à Kheren, c'est-à-dire hors de l'Abyssinie.

On m'a ensuite dit qu'il y a là encore un certain Naretti, d'Aoste, Chevalier de la Couronne d'Italie, qui a eu d'excellentes relations avec le Kassa (roi Jean), et qu'il s'apprête à rentrer en Italie.


[6443]

Dès que je suis arrivé à Khartoum, j'ai trouvé la lettre pas très récente, du Père Livinhac, Supérieur des Missionnaires d'Alger au Nyanza, dans laquelle il me disait que (ce sont ses propres mots) : "Monsieur le Gouverneur des Provinces Equatoriales égyptiennes m'informe du souhait de Votre Excellence d'avoir de nos nouvelles. (En réalité, dans deux lettres, j'avais prié le Gouverneur Général de l'Equateur Emin Bey de Prusse, qui m'avait donné des preuves d'amitié, de protéger les Missionnaires et de leur faire tout le bien possible...).

Je remercie Votre Excellence de l'intérêt que vous daignez avoir pour nous et je m'engage à satisfaire vos désirs.


[6444]

Nous sommes arrivés à Rubaga, etc. Votre Excellence sait par expérience que les débuts des Missions parmi les pauvres Noirs sont vraiment difficiles.

Il est donc inutile de vous parler de nos efforts, de nos privations, et d'autres épreuves qui sont le pain quotidien du Missionnaire, surtout en Afrique.

Que le Bon Maître puisse se laisser toucher par le sacrifice de si nombreux Missionnaires qui travaillent durement sur ce vaste continent, et qu'il fasse resplendir sur eux le jour tant attendu de la miséricorde et du salut...

L'Ouganda n'est pas insalubre. Mes confrères m'ont chargé de vous transmettre leurs hommages, etc.".


[6445]

Cette lettre écrite par ce Supérieur (qui certainement est un Missionnaire de grande valeur et possède un réel esprit de sacrifice) ne dit rien de précis.

Mais le même Gouverneur de l'Equateur m'a écrit de Ladò que les Missionnaires d'Alger en Ouganda, finiront comme ont fini les Anglicans de la Church Missionary Society, c'est-à-dire qu'ils seront contraints d'abandonner le Victoria Nyanza (espérons que non, car Jésus-Christ les a envoyés là-bas pour une raison précise).

Ensuite, le même Gouverneur a écrit au Chevalier Hansal, il y a deux mois, pour lui donner ces nouvelles :

1°. Le roi M'tesa ne cherche que les personnes qui lui font des cadeaux; et comme les Missionnaires d'Alger firent plus de cadeaux que les Anglais, il leur fit bon visage.

2°. Ce roi suspecte les étrangers qui sont en Ouganda d'avoir des rapports avec l'Egypte, un pays qu'il regarde avec beaucoup de méfiance.

3°. Le susnommé Gouverneur Emin Bey (Dr. Schnitzler de Prusse) écrit au Consul austro-hongrois Hansal que les pauvres Missionnaires d'Alger souffrent de la faim, et que les sujets du Roi ne leur donnent ou ne leur vendent rien à manger.


[6446]

4°. Pour finir, comme le roi M'tesa avait entendu dire des Missionnaires protestants que leur Religion est la seule qui soit vraie, et ayant entendu dire également des Missionnaires d'Alger, que la Religion catholique est la seule qui soit vraie, et que la Religion anglicane et protestante est fausse, et comme il ne recevait plus de la part des Missionnaires catholiques de dons importants comme en 1878, il émit un décret dans lequel il ordonne que " personne ne peut changer la religion qu'il a reçue de ses propres parents " (Cependant, il est devenu musulman en 1872 pour plaire au riche et opulent Scheik Khamis Ben Abdullah qui lui avait fait de nombreux cadeaux), et il ordonne également que l'on ne donne plus rien à manger aux Missionnaires français etc."; pour qu'ainsi ils souffrent de la faim et qu'ils soient contraints de rebrousser chemin...


[6447]

Ces nouvelles sont parvenues au Consul austro-hongrois il y a 35 jours, et hier, il m'a dit les avoir communiquées claires et nettes à Son Excellence, le Baron Hofmann, ancien directeur du Ministère des Affaires Etrangères à Vienne et Ministre des Finances... (que l'Eminent Secrétaire d'Etat connaît bien), qui sur place est une puissance..., et, dit le Consul, qu'à cette heure il aura déjà fait publier ces nouvelles dans les journaux ou dans les Bulletins de la Société Géographique de Vienne.

Le même Emin Bey est correspondant de presque toutes les Sociétés Géographiques d'Europe, et surtout de Berlin, etc. Relata refero.

J'ai confiance dans le Cœur de Jésus, qui résoudra tout, car il a palpité aussi pour l'Equateur.


[6448]

Ce mois-ci je resterai à Khartoum, et puis je partirai le mois prochain pour le royaume du Cordofan, où je célébrerai une Messe Pontificale et je consacrerai les Huiles Saintes dans la nouvelle église paroissiale d'El-Obeïd, qui est couverte de tôles en zinc que j'avais envoyées de Milan. C'est l'église la plus grande du Vicariat, de l'Afrique Centrale et Equatoriale.


[6449]

Je reste ferme et inébranlable dans mon principe de faire, puis ensuite de parler : Jésus commence par faire et ensuite enseigner ; (cœpit Jésus facere et docere) et jamais je n'imiterai ceux qui font des projets, qui en parlent beaucoup, et qui en publient dix avant d'en avoir fait trois.

J'ai été frappé de stupeur en lisant le dernier numéro des Missions Catholiques de Lyon, dans lequel on donne une espèce d'Aperçu Général des Missions Catholiques après la providentielle Encyclique du Saint-Père en faveur de la Propagation de la Foi, de la Sainte Enfance...

Dans cet Aperçu, en parlant de l'Afrique, on parle de toutes les Institutions présentes en Afrique, des Jésuites, des Lazaristes, des Pères du Saint Esprit, des Capucins, du Séminaire de Lyon, et surtout des Missionnaires d'Alger, et de leurs grands voyages... mais on ne cite même pas l'Œuvre de la Rédemption de la Nigrizia dans le Vicariat d'Afrique Centrale, où nous avons fait les sacrifices les plus grands, et où nous avons installé des œuvres stables et de grande importance pour la Religion catholique, alors que par rapport à elles, les expéditions de l'Archevêque d'Alger jusqu'à présent ne sont rien.


[6450]

Je connais ceux qui ont essayé de détruire mon Œuvre et les efforts de mes Missionnaires auprès des bienfaiteurs pieux, zélés et vraiment pleins de sagesse. C'est à moi que revient le devoir de conscience de défendre les intérêts de mon Œuvre, qui, jusqu'à présent, marche et progresse beaucoup mieux et beaucoup plus sûrement que celle de Monseigneur Lavigerie.

Le temps, et la prudence du Saint-Siège, c'est-à-dire de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide feront tout mûrir.

J'embrasse...


Votre fils dévoué

+ Daniel Comboni


1019
Prop. de la Foi, Lyon
0
Khartoum
10. 02. 1881

N° 1019; (975) - A LA PROPAGATION DE LA FOI DE LYON

"Les Missions Catholiques " 621 (1881), p.199

Khartoum, le 10 février 1881

[6451]

Lors de mon passage au Caire, j'ai obtenu les faveurs les plus insignes des autorités et notamment de Son Altesse le Khédive.

Muni d'importantes lettres de recommandation, je suis parti de cette splendide capitale avec 15 personnes, et prenant la Mer Rouge, nous nous sommes dirigés par le désert de Bisciarin vers Berber, où nous avons trouvé, à notre grande surprise, un bateau à vapeur que le Khédive avait ordonné de mettre à notre disposition pour nous amener à Khartoum et qui nous attendait depuis 11 jours.

Les fois précédentes, le voyage du Caire à Khartoum durait 2 ou 3 mois, mais cette fois, nous n'avons mis que 29 jours. Le Consul et le Gouverneur du Soudan, Son Excellence Rauf pacha, nous firent l'accueil le plus cordial.


[6452]

Je partirai de Khartoum dans quelques jours avec 28 membres de la Mission pour l'importante station du Djebel Nouba.

Je célébrerai les fêtes de Pâques à El-Obeïd dans la nouvelle église paroissiale qui est le plus grand temple de l'Afrique Centrale et dont la construction a coûté de nombreux efforts au Père Marzano.

On m'a écrit du Cordofan pour me dire que l'on y souffre beaucoup à cause du manque d'eau ; les Missionnaires sont obligés d'en acheter tous les jours pour 3 écus.



+ Daniel Comboni

Texte original français, corrigé.


1020
Père Giuseppe Sembianti
0
Khartoum
12. 02. 1881

N° 1020; (976) - AU PERE GIUSEPPE SEMBIANTI

ACR, A, c. 15/108

N° 4

Khartoum, le 12 février 1881


Mon cher Père,

[6453]

J'ai reçu de nombreuses lettres de votre part, mais j'ai été et je suis encore tellement occupé que je n'ai pas pu écrire. Mirabile dictu ! Le Progrès !

Comme le courrier part avec le bateau à vapeur et par le train jusqu'à Corosco (à la lisière du grand désert de l'Atmur), votre dernière lettre n° 9 du 15 janvier est arrivée de Vérone le 10 février, c'est-à-dire au bout de 26 jours seulement.

Je commence aujourd'hui notre correspondance après avoir remercié chaque jour le Dieu des miséricordes pour avoir obtenu pour l'Afrique Centrale une coopération aussi efficace et immédiate des fils du saint Abbé Gaspare Bertoni.

En général, et dans le Vicariat, les Missionnaires et les Sœurs reconnaissent dans ce fait un amour spécial de Dieu pour l'Afrique, et le principal caractère de stabilité, d'épanouissement et de prospérité de notre ardue et sainte Mission.

Elle a des ennemis puissants, mais en faisant notre devoir, nous serons vainqueurs.


[6454]

Nos ennemis essayent (par amour-propre) de nous détruire en France, en Allemagne, en Orient et à Rome; mais ils n'y réussirons parce que Dieu est avec nous. Devant mon silence, ma patience et ma prudence vigilante (sûr de l'aide de Dieu), ils finiront par s'arrêter. Mais, avec des ennemis j'ai aussi des amis puissants. D'après ce que je peux voir, tout se met bien en place. Ma venue dans le Vicariat et en Egypte (servus semper inutilis sum) était nécessaire.

En ce qui concerne les Sœurs, étant donné que les Sœurs arabes nous font défaut, nous avons régressé, non seulement à cause de ce manque de Sœurs arabes, mais aussi par le manque de compétence. Les Sœurs de Saint Joseph étaient plus expérimentées que les nôtres, soit dans les maisons de la Mission soit, à l'extérieur.


[6455]

Il faudrait qu'au moins la Supérieure, ou une des Sœurs de chaque maison connaisse le français et encore plus l'arabe. Dans ce domaine nous avons vraiment du retard (il faut fonder des maisons de Sœurs en Syrie et en France, et nous le ferons si Dieu le veut, parce qu'en Egypte et ici, nous ne sommes ni à Vérone, ni à Trente, ni à Milan, mais dans un monde cosmopolite).

Mais je ne perds pas courage. Par exemple, ici à Khartoum, dans les familles orientales, de Syrie et d'Egypte, la Sœur jouait un grand rôle, elle connaissait tous les problèmes de la famille, les arrangeait, surtout s'il s'agissait de questions de femmes, elle attirait les fillettes à l'école. Mais maintenant, ni Sœur Victoria, ni les autres ne connaissent les familles, et elles en ignorent tous les problèmes...

J'ai dû et je dois encore rendre visite à toutes et je dois remédier à tous les problèmes...


[6456]

Quant à la paix, l'obéissance et l'humilité, ici tout va beaucoup mieux qu'auparavant, c'est-à-dire que nous nous entendons mieux avec nos Sœurs de Vérone qu'avec celles de Saint Joseph.

Courage donc ! et allons de l'avant, et le moment viendra pour nos Sœurs d'être aussi expérimentées que les Françaises. Mais pour l'amour de Dieu ! admettez dans l'Institut peu de servantes, et davantage de femmes instruites (peu importe si elles ont plus de 26 ans), mais, comme vous me disiez dans votre dernière lettre, que ce soient des femmes sérieuses, bonnes, réfléchies... bref, de véritables femmes!

Puisque l'Abbé Giulianelli ne lit jamais les journaux, ni la Civiltà Cattolica, ni l'Unità Cattolica, car il dit que ce ne sont pas des lectures spirituelles (?!), vous pouvez m'envoyer directement à El-Obeïd (Cordofan) l'Unità Cattolica, mais aussi les autres journaux qui sont envoyés habituellement au Caire. Informez aussi l'Abbé Bussinello à ce propos pour le journal Verona Fidelis.


[6457]

Suite à l'Encyclique du Saint-Père (vous avez très bien fait de la publier dans nos Annales-23), suppliez, in visceribus Christi, notre Eminent Cardinal Evêque d'écrire une belle lettre circulaire pour les habitants de Vérone sur la Propagation de la Foi (qui nous a donné des milliers de napoléons-or), sur la Sainte Enfance et sur l'Œuvre des Ecoles d'Orient (qui, à vrai dire, nous donnent peu).

Il y a plus de 14 ans, j'ai supplié Son Eminence... mais maintenant qu'il y a l'appel du Pape, après avoir été aussi supplié par Lyon, je crois qu'il le fera.

Il faut avoir confiance en Dieu; ses fidèles, même pauvres, seront bénis, s'ils donnent des aumônes pour la Propagation de la Foi. Dites-lui cela aussi en mon nom.


[6458]

J'approuve entièrement votre projet pour la petite Elvira, consistant à réclamer la dot auprès de cette femme qui est à la fois sa mère et sa tante...

Sœur Amalia et Sœur Francesca me disent qu'elle sait très bien s'occuper du linge et coudre, mais elle est petite et faible, mais transeat, faites ce qui vous semble bon.


[6459]

L'Abbé Luigi Bonomi est vraiment un honnête homme. Il est grossier et rustre quand il traite avec les gens de l'extérieur et de l'intérieur, mais il a un esprit d'abnégation digne d'un trappiste, et c'est un véritable Missionnaire, sans orgueil, ni prétention, et il obéit à tout le monde. C'est lui qui fait tout ici, l'instruction catéchistique pour les garçons et les filles, la catéchèse dominicale, les prières (toujours en arabe) à l'église matin et soir, etc.


[6460]

J'ai interrogé un par un les Missionnaires et les Sœurs pour savoir qui j'aurais pu choisir comme Vicaire Général en mon absence; tout le monde m'a répondu que l'unique et le plus capable de tous était l'Abbé Luigi Bonomi qui ne voulait pas accepter. Et si aujourd'hui je devais nommer un Vicaire Général, l'unique personne, et la plus capable serait l'Abbé Bonomi. Il paraît que l'Abbé Rolleri aussi a changé d'opinion parce je vois qu'il le traite avec beaucoup d'égard. Et pourtant, l'Abbé Luigi Bonomi a toujours mis, après moi, l'Abbé Bortolo Rolleri à la première place à table et à chaque endroits.

Mais à Vérone, et surtout chez certains saints un peu f.... on juge l'Abbé Luigi Bonomi (bien qu'il ait été un Curé très laborieux) comme il était en 1873, et on ne prête aucune attention à ce qu'il a appris et à l'immense travail qu'il a accompli en 7 ans; comme certains de l'Institut Mazza, qui sont au diocèse, me jugent comme quand j'étais étudiant en théologie, sans tenir compte de tout ce que j'ai pu apprendre pendant les 26 ans de mon sacerdoce et de mon épiscopat.


[6461]

Cependant de Vérone, on a écrit à Propaganda Fide que l'Abbé Bonomi (sans m'interroger alors que je suis le juge le plus compétent, et le plus direct, choisi par Dieu) est incapable d'être Vicaire Général.

La Sacrée Congrégation m'a alors ordonné de choisir un nouveau Vicaire Général (et un certain Abbé Grego m'a été indiqué pour être mon Vicaire Général !!!).

Il est vrai qu'en Afrique Centrale nous sommes tous des ânes, et moi je suis le chef des ânes; mais permettez que moi, le chef des ânes, je ne puisse pas faire mieux que de choisir comme Vicaire Général parmi mes ânes, celui qui est le moins âne des ânes. On n'a pas tenu compte de ce que l'Afrique est la Mission la plus difficile du monde, et que parmi les savants d'Europe et de Vérone, il n'y en a pas eu un seul qui ait voulu venir mourir en Afrique.


[6462]

Mais il est facile de juger et de pontifier, surtout pour les défenseurs de Grieff, mais ces messieurs "je-sais-tout" n'ont pas le courage de venir en Afrique pour mourir pour le Christ.

Ce qui a été dit par le saint... fou, l'Abbé Losi, est vraiment énorme.

Mais je le supporte. J'aimerai avoir une centaine de Missionnaires comme lui !

Sa tête est petite et vide, mais il possède un zèle apostolique, une véritable piété de saint et le sens de l'abnégation comme l'Abbé Bonomi.

Losi a donc écrit depuis le Djebel Nouba le 21 octobre 1880 à l'Eminent Cardinal di Canossa (qui a eu la bonté de m'envoyer sa lettre, et je l'ai ici sur la table), les paroles suivantes :


[6463]

"Quand je suis arrivé du Djebel Nouba au Cordofan pour faire les provisions habituelles, je n'ai pas trouvé d'argent du tout... Les prêtres d'El-Obeïd m'ont confirmé que Monseigneur Comboni depuis trois ans n'a même pas envoyé une piastre. Il y a une dette énorme auprès du Procureur, ils ont du mal a vivre, etc."

Ce mensonge solennel et cette calomnie de l'Abbé Losi ont été démentis par les lettres du même Abbé Losi, écrites à Khartoum à l'Abbé Luigi, dans lesquelles il le remercie de l'argent et des provisions reçues suite à mon ordre...

Je n'ai ensuite rien dit de tout cela à l'Abbé Bortolo, qui, jusqu'à présent, est mon Administrateur (il est habile, consciencieux, mais moins parcimonieux que l'Abbé Bonomi). Je l'ai chargé de vérifier, d'après les registres comptables de Khartoum, du Cordofan et du Djebel Nouba, toutes les dépenses faites par ces Missions du 21 octobre 1877 au 21 octobre 1880 (ce sont les trois années d'activité de l'Abbé Losi) ; pour le moment, rien que pour El-Obeïd et Djebel Nouba, il résulte qu'ont été dépensés plusieurs milliers de thalers.


[6464]

De surcroît, l'Abbé Bortolo a entre ses mains un télégramme du mois de septembre dernier, envoyé par le Supérieur du Cordofan dans lequel il le remercie pour avoir reçu 700 thalers, puis les milliers de thalers que j'ai envoyés au Cordofan...

Quand l'Abbé Bortolo aura entre ses mains toute la comptabilité du Cordofan, il me fera un compte-rendu des sommes que le Cordofan et le Djebel Nouba ont reçues. Et quand le compte-rendu autographe de l'Abbé Bortolo sera entre mes mains, je lui montrerai la lettre autographe de son Abbé Losi (qui voulait que je le choisisse comme Vicaire Général) écrite à notre Evêque et Père ; je verrai alors s'il approuvera le mensonge solennel et la calomnie de l'Abbé Losi qui a écrit à Vérone que Monseigneur Comboni n'a même pas envoyé une piastre à El-Obeïd depuis trois ans !!!!!

Puisque l'Abbé Losi a écrit plusieurs fois contre moi à Rome, il est certain qu'il aura écrit cela aussi, mais peu m'importe.


[6465]

Que Jésus soit béni, ainsi que son Sacré-Cœur, auquel, presque toujours, chaque matin après la Messe j'ai fait la très belle oraison du Gratiarum actio : "J'oublie et je pardonne de tout cœur à tous mes ennemis, desquels je suis indigne. Je pardonne aussi à tous mes calomniateurs, mes détracteurs (même s'ils sont des saints f...), à tous ceux qui me veulent du mal et qui m'en font ".

Après tout cela, même en me soumettant à ses calomnies mensongères et à ses dénigrements, je voudrais avoir cent Abbés Losi dans la Mission, parce qu'il a beaucoup d'autres vertus apostoliques pour notre ardue Mission.


[6466]

Dans sa lettre du 21 octobre 1880 à Son Eminence, l'Abbé Losi dit aussi : "Je sais que Votre Eminence a daigné prendre en considération l'humble prière que je vous ai adressée pour faire assigner à notre pauvre Monseigneur Comboni un Vicaire Général qui s'occuperait ici des intérêts spirituels et matériels de la mission. On dit que Votre Eminence, pour cela, a appelé à Vérone le Révérend Abbé Bortolo Rolleri (très habile surtout pour s'occuper des intérêts spirituels et prêcher en italien et en arabe !!!); si cette supposition est vraie (c'est-à-dire qu'il vienne en Afrique pour être Vicaire Général), en vous remerciant vivement de votre immense charité, je me permets de vous faire part de la satisfaction générale (Elle est forte celle-là!! alors que j'ai, entre mes mains, des lettres qui disent le contraire...... Et vous savez que c'est moi qui ai prié et qui ai fait tout mon possible pour que l'Abbé Losi vienne en Afrique), le Père Rolleri jouissant de la plus grande estime parmi tous les Missionnaires, etc. etc. ..."


[6467]

Je ne commenterai pas ce passage, je ne chercherai pas à savoir ce qu'il y a de vrai dans ces lettres de l'Abbé Losi, qui a écrit également à Propaganda Fide, et aussi des lettres encore pires. Il a écrit de la même façon au Consul austro-hongrois à Khartoum, contre le Supérieur... et c'est pour cela que le Consul a écrit à Vienne et que la plainte est arrivée à Rome à Propaganda Fide par l'intermédiaire de l'ambassade autrichienne, et j'ai beaucoup souffert à cause de cela.

Mais que les gens écrivent ce qu'ils veulent, moi, je défendrai toujours la vérité, l'innocence et la justice.


[6468]

D'après tout cela, vous voyez bien comme est bon notre cher Jésus, qui permet que même ceux que j'aime me fassent souffrir; mais je sauverai l'Abbé Losi au profit de la Mission africaine, et je défendrai l'innocence de l'Abbé Luigi Bonomi, et je le ferai estimer à Rome, selon ses mérites et mon humble avis.

Ah! Si l'Abbé Losi, l'Abbé Luigi et moi-même, nous arrivons à nous trouver ensemble au Paradis (et encore plus s'il y a aussi, comme je l'espère, l'Abbé Bortolo Rolleri qui.........

[il y a quatre lignes effacées, illisibles]

....et relevée), on va vraiment rigoler à propos des intéressantes comédies que nous avons représentées ici sur terre. Oh cher Paradis ! dit toujours Sœur Victoria ! Mais cela suffit parce que je me suis beaucoup trop éloigné du sujet.


[6469]

L'Abbé Grego a écrit avec véhémence contre moi à l'Abbé Luigi, qui m'a lu la lettre, qui dit : "heureusement qu'il n'y a qu'un seul évêque Comboni ! S'il y en avait plus d'un, pauvre monde ! pauvre Eglise!.... il a eu l'impudence, pour se tirer d'embarras, de me dire que je ne suis pas appelé à la Mission, que l'Afrique n'est pas pour moi, etc., etc.".

En tout cas, il n'a pas fait expédier les deux caisses de chandelles, ou bien s'il les a envoyées, elles ne sont pas arrivées, alors qu'à Souakin, j'ai trouvé toutes les caisses envoyées par Giacomo via Gênes. Je vous prie donc de les réclamer au commerçant de Montorio, ou bien à l'Abbé Grego (que vous saluerez de ma part).


[6470]

C'est une grâce de Dieu que Grego soit resté chez lui. Ce coquin a ensuite écrit à l'Abbé Bonomi en le suppliant et en le conjurant de quitter l'Afrique et de rentrer chez lui, de s'échapper des griffes de..., tout le monde le veut, tous ses amis le réclament pour son bien (surtout ceux qui connaissent Monseigneur Comboni). Mais l'Abbé Luigi lui a répondu avec une lettre sur le même ton qui ôtera à Grego le courage de faire d'autres insinuations semblables.


[6471]

Les deux lettres incluses dans une enveloppe et envoyées de Beyrouth à Virginie n'étaient pas d'Alessandro, ni pour elle.

Une était adressée à Giorgio, écrite par son frère Abdallah, et l'autre était pour moi, écrite par le père d'Alessandro, qui me remerciait de ce que j'avais fait pour son fils. Quand j'aurai un peu de temps, je vous traduirai celle adressée à Giorgio. Alessandro m'écrit de Beyrouth pour me remercier... et pour me prier d'être toujours son père, en me disant qu'il fréquentera toujours les églises catholiques.

Il dit que Luigia est fatiguée et ne se sent pas bien chez elle, et qu'elle voudrait retourner au Caire... Je lui écrirai en la consolant et en l'exhortant à aider maintenant sa mère (mais comment peut-on faire quand une personne est d'humeur inégale ?). Elle a été la croix de Virginie, qui a eu une patience héroïque ; Luigia, en dépit de sa tête, a du caractère, et un bon jugement...

Priez le Seigneur, et ne dites rien à Virginie, qui a assez souffert, et même plus que ce qu'elle méritait.


[6472]

Je vous prie de bien vouloir, petit à petit, rédiger les Règles des deux Instituts Africains de Vérone, en les soumettant ensuite au jugement du Père Vignola, et après envoyez-les moi. Je penserai à les faire examiner par les Jésuites et à consulter Rome.

Après, je penserai à tout le reste, mais si vous attendez que nous, en Afrique, y apportions des changements, le jour du Jugement viendra, parce que je n'ai pas le temps de rédiger des Règles. En revanche, en lisant les Règles de Vérone, je vois du premier coup d'œil les modifications à y apporter, attenta experientia africana. Par ailleurs l'essentiel, ou mieux tout, à l'exception de petits détails, doit être ce que l'on pratique à Vérone et en Afrique.

Portez donc la Croix sans hésiter, et rédigez les Règles et les Constitutions.


[6473]

Dans les Règles pour les Sœurs, changez complètement l'organisation (à Vérone, on a établi des Règles pour une maison afin de faire démarrer l'œuvre), et il faudra prévoir une Générale avec deux assistantes, les Provinciales, et les Supérieures des différentes maisons d'Europe, d'Afrique et d'Asie, une Supérieure et une Econome Générale de la Maison Mère, etc.

Après avoir fait l'essentiel et l'avoir soumis au jugement de l'autorité compétente et aussi des Missionnaires, j'espère que ces Règles seront une véritable œuvre de Dieu.

Oh ! comme je serai content que vienne le Stigmatin de Parme qui connaît plusieurs langues. Vous savez que le Supérieur et tous les Stigmatins participent aux mérites des peines... des Missionnaires et des Sœurs d'Afrique.

La Sœur la plus sainte que nous avons est la sacristine de Khartoum, Sœur Maria Giuseppa, c'est une véritable sainte. Le missionnaire le plus vertueux et saint est Francesco Pimazzoni. Dimanche je lui donnerai la tonsure et les quatre Ordres Mineurs. Il étudie le catéchisme romain en latin. L'Abbé Dichtl et l'Abbé Ohrwalder sont et seront deux Missionnaires de premier ordre pour l'abnégation, la vertu, la dévotion, l'oraison, le travail et le sacrifice total de leur vie.


[6474]

Nous sommes en bons termes avec l'Abbé Bortolo Rolleri. Il me semble qu'il est en train de changer, car il paraît qu'il trouve la situation meilleure que ce qu'il imaginait. Je suis son confesseur, et lui le mien.

Au début, il me faisait endosser la responsabilité de péchés que je n'avais pas et que je n'ai pas en toute conscience (que ceci reste entre nous), et il m'en a donné la pénitence que j'ai accomplie, mais ce sont des péchés que je n'ai jamais commis, et que je n'ai jamais songé à commettre; par exemple (un parmi vingt), il dit que j'ai dilapidé de l'argent qui aurait dû être utilisé pour racheter les esclaves noirs (par exemple quelqu'un m'a donné 15 francs pour le rachat d'un Noir, et avec ces 15 francs, je devais absolument le racheter). Un autre péché aurait été de ne jamais faire la méditation. Mais je l'ai rarement négligée dans ma vie passée, et depuis longtemps, je ne l'ai jamais, jamais omise, même pas une fois dans le désert, et pourtant il affirmait le contraire. Il en est de même pour le Bréviaire; or je ne l'ai jamais laissé tombé, jamais, sauf quand j'ai été gravement malade, et que je suis resté 40 jours sans dormir, même pas pendant une heure.

Il semble que maintenant il se soit calmé. Pour le reste, c'est un homme pieux, et un saint Prêtre (bien qu'extrêmement têtu), précis et scrupuleux dans l'accomplissement de ses devoirs de piété, et surtout dans la lecture du Bréviaire (que nous faisons souvent ensemble) et la célébration de la Messe, etc. ... il est pur et se tient éloigné de tout péché, même véniel (mais il est moins pur quand il émet des jugements tordus sur les personnes, il ne croit pas qu'ainsi il commet des péchés, parce que s'il le croyait, il ne le ferait pas, car il a peur de Dieu).


[6475]

Dieu a décidé que Rolleri vienne au Soudan (et notre Eminent Cardinal a le mérite de l'avoir secoué et de l'avoir persuadé de rester avec moi bien qu'il ait cru que j'étais le diable, ad fovendam charitatem, comme disait Saint Ignace, lui rappela le Cardinal), donc étant donné que Dieu a voulu que Rolleri vienne au Soudan, bien qu'il se soit opposé à moi depuis 5 ans, j'ai pensé que le bon Jésus en avait ainsi décidé pour mon avantage spirituel, car Rolleri est austère, têtu, subtil et rude surtout quand il me juge; de plus, en restant avec lui, en le supportant, en le subissant, c'est une occasion pour moi d'être patient, de faire attention à ce que je fais, de corriger mes graves défauts, mes bavardages excessifs et mes péchés.

C'est donc sans doute en suivant l'inspiration de Jésus, qui est tout amour et charité, que j'ai choisi l'inflexible Rolleri comme confesseur, conseiller et ami intime (jusqu'à un certain point) ; ainsi, je serai plus sûr de faire moins de bêtises, pas tellement dans le gouvernement du Vicariat (car sur ce sujet je m'y connais mieux que lui), mais en ce qui concerne la conscience, l'ascétisme et l'âme, ma conduite personnelle et mon comportement vis-à-vis des Missionnaires.


[6476]

A vrai dire, j'en tire un certain profit, et je crois avoir bien fait, même s'il ne ménage aucune de mes faiblesses, même la plus petite, et après avoir confessé mes erreurs et mes défauts, il rajoute ses remarques sur mes erreurs, sur la façon dont je célèbre la Messe, sur le fait de dire les secrètes à haute voix, ou d'aller trop vite après l'élévation, au dernier Evangile, ou pendant la Prière des Heures du jour, ou de commencer le verset d'un psaume avant que les autres aient terminé la récitation du précédent, sur le fait que je parle trop, ou que je me vante trop (bien que je sois convaincu d'être moins qu'un zéro) ; il me reproche d'autres petites choses qui, ensemble, forment un grand sac.

Bref, je suis content d'avoir ici l'Abbé Bortolo, depuis dix jours il continu à me dire qu'il a l'intention de ne retourner ni au Caire, ni en Europe (sauf pour des raisons de santé, ou sur mon ordre).


[6477]

De toute façon, il s'occupe bien et consciencieusement de l'administration, et je peux avoir confiance en lui.

Mais comme il ne connaît aucun de nos catholiques, de nos Noirs et de leurs besoins, je garde toujours quelques thalers pour mes aumônes secrètes, car je connais le pays et le cas où cela est utile pour l'âme de quelqu'un.

L'Abbé Bortolo aime vraiment la Mission; il est aussi utile pour l'administration que pour confesser les Missionnaires, et, si elles le veulent, les Sœurs...

Mais pour l'exercice du ministère externe, pour faire le Curé, ou pour convertir les âmes infidèles ou hérétiques, ou les boucs européens vicieux et mécréants, il ne vaut pas un clou ; il n'a ni doigté, ni bonnes manières.

Je crois donc qu'il est utile à l'intérieur de la Mission pour les raisons que j'ai énoncées, mais jamais pour être Vicaire Général ou Curé d'une paroisse.


[6478]

J'ai trop parlé, ça suffit. Excusez-moi d'être allé en dehors du sujet.

En ce qui concerne la vie spirituelle, les deux Instituts de Khartoum marchent comme n'importe quel Institut bien organisé d'Europe grâce au travail et à la persévérance de l'Abbé Bonomi.

Il y a des oraisons en commun le matin, la Messe commune à 6 heures, des prières après le repas de midi, le chapelet avant le dîner, et des prières avec lectures spirituelles après 9 heures du soir.

Tous les garçons et les filles connaissent bien les prières, et beaucoup d'entre eux et d'entre elles sont capables de remplacer le Missionnaire pour animer la prière.

J'en ai été très content, et je crois que l'Abbé Bortolo l'a été également, de voir que Sœur Victoria était intervenue, bien que ne connaissant pas très bien l'arabe, s'était toutefois fait comprendre. C'est une Sœur pleine de courage et de véritable esprit apostolique ; elle est un peu dure (peut-être a-t-elle pris de l 'Abbé Luigi).

Les filles ne l'aiment pas trop, et elles regrettent Sœur Teresa Grigolini dont elle font l'éloge. (Je ne sais pas ce que sont devenus les deux sacs de riz envoyés par M.Grigolini à Gênes par le Rubattino, et je ne sais rien non plus du sac de riz envoyé à Sestri dont je vous envoie le reçu).


[6479]

Je lui ai dit de mettre la charité au-dessus de tout, car on ne convertit pas les infidèles et les âmes sans la charité, même une Sœur sainte ne le pourrait ; et elle m'a promis de s'amender. Les autres Sœurs sont humbles, obéissantes et travailleuses, mais elles manquent d'instruction. Sœur Victoria est cependant une véritable et parfaite Missionnaire, toujours à son aise et courageuse, possédant un grand esprit de piété. C'est la seule, parmi les anciennes qui sont ici, qui sache se comporter comme il faut dans le monde et avec les gens de l'extérieur, ce qui est nécessaire pour une Missionnaire, autrement, personne ne se convertit.

Mais il sera difficile d'avoir rapidement parmi nos Sœurs, une qui sache traiter avec les autorités, les Pachas et les Consuls comme savaient le faire Sœur Giuseppina Tabraui, Sœur Germana, Sœur Virginie Mansur, qui ont converti de nombreuses âmes et ont maintenu vives la Foi et la piété parmi les Orientaux, qui ne viennent plus à l'église, sauf depuis que j'y suis, mais qui autrefois venaient toujours. Mais j'espère que petit à petit on fera tout avec la grâce de Dieu, et si on fait tout ce que je prescris.


[6480]

Monseigneur Stegagnani (que je vous prie de saluer de ma part, avec Monseigneur le Recteur, l'Abbé Casella etc.) m'a dit plusieurs fois qu'il avait pour moi quelques livres envoyés par les Girelli de Brescia, et qu'il me les apporterait chez moi, mais il ne me les a pas portés, et je ne suis pas allé les prendre non plus. Rendez-moi ce service: allez les prendre, faites-les bien emballer, et envoyez-les moi à la première occasion. Il s'agit de livres qui parlent de Saint Joseph, du Cœur de Jésus etc. qui appartenaient à la pieuse Girelli.

J'ai réglé le problème de la concubine du catholique mort il y a sept jours, avec le gouvernement turc et avec la propriétaire de la concubine qui l'avait louée au susdit catholique d'Alep pour un mégid et demi par mois (6 francs et 37 centimes). Une bonne catholique, Mme Ginevra, m'a dit que la concubine est enceinte de plusieurs mois. Puisque selon les lois turques en vigueur, la pauvre noire enceinte devait retourner chez sa propriétaire musulmane ; pour la sauver ainsi que sa progéniture, j'ai décidé de payer le montant de la location mensuelle, et le gouvernement et la propriétaire en ont été satisfaits.


[6481]

J'ai alors confié la fille à Sœur Victoria. Je l'ai interrogée pendant un quart d'heure, elle était très ravie et contente de rester dans l'Eglise et de devenir chrétienne. Comme il n'y avait pas de Sœurs capables de l'instruire, l'Abbé Luigi et moi-même, nous devons nous en charger.

Hier, j'a fait la connaissance de 29 négociants d'Alep de Syrie, dont 11 ont des concubines. Presque aucun d'eux n'était connu de l'Eglise, sauf certains connus de l'Abbé Luigi; ils étaient peu nombreux à fréquenter l'église avec leur famille.

Priez donc le Seigneur pour je puisse bien instruire nos Sœurs, et leur apprendre à être Missionnaires, comme je l'ai fait avec les Sœurs de Saint Joseph, avec lesquelles tout cela a été plus facile grâce à leur connaissance de l'arabe.

Si l'arabe n'est pas étudié à Vérone, il ne sera plus appris. Nos 15 Sœurs qui sont ici (si on exclut les deux Piémontaises qui l'ont presque oublié), ne l'apprendront plus ; c'est impossible, je parle du fait qu'elles puissent l'apprendre pour pouvoir arriver à instruire une catéchumène. Cela suffit.


[6482]

L'Abbé Bellini Professeur du lycée de Desenzano a rendu les 200 lires d'après la note ci-jointe.

Je vous remets le jugement pour l'admission de Pietro Giuseppe Franceschini de Rome, comme il ressort de la lettre ci-jointe.

L'Abbé Dichtl vous fera parvenir d'ici une semaine le rapport de notre magnifique voyage du Caire à Khartoum. Je vous ferai parvenir d'autres nouvelles pour le N°24 des prochaines Annales.


[6483]

En général, quelle que soit la somme d'argent que vous recevez à Vérone pour mon compte ou pour la Mission, encaissez-la, et ne l'envoyez à personne sans mon ordre, même pas à Giulianelli ; mais avertissez-moi immédiatement par lettre. Tout l'argent de l'Œuvre que ce soit de Vérone ou de l'Afrique est de l'Œuvre, et doit donc être uniquement dépensé en fonction de mes ordres, parce que je suis le seul à connaître tous les besoins, comment et où il doit être dépensé, et parce que je suis le seul responsable.

Comme j'ai l'honneur de vous avoir comme Procureur Général, je souhaite que l'argent soit déposé auprès de vous. Vous avez donc bien fait de conserver les 200 francs de Mme la Comtesse d'Erceville de Paris.

Nous avons du vin grec ; écrivez à la Comtesse que vous avez tout exécuté, et dites-lui que nous en faisons autant, que nous prierons toujours pour elle, pour son mari, pour sa famille, et pour l'Œuvre Apostolique de France dont elle est la Présidente Générale. Je lui écrirai, ainsi qu'à Mme de Villeneuve.

J'ai été dérangé par des visites, et le courrier part maintenant; j'ai écrit de nombreuses lettres. J'écrirai à la Supérieure par le prochain courrier, et je compléterai la réponse à vos lettres dont la dernière est la N° 9.


[6484]

Présentez mes hommages à l'Eminent Evêque, au Père Vignola.

Je bénis les deux Instituts, et je vous recommande Virginie, à laquelle j'attache la plus grande importance pour le bien de la Mission parce que je la connais plus que tout le monde, et je suis le juge le plus compétent pour les véritables intérêts de l'Afrique et de notre difficile apostolat. Elle est arabe, et elle a les défauts des Arabes; mais elle et Sœur Germaine d'Alep (qui est actuellement à Jérusalem) valent davantage que nos quinze Sœurs de Vérone que nous avons au Soudan. Ceci est mon avis, et aussi celui des Missionnaires qui sont ici, et celui du peuple catholique arabe de Khartoum des 5 rites orientaux.

A mon avis, je ne ferais pas attention à certains détails que l'on demande à Virginie. Elle a été une Sœur professe et a travaillé pendant de nombreuses années, et exiger d'elle qu'elle ne parle pas l'arabe avec son frère, etc. ! ! ! Pour moi, ce sont des choses ridicules qui n'ont aucune valeur. Comment ? Ne peut-on pas connaître le caractère, les vertus, la vocation d'une aspirante, sans renoncer à ces détails qui, étant donné les circonstances, pourraient nuire à de nombreuses âmes ?


[6485]

Vous êtes un honnête homme, faites comme bon vous semble, et Virginie sera capable d'endurer même ces épreuves. Mais si vous aviez été Missionnaire en Afrique comme moi je l'ai été, vous ne feriez pas beaucoup attention à cela. Veuillez excuser ma sincérité. Même cela a été permis par Dieu, parce que Dieu est amour, et Dieu transformera tout cela pour le bien des âmes, de Virginie et de la Nigrizia pour laquelle elle a tant travaillé et souffert.


[6486]

Je vous recommande notre excellente Supérieure de Vérone. Je veux que les Supérieures d'Afrique vous tiennent au courant de tout, de la Mission, des Sœurs, et des besoins des Africains. Tout comme je l'ai fait jusqu'à présent, et je le ferai encore plus, j'ai ordonné à tous les Missionnaires de vous écrire, et j'ai même donné à presque chacun d'eux votre photographie en leur ordonnant de prier pour vous, afin que Dieu vous aide pour l'Afrique.

J'espère que vous connaîtrez rapidement l'Afrique Centrale et le caractère de l'Œuvre, qui est la plus importante, et que vous nous formerez des Missionnaires et des Sœurs vraiment saints, et non gens au cou tordu car en Afrique il faut avoir la tète droite, il faudra former des âmes courageuses et généreuses qui sachent souffrir et mourir pour le Christ et pour les Noirs. Vale, In Corde Jesu.


+ Daniel Evêque