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N° Ecrit
Destinataire
Signe (*)
Provenance
Date
681
Comte Teodoro Guarienti
0
Rome
15. 1.1877
N° 681 (647) - AU COMTE TEODORO GUARIENTI

AFG



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 15 janvier 1877



Mon cher Comte Teodoro,



[4435]
Par la grâce de Dieu, de la sainteté de Pie IX, de la profonde et réelle humilité de Monseigneur Canossa, et de son parfait amour pour votre patrie, votre cousin Luigi, continuera à être Evêque de Vérone, et il est définitivement dispensé d'aller se battre avec les Gravoria, les Filoppanti, et les panégyristes de Satan en tant qu'Archevêque de Bologne. C'est une grande grâce pour Vérone et pour l'Afrique. Comme vous voyez, Monseigneur de Canossa mérite un monument et toute la gratitude des habitants de Vérone. Par amour de Vérone, il renonça au premier siège archiépiscopal des Etats Pontificaux après Rome, et à la barrette (j'espère qu'il l'aura quand même d'ici un an).


[4436]
Je vous écris sans rien dire à Monseigneur, pour que, comme vous êtes un homme d'action prudent, vous alliez le recevoir à la gare de Portanuova vendredi prochain, le 4.

Ce serait bien si quelques membres du Chapitre de la Cathédrale, du Séminaire, des Sociétés catholiques... venaient ovationner Monseigneur. Il mérite que les habitants de Vérone lui baisent les pieds. Vous avez compris davantage que ce que j'exprime, c'est-à-dire ma pensée.

Ce soir, nous sommes allés chez le Pape, qui semble un jeune homme de 30 ans.


[4437]
La Congrégation Générale des Rites qui doit déclarer Vénérable la Marquise de Canossa aura lieu le 3 février. Oh! la famille Canossa qui montre maintenant tant de vertus, qui compte un Evêque renonçant au siège archiépiscopale de Bologne et au Cardinalat, et des membres qui présentent des vertus tellement héroïques qui les préparent à être vénérés sur les autels, tout cela est un spectacle émouvant qui mérite la reconnaissance et la vénération des habitants de Vérone.

Ces jours-ci, nous avons rendu visite aux Cardinaux les plus puissants et les plus sages, qui ont admiré la vertu (pas du tout connue, ni reconnue à Vérone par certains) de notre Evêque, dont l'Afrique Centrale est encore débitrice de tant de bienfaits.

Transmettez mes respects à votre fille et au petit marquis, et je me déclare de tout cœur



votre affectionné et reconnaissant

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale






682
Abbé Francesco Bricolo
0
Rome
31. 1.1877
N° 682 (648) - A L'ABBE FRANCESCO BRICOLO

ACR, A, c. 14/31



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 31 janvier 1877

40/a, rue Margana



Mon cher Abbé Francesco,



[4438]
Dans ma lettre du 8 décembre dernier, je crois vous avoir parlé des 5 résolutions prises après un important et sérieux examen des Cardinaux de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide réunis au Vatican le 27 novembre; ces résolutions ont été confirmées après un examen approfondi de Pie IX le 10 décembre, et parmi celles-ci est prévue l'expulsion de la Mission des deux Camilliens Stanislao Carcereri et Giuseppe Franceschini.

Mon triomphe devait être solennel et complet face à mes adversaires si puissants, puisqu'ils m'avaient, on peut le dire, accusé d'être coupable de tous les pêchés capitaux, et contre le Décalogue, etc.


[4439]
Mais le Révérend Père Guardi a ajouté un rapport prétentieux contre moi; ce Général des Camilliens, est aussi conseiller de 5 Congrégations Cardinalices, de l'Inquisition, de la Discipline Régulière, des Affaires Ecclésiastiques extraordinaires, Examinateur des Evêques, Examinateur du Clergé, etc., familier du Pape et des Cardinaux, homme très puissant, très influent, estimé et vénéré au Vatican... Et pourtant il en a été pour ses frais.

Et ainsi lors d'une réunion tenue à Propaganda Fide et présidée par l'Eminent Cardinal Préfet, en présence du même Révérend Père Guardi, il fut décidé de rappeler tous les Camilliens d'Afrique, sans exception.


[4440]
En me basant sur une telle décision, j'ai ordonné à mon Vicaire Général le chanoine Fiore d'aller prendre en charge la maison Camillienne de Berber et d'y installer mes Missionnaires.

Je suis ainsi libéré pour toujours de mes principaux ennemis, qui n'avaient d'autre but que de me barrer le chemin, et d'entraver mon œuvre.

Que Dieu les bénisse et sauve leur âme, mais ce ne sont pas des religieux.

A présent, par la souffrance des innocents, Dieu punit de nombreux coupables, et ceci par la suppressions des Instituts religieux et par d'autres mesures.


[4441]
Le Révérend Général est furieux contre moi, et je crois que tout l'Ordre des Camilliens me regarde d'un œil réprobateur.

Pour vous citer une des mille anecdotes qui ont accompagné cette histoire, je vous dirai rapidement ce que l'Eminent Cardinal rapporteur Bartolini raconta à l'Evêque de Vérone et à moi-même.

Le Père Général alla voir cette Eminente personnalité et se plaignit parce que disait-il, des Cardinaux avaient été retournés pour donner tort à ses religieux, alors qu'auparavant, ces Eminentes personnalités lui avaient promis de soutenir les siens. Le Cardinal répondit à ceci que la Sacrée Congrégation n'avait fait que son devoir, n'avait rendu que la pure justice.


[4442]
Le Général a rajouté que Comboni est une canaille, et que ses religieux se sont bien comportés. Le Cardinal a répondu ceci: "La Sacrée Congrégation a rendu une pure justice, et vos confrères avaient tort, et Monseigneur Comboni mille fois raison". Mais comme le Général continuait à se plaindre et à répéter son accusation, Son Eminence lui a dit: "Je vous conseille d'arrêter. Voulez-vous que je vous parle franchement? Tous mes éminents collègues ont voté à l'unanimité contre les vôtres et en faveur de Monseigneur Comboni, tous ont unanimement condamné vos confrères, et ont proclamé la justice en faveur de Monseigneur Comboni; aucun, sans exception, n'a penché du côté des vôtres. Voilà tout: maintenant faites ce que vous voulez ". Vous pouvez imaginer la tête que fit ce vénérable septuagénaire en s'en allant.

Cependant, je dois dire que ce fut un miracle de Dieu; et mon Œuvre prit aussi cette fois-là le caractère d'une œuvre de Dieu.


[4443]
Mais le Général et les Camilliens, pour sauver la face, disent que le but de l'Ordre n'est pas de participer aux Missions, et que le Conseil Général de l'Ordre a donc décidé de rappeler d'Afrique les Camilliens parce qu'ils sont nécessaires en France, etc. . Et voilà!

Mais ils font tout ceci après un an d'examen de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide, et après la sentence du Saint-Siège.


[4444]
Il me reste à résoudre le 3ème point de la 5ème résolution de la Sacrée Congrégation approuvée par le Pape, c'est-à-dire: "que Monseigneur Comboni soit entendu pour savoir comment il organisera le Vicariat avec les seules forces de son Institut sans l'aide (sic) des Camilliens".

J'ai préparé le Rapport, mais mon Cardinal est malade depuis 20 jours. Le Rapport lu par plusieurs personnes après le Cardinal, sera présenté à l'Assemblée, puis imprimé, et ensuite transmis aux Cardinaux, discuté pendant la Congrégation Générale, référé au Pape, puis, en calculant "l'éternité" systématique et proverbiale de Rome, je crois que je me sortirai des affaires de Rome au printemps.

Mais patience! On obtient tout avec de la patience. J'ai remporté un immense triomphe qui fera date à Propaganda Fide.


[4445]
Le Général, le Père Carcereri, etc., les Camilliens, sont précipités dans la fosse qu'ils avaient creusée; Carcereri, Franceschini, et le Général qui espéraient faire prospérer leur Ordre en France avec les économies et les restes de mon Œuvre, avaient déjà secrètement et confidentiellement informé nombre de mes amis que ma chute était imminente, que je devais être destitué, et que je ne retournerai plus jamais en Afrique, parce que la Mission leur serait confiée; ils ont fait comme les fifres de montagne qui allaient jouer et qui étaient dupés.

Que Dieu les bénisse éternellement. Mais j'ai souffert les angoisses de la mort pendant deux ans et demi: j'ai cru succomber.


[4446]
Mais dès que le résultat du jugement de la suprême autorité de l'Eglise a été subodoré, je me suis senti mieux, à tel point que le Saint-Père Pie IX, en présence de l'Evêque de Vérone, me voyant aussi fort et robuste, a dit: "Comboni, tu ne fais pas pénitence. On dirait que l'Afrique Centrale ne te fait aucun mal.". Mais Monseigneur Canossa se leva pour me défendre et il dit au Saint-Père que je fais pénitence en Afrique, quand je suis contraint de me nourrir de pain et d'oignons, de ne pas boire de vin, de manger sans sel, et de voyager dans les déserts par 90 degrés, etc. "Oh! C'est vrai"? - m'a dit le Pape se retournant vers moi - " C'est plus que vrai - ai-je ajouté - mais ce ne sont pas les sacrifices les plus importants". Eh oui! - a répondu le Saint Père- c'est une rude mission, etc."


[4447]
L'Evêque de Vérone est bien resté 7 jours ici, à Rome. Nous avons beaucoup travaillé ensemble auprès des Cardinaux et du Saint-Père pour qu'il n'aille pas à Bologne; j'y ai pris une part importante, et nous avons bien réussi. Bologne est le diocèse le plus important des Etats Pontificaux après Rome, et la barrette cardinalice est adjointe a ce siège Archiépiscopal. Mais Canossa a tout refusé généreusement, il a gagné le cœur de tous à Vérone, et il a amélioré considérablement sa condition, pour pouvoir répandre le bien. Mais la barrette, il la recevra.


[4448]
Samedi 3 février se tient la Congrégation des Cardinaux pour déclarer Vénérable la Marquise Madeleine de Canossa, la tante de l'Evêque. J'espère l'annoncer à l'Evêque par télégramme dans l'après-midi. J'ai aussi beaucoup travaillé pour cela. Connaissant la paresse et la lenteur romaines, j'ai laissé les bonnes manières en Afrique, et je suis intervenu avec insistance à la Congrégation des Rites, auprès de l'Eminent Cardinal Préfet jusqu'au dernier des Messeigneurs, et le brave Avocat m'a dit: "Vous m'avez fait travailler de nombreuses nuits.

Je vous dis en vérité, si vous n'aviez pas harcelé tout le monde et mis le feu partout, je ne me serais pas pressé, et la cause de la servante de Dieu aurait certainement attendu les calendes grecques". Mais j'ai agi ainsi car j'avais mes raisons, puisque j'attends beaucoup de grâces pour la Nigrizia de la part de cette Vénérable.


[4449]
Demain matin l'Abbé Policarpo et un laïque partent pour l'Egypte. Dans quelques semaines, deux autres partiront. J'ai ensuite ordonné au Caire de faire partir deux Prêtres, un clerc théologien, deux Frères laïques, et trois Sœurs pour l'Afrique Centrale. Et j'ai ordonné à mon Vicaire Général d'occuper la Mission Camillienne de Berber, en mettant à sa tête l'Abbé Gennaro Martini, qui visite actuellement le Fleuve Bleu, les provinces de Cadaref et de Ghalabat. Cela suffit pour aujourd'hui.


[4450]
Saluez de ma part l'Abbé Consolaro, et tous les membres du Collège; présentez mes respects au Professeur Sartori, à Monseigneur Dalla Vecchia, et à tous ceux que je connais, et surtout à votre Père et à votre Mère.

En attendant, priez pour

votre affectionné

Daniel






683
Mère Emilie Julien
0
Rome
14. 2.1877
N° 683 (649) - A MERE EMILIE JULIEN

ASSGM



Rome, le 14 février 1877



Ma Vénérable Mère,



[4451]
Mère Emilienne, Supérieure provinciale d'Afrique Centrale, m'a écrit plusieurs fois qu'il est nécessaire d'avoir des Sœurs arabes. En vérité, en Afrique Centrale, une bonne Sœur arabe, comme celles que nous avons eues, fait quatre fois plus de travail qu'une Sœur européenne.

Je vous prie donc, ma chère Mère, d'envoyer, de Marseille ou de Syrie, deux ou trois Sœurs arabes comme Sœur Joséphine Tabraoui, Sœur Anna ou Sœur Euphrasie. Si j'avais 8 Sœurs comme celles que je viens de nommer, je serais très heureux!

Faites en sorte d'envoyer ces trois Sœurs au Caire; elles partiront pour Khartoum dans la première quinzaine de mars.

Toutes les Sœurs, surtout Mère Emilienne et celles du Cordofan, sont très dévouées à la Mission de l'Afrique Centrale.

Mes respects à Mère Euphrasie, Sœur Marie Bertholon, et priez pour moi.



Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale



Texte original français corrigé.






684
M. Elisabetta Nespoli
0
Rome
9. 3.1877
N° 684 (650) - A MERE ELISABETTA NESPOLI

ACCR, c. Saint-Siège



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 9 mars 1877

40/a, rue Margana, 1er étage



Révérende Mère Supérieure,



[4452]
Je vous remercie pour vos deux gentilles lettres. Je suis content que vous ayez reçu les 50 copies du Décret qui déclare vénérable la Marquise, copies que j'ai envoyées il y a environ une semaine; je vous envoie maintenant 40 autres copies afin que chaque maison en ait au moins deux, une à mettre dans le salon de réception, l'autre à la sacristie.

De l'ensemble de vos vénérables lettres, il ressort que vous désirez que l'on avance dans le procès de béatification de la Vénérable jusqu'à ce qu'elle soit déclarée Bienheureuse, et que nous puissions réciter l'Office et la Messe devant son autel.


[4453]
Je peux affirmer avoir entendu le Saint-Père Pie IX dire que la Cause de la Marquise est très belle, ainsi que l'Eminent Cardinal "Rapporteur " et Préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, et beaucoup d'autres Cardinaux et Prélats qui étaient au courant de cette Cause, l'une des meilleures que l'on puisse connaître actuellement au Saint-Siège. Les mêmes Promoteurs de la Foi, Messeigneurs Salvati et Caprara, qui sont les avocats du Diable (qui par devoir ont présenté la Marquise non comme une sainte, mais plutôt comme une calculatrice, une malhonnête, etc., ce que vous verrez dans les actes du procès dont je vous porterai quelques copies), sont convaincus que c'est une Cause magnifique.

A propos des miracles, elle en a fait suffisamment pour être proclamée bienheureuse, et il y a un mois j'en ai parlé longuement à notre Evêque, l'Eminent et Révérend Cardinal, à qui j'ai écrit tout ce qu'il fallait faire pour atteindre le but, je vous en parlerai à Vérone à mon retour.

En me basant sur ces instructions, j'ai montré qu'il faut continuer tout de suite le procès de béatification jusqu'à pouvoir célébrer la Messe de la bienheureuse Marquise.


[4454]
La Cause de la Marquise étant magnifique, et ayant fait les miracles nécessaires (dont il faut encore constater la véracité et les témoignages dans le nouveau procès apostolique que doit ouvrir l'Eminent Evêque de Vérone, selon les Règles de Canonisation des Saints), il ne reste qu'à tirer la barbe à Saint Joseph afin d'obtenir l'argent nécessaire pour poursuivre la Cause. Saint Joseph, économe de l'Afrique Centrale, a orné sa barbe de guinées et de napoléons en or, il s'est montré fort gentil envers moi, et en quelques années il m'a envoyé près d'un million et demi de francs pour fonder 11 établissements de Vérone à l'Afrique Centrale, parmi lesquels les deux de Vérone dont les frais de fonctionnement s'élèvent à 30.000 franc par an.

Mon cher économe n'agira-t-il pas avec davantage de largesse en faveur de vos filles, les Canossiennes pour canoniser celle qui a promu si efficacement la dévotion au Saint Epoux de la Vierge Marie?


[4455]
Il me semble que le succès serait sûr et certain, si dans ce saint mois de mars toutes les filles de Saint Joseph dispersées en Italie et en Chine suppliaient le Saint Patriarche d'envoyer à chacune des maisons de la pieuse Congrégation Canossienne 500 lires d'ici trois ans, pour les frais d'une si belle Cause.

Sans argent on ne canonise personne, même s'il faisait des miracles tous les jours. L'Eglise doit dépenser de l'argent pour les publications, l'accueil des officiels, les consultations médicales, etc.

Quant à moi, je suis certain que Saint Joseph accordera cette grâce si ses filles prient à cette fin. Mais elles ne doivent pas faire comme le Cardinal Frédéric Borromeo qui, après la canonisation de Saint Charles, voyant les énormes dépenses supportées par sa famille (aujourd'hui on dépense beaucoup moins) s'exclama: "chez moi des personnes vertueuses, d'accord!, mais des Saints ça suffit!". Les filles de Saint Joseph doivent compter sur lui, doivent demander de l'argent auprès de personnes sûres, prier, et aller de l'avant.


[4456]
Comme la Marquise se révèle être une vraie protectrice de la Nigrizia, j'apporterai aussi ma part, j'intimerai à mon économe de lâcher aussi quelques sous pour la Cause, et je donnerai les ordres opportuns pour faire prier dans mes établissements.

Courage donc! Confiance en Dieu, qu'on mène à son terme la Cause.

Ceux parmi les Eminents et Révérends Prélats qui ont droit au portrait de la Vénérable, ont déjà commencé à demander quand ces portraits seront prêts; et dans peu de temps, quand la fièvre des affaires aura cessé, ainsi que les visites aux Cardinaux et les réceptions, nous nous occuperons aussi de cela avec l'Eminent neveu de la future Bienheureuse .


[4457]
En attendant, je m'en remets à vos prières, et à celles de vos filles.

L'avocat de la Cause, qui a donné une réponse sans appel aux animadversions du Promoteur de la Foi, est maintenant malade (bien qu'il n'ait que 32 ans) à cause des nuits que je lui ai fait passer au bureau pour répondre avec sollicitude à toutes les objections de l'avocat du diable.

Il faut bousculer la lenteur romaine, et nous pourrons alors voir bientôt la Marquise vénérée sur les autels. Priez pour les 100 et plus millions d'infidèles que le Saint-Siège m'a confiés pour les convertir.

Je me déclare dans les doux Cœurs de Jésus et de Marie



votre vrai et dévoué serviteur

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale






685
Abbé Francesco Bricolo
0
Rome
23. 3.1877
N° 685 (651) - A L'ABBE FRANCESCO BRICOLO

ACR, A, c. 14/32



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 23 mars 1877



Mon cher Abbé Francesco,



[4458]
Je vous obtiendrai la faculté voulue, mais jusqu'à présent (et ce sera ainsi pendant quelques temps encore) j'ai été tellement occupé jour et nuit que je n'ai pas pu penser à ces petites choses, j'en ai au moins une trentaine pour d'autres personnes.

Imaginez-vous que nous avons rendu visite deux fois aux 45 Cardinaux présents dans la Curie, au Saint-Père, à un grand nombre de Prélats et de Messieurs; sachez que nous avons beaucoup écrit, que nous nous sommes très souvent déplacés, que nous avons monté des milliers d'escaliers immenses, et mes affaires à elles seules pourraient occuper dix personnes et le Vicariat... Aujourd'hui, l'Eminent Cardinal Canossa prend possession de son Titre de Saint Marcel, et il part dimanche pour faire son entrée solennelle à Vérone, lundi, à 5 heures de l'après-midi. Pour le moment, je souffre de rhumes et de constipation.


[4459]
A cause des Consistoires de mars, aucune Congrégation Générale de Propaganda Fide n'a eu lieu ce mois-ci pour en référer à Leurs Eminences à propos de l'exécution des résolutions prises par la Sacrée Congrégation le 27 novembre de l'an dernier, concernant les Camilliens, suite à laquelle doit être annoncée officiellement ma nomination à l'Episcopat, ce qui est sûr et certain. Mais il ne faut pas oublier l'habituelle lenteur proverbiale de Rome, pas toujours opportune. Imaginez-vous qu'il y a des affaires pour d'autres Missions qui traînent depuis des années et qu'il faut résoudre. Mais on m'a promis de mener à terme chacune de mes affaires lors de la Congrégation Générale d'avril. Nous verrons! Hier à midi j'ai assisté à la conversation du Pape, dans les loges de Raphaël avec quelques Cardinaux Prélats, Kanzler, et d'autres. Oh! Quel plaisir! Le Pape et mes Cardinaux ont beaucoup de bonté envers moi.

Tous les Camilliens ont quitté l'Afrique Centrale, et trois d'entre eux partiront à Jérusalem. Que Dieu les bénisse éternellement, mais loin de moi!

Ce serait bien si Canossa devenait le prochain Pape! Il est certain que ses Eminents Collègues l'estiment beaucoup: il est franchement sain dans ses principes, et c'est un homme sincère et honnête. Je lui ai transmis vos hommages quand j'ai reçu la lettre, et il vous salue pareillement.

A Rome, on dit que le Père Schiattini serait créé cardinal; je le connais, c'est un brave homme.

Saluez de ma part Consolaro et les autres. L'Abbé Paolo, mon Secrétaire, se rappelle à votre bon souvenir, mais moi plus que tous les autres.



très sincèrement dans le Christ

Daniel






686
Père Camillo Guardi
0
Rome
25. 3.1877
N° 686 (652) - AU PERE CAMILLO GUARDI

AGCR, 1700/41



Rome, le 25 mars 1877



Très Révérend Père!



[4460]
J'ai reçu ce matin votre chère lettre du 25 mars, et comme je savais que j'avais écrit à mon représentant l'Abbé Pasquale Fiore, de se rendre lui-même à Berber pour reprendre cette mission et remettre au Père Stanislao l'argent nécessaire au retour des Pères Camilliens, je suis très étonné que pas un seul centime n'ait été donné au Père Stanislao pour les frais de voyages, et que l'Abbé Pasquale Fiore lui ait répondu continuellement n'avoir reçu aucun ordre.

Peu de temps après avoir lu votre lettre, une lettre du 21 février de mon représentant m'est parvenue via Vérone, lettre dans laquelle il m'explique ce qui s'est passé.


[4461]
Mon représentant était à El-Obeïd; j'ai donc adressé la lettre à El-Obeïd, dans laquelle je lui ordonnais, selon ce que nous avions convenu, de descendre à Berber, et de consigner au Père Stanislao la somme nécessaire au retour.

Mais avant de recevoir ma lettre, le Père Stanislao lui a écrit de descendre le plus vite possible parce que lui et ses confrères devaient voyager dans le désert et ne voulaient pas, à cause de son retard, manquer l'opportunité de la pleine lune.

Après avoir reçu cette lettre, dont je possède l'original, mon représentant est parti tout de suite d'El-Obeïd et, avec une extraordinaire rapidité, il rejoint Khartoum en 7 jours et, de là, il a envoyé immédiatement l'Abbé Salvatore Mauro à Berber. Ma lettre a donc dû d'abord monter à El-Obeïd puis descendre à Khartoum, pour parvenir dans les mains de mon représentant environ 15 jours plus tard, c'est-à-dire le 20 février.

Voici ce que m'a écrit l'Abbé Pasquale Fiore: "La lettre de l'Abbé Paolo, écrite à votre nom, ne m'est parvenue d'El-Obeid qu'hier; elle contient les instructions relatives à l'occupation de Berber par nous ..." . Il ressort clairement de ceci que si les choses ne se sont pas passées comme convenues, ce n'est ni de ma faute, ni de celle de mes Missionnaires, mais uniquement à cause du Père Stanislao qui a provoqué en toute hâte la descente à El-Obeïd de mon représentant.

Sachez cependant, Mon Père, que j'ai écrit plusieurs fois à mon procurateur au Caire pour qu'il donne aux Camilliens l'argent nécessaire à leur voyage du Caire à Rome ou Vérone, et je le lui répéterai à la première occasion.

Quand les Révérends Pères seront arrivés à Vérone, ils présenteront leurs dépenses à l'Abbé Antonio Squaranti, mon Procureur Général, qui les indemnisera de tout en toute justice.

Du reste Mon Père, le voyage a été entrepris et ce au moins jusqu'au Caire à leurs frais et il leurs est resté aussi un peu d'argent, d'après ce que j'ai pu savoir des trois qui sont déjà partis pour les Lieux Saints. Il y a là une preuve vraiment évidente qu'ils ne disaient pas la vérité il y a quelques mois, quand ils déclaraient, en se plaignant, d'avoir pas un centime pour survivre.

Je ne regrette pas qu'ils disposent du nécessaire, mais cette plainte mensongère m'indispose.

Tout ceci répond à votre lettre du 25 de ce mois. Pour le moment je me déclare avec beaucoup d'estime et de considération



votre dévoué, fidèle et vrai serviteur

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale






687
Père Camillo Guardi
0
Rome
26. 3.1877
N° 687 (653) - AU PERE CAMILLO GUARDI

AGCR, 1700/42



Rome, le 26 mars 1877



Très Révérend Père!



[4462]
Je réponds à votre seconde lettre du 25 de ce mois. J'avais déjà donné les dispositions opportunes, au bon moment, tant à la maison de Khartoum pour le voyage des Révérends Pères Camilliens jusqu'au Caire, qu'à la maison du Caire pour leur voyage jusqu'à Rome ou Vérone.

Maintenant je ne peux pas surcharger la maison du Caire de mesures encore plus dures; et pour cela j'écris tout de suite à l'Abbé Rolleri au Caire en lui répétant ce que je lui ai ordonné plusieurs fois, c'est-à-dire qu'il donne tout de suite aux Révérends Pères Camilliens la somme nécessaire à leur voyage du Caire à Rome ou Vérone. Si un reliquat demeure avant la fermeture des comptes, ils pourront traiter avec mon Procureur Général, l'Abbé Antonio Squaranti à Vérone, qui, lui, fermera tous les comptes.

Après ceci je crois que Votre Paternité sera satisfaite de ces dispositions.

Avec toute l'estime et le respect je me déclare





votre Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale






688
Mère Emilie Julien
0
Rome
30. 3.1877
N° 688 (654) - A MERE EMILIE JULIEN

ASSGM, Afrique Centrale, Dossier



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 30 mars 1877

40/a, rue Margana



Ma bien Révérende Mère,



[4463]
Votre lettre du 27 courant a ajouté une croix de plus à celles que mes malheureux ennemis m'ont fait endurer, le Bon Dieu l'ayant permis.

Bien que, grâce à la sagesse et à la justice de Rome, j'aie remporté le plus grand triomphe sur mes adversaires, la terrible lenteur de Rome me fait beaucoup souffrir.

Le Vicariat a besoin de la présence de son Chef suprême, et moi je me trouve enchaîné ici, à Rome, depuis 13 mois, sans même pouvoir me procurer des ressources. C'est un miracle de Saint Joseph d'avoir pu supporter tant de dépenses pour subvenir correctement aux besoins de neuf maisons, pour construire tant de bâtiments, payer tant de voyages et d'expéditions, soutenir le courage des Missionnaires et des Sœurs du Vicariat avec mes lettres, et gouverner de Rome la Mission la plus difficile, la plus laborieuse et la moins connue du monde.

Tout cela trouble mon esprit, bien que je me sente soutenu par la grâce de Dieu. Et maintenant que je me suis procuré péniblement 22.000 francs pour faire cette expédition du Caire au Cordofan, vous me comblez de douleur en ordonnant à Sœur Véronique de faire suspendre le voyage de vos Sœurs alors que la pauvre Sœur Emilienne et la maison du Cordofan réclament une aide très urgente depuis deux ans.

Je ne sais pas si je pourrai survivre à tant d'angoisses et de croix. Mais tant que je serai chargé par le Saint-Siège de cette laborieuse Mission, je dois donner ma vie pour pourvoir à son bien.

Je vous invite donc à donner l'ordre à Sœur Véronique de laisser partir les trois Sœurs tout de suite avec ma première caravane après l'octave de Pâques.


[4464]
Il ne faut pas que, à cause de racontars qui vous ont été écrits du Caire, les pauvres Sœurs d'Afrique Centrale meurent de fatigue et soient privées de l'aide des trois Sœurs. Nous avons une Convention entre nous, et vous et moi, sommes obligés de la respecter. Ce fait est plus sérieux que les nouvelles qui vous arrivent du Caire et qui ont entraîné un acte qui n'est pas digne de vous, et pour lequel vous avez une grande responsabilité.

Mais Dieu, j'espère, ne me fera pas supporter cette douleur que je ne mérite pas.

Vous me demandez quelles sont mes intentions à l'égard des Sœurs, si mes Sœurs de Vérone doivent remplacer les Sœurs de Saint Joseph de l'Apparition en Afrique Centrale, et vous m'invitez à parler franchement, à être net.

Vous avez, ma bonne Mère, beaucoup de sagesse et de charité, et je suis convaincu que vous connaissez à fond ma personne, mes intentions, mes aspirations et ma franchise.

Toutefois, pour justifier ma conduite qui a été, est, et sera toujours ouverte, loyale et, pour autant, sérieuse et digne de la tâche difficile que le Saint-Siège m'a confiée, je vous expliquerai tout.

Il faut remarquer avant tout que peu de monde connaît le Vicariat de l'Afrique Centrale. Je ne suis pas surpris que ce Vicariat soit si peu connu en Europe, car peu de choses ont été écrites avec précision. Je ne me suis pas empressé de le faire connaître, soit par manque de temps, soit parce que ce que j'écris doit être publié et donc sûr. Quand je vous aurai fait connaître l'apostolat de la Sœur de charité dans cette Mission qui est la plus importante, la plus laborieuse, la plus glorieuse, et la plus méritante de la terre, vous ne manquerez pas de m'envoyer plusieurs Sœurs chaque année.


[4465]
Le Vicariat d'Afrique Centrale est plus vaste que l'Europe toute entière.

Il est douze fois plus grand que la France. Les cent millions d'infidèles qui y vivent sont des hommes et des femmes primitifs. La Sœur de charité est un Prêtre, elle est même davantage qu'un Prêtre. Dans une grande Mission où il y a trois Prêtres et quinze Sœurs, c'est comme s'il y avait vingt Prêtres Missionnaires.

La révolution qui a supprimé les Ordres religieux en Italie a obligé tous les jeunes gens, même les ecclésiastiques, à être soldats, mais cela n'a pas fait un grand mal à l'Afrique Centrale comme cela a été le cas en Europe et dans d'autres Missions.

La Sœur de charité en Afrique Centrale fait le travail de trois Prêtres en Europe. Ce siècle de persécution contre l'Eglise catholique qui a été privée de l'aide de nombreux ecclésiastiques et de Religieux, est le siècle de la femme catholique;

la Providence de Dieu s'en sert comme de véritables Prêtres, Religieux, et Apôtres de l'Eglise, auxiliaires du Saint-Siège.

Les femmes sont le bras droit du ministère évangélique, les piliers des Missions étrangères, et les civilisatrices des populations. Il est bon que, vous qui êtes Mère Générale d'une Congrégation de Sœurs missionnaires, soyez convaincue de cela.


[4466]
C'est pourquoi, étant donné la grandeur considérable et l'importance de mon Vicariat, et vu la mission de la femme catholique dans ce siècle, je suis fier d'avoir fondé à Vérone la nouvelle Congrégation des Pieuses Mères de la Nigrizia qui a, parmi les œuvres que j'ai fondées, une grande importance et obtient des résultats bénéfiques.

C'est vous, ma bonne Mère, qui avez tout le mérite de cette nouvelle fondation, et c'est le Bon Dieu qui vous a conduite, à l'insu de vous-même, à me poussé à entreprendre cette fondation. Mais cela ne nuit point à l'apostolat des Sœurs de Saint Joseph en Afrique Centrale. Les Sœurs de Saint Joseph ont les premiers mérites, les premiers droits, les premiers égards dans la Mission de l'Afrique Centrale. Et vous devez avoir entièrement confiance en ma loyauté et dans mes plus vives intentions en faveur des Sœurs de Saint Joseph qui ont consacré tout leur travail et toute leur vie à cette noble Mission.

Quand vous m'avez accordé très charitablement en novembre 1867 vos Sœurs pour le Caire, je n'ai plus songé à fonder une nouvelle Congrégation de Sœurs.

Le dévouement des vôtres, et l'espérance que vous m'en enverriez suffisamment pour mes œuvres, l'unité d'esprit qui persiste dans la Mission quand elle est desservie par une seule Congrégation, m'incitaient à ne jamais travailler avec d'autres Congrégations de Sœurs. Et cela d'autant plus que Monsegneur Valerga m'avait dit, tout comme Monseigneur Brunoni, que les Sœurs de Saint Joseph sont les mieux adaptées de toutes, les plus utiles, les moins exigeantes, et celles avec lesquelles il y a moins d'inconvénients qu'avec d'autres Congrégations de Sœurs. Mes meilleurs missionnaires (exceptés l'Abbé Rolleri, les Camilliens et quelques autres sans importance) et moi, nous en sommes parfaitement convaincus.


[4467]
C'est avec une grande douleur que j'ai reçu à Paris en octobre 1868 une lettre que votre Secrétaire, Sœur Angélique, a adressée à mon Recteur de Vérone, feu l'Abbé Alessandro Dalbosco, dont voici un extrait de la lettre originale et autographe, lettre que j'ai ici sur la table.

"Mon Révérend Père,

Notre Révérende Mère me charge de vous écrire... Mon Révérend Père, il faut aller droit au but, et vous expliquer les intentions de notre Mère Générale.

Les voici: lors de son passage à Marseille, l'Abbé Daniel Comboni lui a manifesté le besoin d'un certain nombre de Sœurs pour son œuvre en Afrique Centrale. N'étant pas en mesure de lui en fournir, et ne sachant pas où il se trouve, notre chère Mère Générale vous prie de lui faire connaître l'impossibilité de poursuivre même l'œuvre du Vieux Caire. Veuillez prévenir l'Abbé Daniel à ce sujet.

Etant en Europe, il lui sera plus facile de trouver les personnes nécessaires dans une autre Congrégation. Il pourra commencer son choix au Caire, car notre Mère désire retirer nos Sœurs dès qu'il pourra les remplacer.

Veuillez agréer...

Sœur Angélique Villemur, Secrétaire."




[4468]
Frappé par cette lettre inattendue que vous avez fait écrire, sans doute d'après ce qu'ont pu vous faire croire, ou le Camillien, Père Zanoni que j'avais expulsé du Vieux Caire, ou le Père Callyste, Trinitaire de Cerf Froid, ou M. Gérard de Grenoble, qui voulaient faire tomber mon Œuvre dans les mains des Trinitaires de France et des Sœurs Trinitaires de Valence, j'ai contacté plusieurs Congrégations de France et d'Italie; mais ne trouvant pas de Sœurs, je suis allé à Vérone où j'ai eu le courage de tenter la fondation d'une nouvelle Congrégation de Sœurs, et j'ai commencé avec deux postulantes.

Mais le Bon Dieu a fait aller au Caire la Révérende Mère Euphrasie Marval, votre digne assistante qui après avoir tout vu, a si bien et avec tant de sagesse et de charité disposé les affaires qu'elle vous a persuadé de me laisser vos Sœurs et d'attendre l'avenir.

Cependant, quelques-unes de mes Sœurs du Caire me disaient toujours qu'elles ne seraient jamais allées en Afrique Centrale telles les Sœurs de l'hôpital du Caire, qui influencées par le célèbre Père Franciscain de Belgique (c'est à cette occasion que Sœur Geneviève a été éloignée du Caire), décourageaient alors mes Sœurs de partir pour les Missions de l'Afrique Centrale.

Ne voulant pas entendre dire à Vérone que j'avais entrepris une Œuvre et que je l'avais ensuite laissée tomber. je n'ai pas eu le courage de supprimer l'Institut des Sœurs engagé à Vérone. Mais je l'ai laissé subsister en attendant l'avenir.


[4469]
Lorsque vous avez eu l'immense charité de m'accorder Sœur Joséphine et les autres pour l'Afrique Centrale, ma première idée fut d'implanter votre Institut à Vérone en vous cédant mon couvent, en proposant à mes novices de se faire Religieuses de Saint Joseph de l'Apparition, en fusionnant mon Institut dans le vôtre sous la direction d'une de vos braves Supérieures, et en appelant de Syrie quelques Sœurs arabes; après avoir traité ce projet avec vous, avec Propaganda Fide et la Congrégation des Evêques et des Réguliers à Rome; il y aurait ainsi une seule Congrégation avec un seul esprit


[4470]
J'ai caché ce projet pendant un an, puis je l'ai étudié avec l'Abbé Pasquale et l'Abbé Paolo, mon Secrétaire, et avec quelques autres qui l'ont entièrement approuvé, après avoir pris en compte les dix voix pour et les sept contre.

Ayant été informé qu'il y avait 12 ou 13 novices qui étaient prêtes à faire les vœux dans cette nouvelle Congrégation, j'ai ordonné au Supérieur l'Abbé Antonio Squaranti de ne faire prononcer aucun vœu aux novices jusqu'à mon arrivée à Vérone. En même temps, j'ai chargé mon Secrétaire l'Abbé Paolo qui est aussi directeur des Sœurs de Khartoum, d'écrire à l'Abbé Antonio, de lui expliquer mon projet et de demander son avis et sa coopération; et c'est ce que mon Secrétaire a parfaitement fait.


[4471]
J'ai écrit plusieurs fois à ce sujet à Son Eminence le Cardinal Préfet, pendant un an. J'ai même appris que la plupart de mes novices étaient très contentes, et qu'elles n'attendaient que le moment désiré.

Voyant ensuite que le nombre des novices s'élevait à 15, j'ai ordonné à l'Abbé Antonio de ne plus accepter personne jusqu'à mon arrivée à Vérone, ce qui a causé des peines et des plaintes auprès de l'Abbé Antonio.

[Il y a ici trois lignes effacées].


[4472]
Après avoir tout considéré, et entendu l'avis de mon Conseil Central et celui d'autres amis ecclésiastiques importants, vu que les Sœurs étaient vraiment disposées à être les filles de l'Institut dans lequel elles se sont consacrées, vu l'indécision de l'Evêque qui n'aime exercer aucune pression sur les esprits, j'ai décidé de ne rien innover pour le moment. J'avais toujours le temps de faire la fusion quand j'aurai vu plus clair, et quand j'aurai été convaincu que le projet était réalisable avec la pleine adhésion de mes sujets et de la Congrégation de Saint Joseph.


[4473]
Les vœux prononcés par mes Sœurs durent un an, et sont renouvelés ensuite chaque année. D'autre part, je ne voulais pas faire approuver cet Institut par Rome tant qu'il n'aurait pas fait au moins dix ans de Mission en Afrique Centrale. De plus, vous ne pouviez pas vous-même pousser votre Congrégation à prendre une responsabilité sans une parfaite connaissance de cause, et moi je ne pouvais pas vous garantir la réussite de cette fusion. Je vous assure que cela a été mon rêve pendant longtemps, mais quand j'ai vu au bout de deux ans et demi, après vous avoir demandé dix Sœurs et après tant de prières de la Mère Provinciale et de moi-même, que vous ne nous en envoyiez que trois; et quand je vois à présent que vous avez fait rester les trois Sœurs au Caire sans penser à la nécessité d'avoir une Supérieure au Cordofan, et sans penser à Khartoum où il n'y a pas de maîtresse capable d'enseigner (excepté la Mère Provinciale dont je suis fier et qui est une Supérieure de première classe), je vous avoue franchement que je ne trouve pas prudent de réaliser le projet que j'ai tellement souhaité.


[4474]
Il vaut mieux donc que chacun reste à sa place. L'Afrique Centrale est très vaste. Vous y avez deux Missions, à Khartoum et au Cordofan, qu'il faut renforcer avec d'autres Sœurs; ensuite, l'année prochaine je dois ouvrir encore au moins trois maisons de Sœurs, et il y en aura aussi pour votre Congrégation.

Je placerai les Sœurs de Vérone dans les villes où les vôtres ne se trouvent pas, excepté pour la maison d'acclimatation du Caire qui doit être soit pour vos Sœurs, soit pour celles de Vérone, car je n'ai pas la permission du Délégué Apostolique d'Egypte d'y ouvrir une Œuvre. La maison a deux étages, et j'en ferai construire un autre. Pour les quelques mois pendant lesquels les Sœurs restent au Caire avant d'aller en Afrique Centrale, on peut s'accommoder.

Tout cela ne se fera qu'après vous avoir consultée, et l'on tiendra compte de votre sagesse et de votre volonté, car vous avez tous les droits qui découlent de votre charge et de votre expérience.


[4475]
Voici la pure vérité à propos de tout cela.

J'ai toujours été franc et consciencieux; c'est pour sauver mon âme et pour rendre de véritables services à l'Eglise, que j'ai tant souffert et que je suis disposé au martyre.


[4476]
Il ne me reste qu'à établir une nouvelle Convention réalisable et praticable dans les conditions et les circonstances actuelles de l'Afrique Centrale, et que vous et moi puissions honorer afin d'éviter les désagréments entre nous.

La Maison Mère à Marseille aura une caisse de réserve de 50 francs pour chaque Sœur; ainsi, s'il y a 20 Sœurs en Afrique Centrale, 1.000 francs par an doivent rentrer dans la caisse de la Maison Mère, et la Mère Générale en fera ce qu'elle voudra.


[4477]
Tous les revenus des Sœurs de vos maisons et des écoles (ce sont de petites sommes) sont tous au profit de la Mission de l'Afrique Centrale et du Vicaire Apostolique.

Ensuite, il me faut de bons éléments qui obéissent, et il faut établir le droit à la Supérieure Principale ou Provinciale d'avoir juridiction sur toutes les maisons de la Congrégation dans le Vicariat.


[4478]
Je vous prie de me faire parvenir votre avis. Je ne peux pas bouger de cette Rome "éternelle" tant que mes affaires ne sont pas réglées.

Si j'arrive à sortir de Rome, je resterai longtemps sans y revenir. Il faut que je m'occupe d'autres affaires en Europe, puis courir vite à ma Mission.

Ici je m'ennuie à mourir.

Je vous prie d'écrire par la poste ordinaire au Caire pour faire partir les trois Sœurs, et si vous le pouvez, envoyez m'en d'autres.

Les pauvres Sœurs de l'Afrique Centrale ont un besoin urgent d'aide. Puis, j'ai le droit de faire partir ces trois Sœurs vers leur destination. Je vous prie de me donner votre avis car sinon, je vis dans l'inquiétude. Dites-moi aussi si vous venez à Rome et quand.

Je vous souhaite de bonnes fêtes ainsi qu'à la Mère Assistante.



votre entièrement dévoué

Daniel Comboni



Notes en marge: Il faudrait pouvoir rédiger la Convention cette semaine.

Si vous voulez, mon Secrétaire viendra à Marseille, mais c'est mieux si vous venez ici.

Texte original français corrigé.




689
Card. Alessandro Franchi (Rapporto)
0
Rome
5. 4.1877
N° 689 (655) - AU CARDINAL ALLESSANDRO FRANCHI

ACR, A, c. 13/28



Rome, le 5 avril 1877



RAPPORT

De Monseigneur Daniel Comboni sur l'exécution de la vénérable résolution de la Sacrée Congrégation du 27 novembre 1876

concernant l'Afrique Centrale, et la situation générale du Vicariat en 1877.



Eminent et Révérend Prince,



[4479]
Son Excellence, le Révérend Monseigneur, Secrétaire de Propaganda Fide, m'a informé dans une lettre du 2 janvier 1877 que pendant la Congrégation Générale du 27 novembre de l'an dernier, après avoir étudié les mesures à prendre pour le plus grand bien du Vicariat de l'Afrique Centrale, les Eminents et Révérends Pères ont décrété ceci:

a) demander au Père Guardi de se mettre d'accord avec moi pour la bonne marche de la maison de Berber dans les rapports avec les Religieux Camilliens, selon la Convention de 1874;

b) me suggérer de me faire aider par une personne idoine dans la gestion des choses temporelles.


[4480]
Après avoir entendu les prudentes et sages délibérations de la Sacrée Congrégation, je les mis immédiatement à exécution, du moins pour ce qui me concernait.

Le matin du 5 janvier j'ai reçu une lettre du Père Guardi lui-même, m'annonçant que dans une réunion de presque deux heures avec Votre Eminence, en présence aussi de Monseigneur Agnozzi, il avait été établi qu'il retirerait ses Religieux, sans exception, et que je préparerais et leur donnerais les fonds nécessaires au voyage de retour. A peine ai-je lu la résolution susdite, que j'ai tout de suite envoyé mon Secrétaire l'Abbé Paolo Rossi chez le Père Guardi; il fut convenu que je remettrais dans les mains du Père Carcereri à Berber la somme nécessaire au retour de tous les Camilliens, et que j'enverrais une personne adéquate pour prendre en charge l'établissement Camillien.


[4481]
Suite à un tel accord, le soir du 6 janvier, profitant du bateau postal de Brindisi, j'ai ordonné à mon représentant général, le chanoine Fiore, de descendre immédiatement à Berber pour prendre en garde cette Mission, et de retirer 1.500 francs en or de la caisse de Khartoum pour les donner au Père Carcereri, c'est la somme nécessaire pour que tous les Camilliens voyagent confortablement jusqu'au Caire; et je lui ai ordonné en même temps que tout se fasse rapidement mais avec charité, prudence et dans la paix.


[4482]
J'ai écrit en même temps à l'Abbé Bartolomeo Rolleri, Supérieur de mes établissements en Egypte, pour qu'il loge les Pères Camilliens arrivés au Caire, qu'il s'en occupe bien pendant tout le temps qu'ils doivent y rester, et enfin qu'il leur fournisse tout le nécessaire pour qu'ils puissent faire confortablement leur voyage jusqu'à Rome, ou Vérone.

Pendant que j'écrivais ceci, le Père Guardi annonçait au Père Carcereri la résolution prise, et lui ordonnait de remettre la Mission à mon représentant susnommé duquel il recevrait la somme nécessaire au voyage jusqu'au Caire où, si c'était nécessaire, il obtiendrait de l'aide de la part du Supérieur de ces établissements.


[4483]
Si on prend en considération le temps que mettent habituellement les lettres pour arriver à destination, et le temps que doivent employer les Pères Camilliens pour s'apprêter à partir, et mon représentant pour descendre à Berber, les Pères Camilliens n'auraient pas pu partir du Vicariat avant le mois de mars.


[4484]
Tout étant organisé pour le retour du Père Carcereri avec tous ses confrères du Soudan en Europe, il restait à m'occuper de les remplacer dans la mission de Berber; pour cela j'ordonnais à mon représentant susnommé, qu'après avoir repris cette Mission, il y installe tout de suite quelques-uns de mes Missionnaires, en nommant l'Abbé Gennaro Martini comme Supérieur. - Ce dernier serait rentré, au début du mois de mars, d'une visite aux provinces de Cadaref, Galabat et Taca, dépendantes de la Mission de Berber.- Pendant ce temps, j'ai envoyé de Vérone un Missionnaire, l'Abbé Policarpo Genoud, avec trois artisans laïques, pour qu'avec les trois Sœurs et le Prêtre Domenico Noia qui sont prêts depuis longtemps au Caire, ils puissent partir ensemble pour Khartoum où ils arriveront au début du mois de juin.


[4485]
Avec l'adjonction de cette petite caravane, chaque Mission est suffisamment pourvue de personnel actif. Pour cela j'ai cru diminuer les dépenses que j'aurais dû faire en envoyant d'autres Prêtres et artisans qui sont actuellement dans les Instituts de Vérone; j'aurais pu pourtant en envoyer, mais ils partiront avec moi quand je retournerai dans ma Mission.


[4486]
Le retrait de tous les Camilliens ainsi organisé, ainsi que leur remplacement dans la Mission de Berber, le Vicariat n'endurera aucun déséquilibre, il ne reste aucun vide à combler; et ce qui n'est pas le moins important, c'est qu'une telle résolution a finalement ramené la tranquillité chez les Missionnaires et chez les Sœurs, tranquillité que tous désiraient, et qui avait été perturbée par le comportement peu religieux des deux Pères Carcereri et Franceschini.

Pour ne pas dire ce que mon Représentant général, le chanoine Fiore, l'Abbé Salvatore Mauro Curé de Khartoum, et d'autres m'ont écrit plusieurs fois que Carcereri inquiétait tout le Vicariat avec ses lettres de Berber, qu'il correspondait également avec le Vice-Consul de Prusse, et avec des personnes ennemies de la Religion, je citerai seulement un point que m'a écrit la Révérende Mère Provinciale des Sœurs résidant à Khartoum.


[4487]
" Nous attendons impatiemment le jour heureux qui nous apportera la nouvelle de votre triomphe complet; mais si le volcan de Berber vomit toujours ses flammes infernales, vous n'en finirez jamais " (31 décembre 1876).

Quand elle m'a écrit ainsi du Soudan, l'heureuse nouvelle de la résolution de ces tensions n'était pas encore arrivée; celles-ci maintenaient depuis longtemps l'esprit de tous dans l'incertitude et le découragement, et paralysaient les efforts qui se faisaient cependant pour le bien de la Nigrizia.

Mais dès que j'ai pu savoir quelque chose, je l'ai communiquée immédiatement; et le Supérieur de Khartoum m'a écrit le 8 janvier 1877: " le 27 novembre 1876 marque une page en lettres d'or dans les Annales de cette très difficile Mission d'Afrique Centrale".


[4488]
Ce n'est pas un, mais mille remerciements qui reviennent à la Congrégation de Propaganda Fide qui, assistée de Dieu, a su humilier la superbe, et défendre et soutenir l'innocence. C'est le Tribunal Suprême de Notre Sainte Mère l'Eglise qui, inexorablement et équitablement, administre la justice, et enlève avec une force égale à son autorité tous les obstacles que Satan le rebelle a mis pour entraver une Œuvre si sublime.


[4489]
Le Cardinal Franchi, vrai pilier de la Sainte Eglise, a été notre grand Protecteur, et le Bienfaiteur insigne de notre sainte Mission de la Nigrizia!

Par souci de brièveté, j'omets de reporter les lettres de tous les autres qui expriment toutes les mêmes sentiments d'allégresse et de reconnaissance envers la Sacrée Congrégation, et particulièrement envers Votre Eminence, qui déploie tant d'intérêt pour la plus malheureuse des nations infidèles; et toutes les lettres, comme celles déjà citées, prouvent qu'un seul acte était l'objet du désir de tous, c'est-à-dire l'éloignement des Camilliens, pour s'occuper, sereins et unis, de la vigne du Seigneur, ce qui m'apporte une grande consolation.


[4490]
Tels furent les sentiments de joie que tous mes Missionnaires éprouvèrent quant ils surent que les deux Pères Carcereri et Franceschini seraient éloignés de la Mission; et ils ne tardèrent pas à avoir la nouvelle définitive du rappel de tous.

A ce propos les ordres ici exposés ont été émis par le Père Guardi et par moi-même, mais malgré ces directives, les choses se passèrent différemment.


[4491]
Mon Représentant se trouvait dans la Mission du Cordofan, et c'est là que je lui ai envoyé ma lettre. Mais le Père Stanislao Carcereri qui avait été informé de son rappel et de celui de ses confrères de Berber, ville située entre Khartoum et l'Egypte, envoya tout de suite trois de ses Camilliens au Caire par la Mer Rouge, et il resta seul à Berber avec un laïque en attendant de remettre cette Mission au susnommé Abbé Pasquale Fiore, ou à un autre délégué.

Avant que ma lettre n'arrive chez lui, il envoya un télégramme à mon Représentant, en le pressant de descendre lui-même, ou d'envoyer un autre Missionnaire, à qui la Mission de Berber pourrait être remise, ou bien d'y envoyer le Supérieur de Khartoum, l'Abbé Salvatore Mauro.


[4492]
Le chanoine Fiore partit donc immédiatement et rapidement pour Khartoum, et de là, il envoya à Berber le susnommé Abbé Salvatore Mauro, qui y arriva alors que trois Religieux Camilliens étaient déjà partis. Après lui avoir remis la Mission, le Père Carcereri partit lui aussi à travers le désert de Corosco pour le Caire.


[4493]
C'est ainsi que ma lettre subit un grand retard avant d'être reçue par mon représentant. Puisque en passant par Khartoum, elle arriva à El-Obeïd et de là, mon Représentant étant déjà parti, elle fut renvoyée à Khartoum, où elle arriva quand les Révérends Pères Camilliens étaient eux aussi déjà partis. Ils ont utilisé l'argent qu'ils avaient déjà reçu, et qui avait été retiré de mon fond de caisse existant auprès de Madame Lafargue, bien qu'ils se fussent jusqu'alors continuellement plaints de ne pas avoir un centime pour survivre; ils avaient donc de l'argent, non seulement pour le voyage direct de Berber au Caire, mais aussi pour se rendre sur les Lieux Saints où ils se trouvent depuis la semaine de la Passion, bien qu'ils n'aient reçu de mon Procureur au Caire, l'Abbé Rolleri, que l'argent nécessaire pour leur voyage du Caire à Rome.


[4494]
Ils voulaient aussi recevoir de l'Abbé Rolleri l'indemnisation complète des dépenses qu'ils ont dû faire pour le voyage de Berber jusqu'au Caire; mais Rolleri n'étant chargé que de leur fournir le nécessaire pour le voyage du Caire à Rome ou Vérone, il se tint à cet ordre, et ne possédant pas de fonds disponibles, il refusa prudemment de débourser la somme dépensée pour leur voyage de Berber au Caire, ce dont il n'était pas chargé.

Il m'informa cependant de ce qui s'était passé, je répondis et je fis part au Père Guardi lui-même, qu'il recevrait l'indemnisation complète à Vérone, de mon administrateur général, l'Abbé Antonio Squaranti.


[4495]
Si les vénérables dispositions de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide ne furent pas exécutées dans le Vicariat de la façon convenue entre le Père Guardi et mon Secrétaire, j'en ai présenté ici les causes et la solution adoptée pour exécuter à la lettre les prescriptions de la Sacrée Congrégation. Elles le furent d'ailleurs dans une paix parfaite: il n'y eut aucun désaccord, ni à Berber, ni au Caire; tout se réalisa des deux côtés tranquillement.


[4496]
Mes Missionnaires joyeux et contents du départ des Pères Camilliens, les remplacèrent aussitôt; et depuis le 22 février dernier, deux de mes Prêtres, les Abbés Salvatore Mauro et Gennaro Martini, avec un laïque catéchiste et quelques jeunes Noirs gardent Maintenant la mission de Berber, où ils attendent l'arrivée de la caravane des nouveaux Missionnaires et des Sœurs, qui arrivera bientôt, peut-être même avant le mois de juin.


[4497]
Ceci dit, je dois enfin renseigner Votre Eminence sur la réalisation de ce que la Sacrée Congrégation me suggérait à propos de l'administration.

Déjà, depuis que Votre Eminence m'exhortait à choisir un administrateur idoine, qui m'aiderait, pour que je puisse me consacrer plus longuement et plus efficacement à la gestion des affaires spirituelles, j'avais choisi formellement parmi tous l'Abbé Antonio Squaranti, personne reconnue par tout le monde, même par l'Evêque de Vérone, comme la plus apte. Moi-même l'ai toujours considéré comme tel, et je l'ai même éprouvé ces derniers mois. Je l'ai déjà envoyé une fois en Egypte pour des affaires administratives, et une autre fois à Vienne; je lui ai confié la caisse depuis déjà cinq mois, et je le garderai près de moi en qualité d'administrateur général au Soudan, où je le conduirai à mon retour.


[4498]
A propos de la réalisation des vénérables dispositions savamment prescrites par la Sacrée Congrégation le 27 novembre 1876 dernier, il ne reste rien à ajouter, l'administrateur général étant élu et nommé formellement, tout étant organisé pour le retour de tous les Pères Camilliens de Berber en Europe, et pour leur remplacement.

Cependant pour que ce très bref Rapport soit complet, j'exposerai ici succinctement l'état général actuel du Vicariat.

Chaque Mission est composée d'un nombre suffisant de personnes actives. Mieux encore, d'autres Prêtres et d'autres Frères coadjuteurs, et au moins 12 Sœurs de l'Institut des Pieuses Mères de la Nigrizia, sont prêts à Vérone pour ouvrir de nouvelles Missions dans l'immense Vicariat.


[4499]
A Geref, à quelques heures de distance de Khartoum et à Malbes, à quelques heures de distance d'El-Obeïd, j'ai fait acquérir deux vastes domaines pour y installer les jeunes Noirs convertis, et pour former peu à peu deux villages catholiques, loin de la peste musulmane. Aux centaines de solides conversions d'infidèles noirs, s'ajoutèrent 14 autres adultes qui furent accueillis au sein de l'Eglise par mes Missionnaires l'été dernier, et d'autres se préparent à y entrer.

Pour cela, tout en ayant présentes à l'esprit les occupations nécessaires et urgentes pour créer de solides établissements, dans une région où il n'y a que du sable, quelques cabanes grossières et un ciel enflammé, nous avons pu procurer et plus encore à l'avenir, le salut à de nombreuses âmes.


[4500]
L'administration ne subit aucun déséquilibre malgré les nombreuses dépenses extraordinaires survenues l'an dernier, en 1876, pour les voyages, les constructions, les deux propriétés susdites qui sont fort utiles, etc.

Bref, bien que l'année dernière la somme de 92.000 francs ait été dépensée pour les constructions du Caire, la mission n'est grevée d'aucune dette.


[4501]
Il faut également ajouter que le colonel Gordon a été nommé Gouverneur Général du Soudan à la place du grand Pacha musulman, et grâce à cela, la position du Vicariat devrait s'améliorer. Puisque le Général est de nationalité anglaise et de religion protestante, n'importe qui peut comprendre que l'exercice de l'action apostolique sera à l'avenir plus libre, et donc plus efficace.


[4502]
Je l'espère bien car Gordon m'a toujours déclaré et me déclare encore une amitié intime et sincère, et ses rapports avec mes Missionnaires et la Supérieure Provinciale sont aussi des rapports de réelle estime et d'amitié, et en ce qui concerne l'esclavage, il partage entièrement les sentiments et l'opinion de notre Mission à laquelle il a même donné spontanément quelques aumônes, et il a partagé beaucoup de ses gains, en échange de l'assistance prêtée par la Mission à ses officiers malades.


[4503]
De tout ceci, il apparaît clairement que la condition du Vicariat Apostolique d'Afrique Centrale est sensiblement meilleure; ainsi, pour le bon déroulement de l'Œuvre, outre la grâce du Seigneur qui est plus que tout nécessaire, pour que perdure un bon esprit chez les ouvriers apostoliques, pour que les esprits des Noirs s'ouvrent à leur enseignement, et pour que ces cœurs ignorant la vertu se fortifient par les héroïques sacrifices qu'elle exige, il semble que pour le bon déroulement de l'Oeuvre rien d'autre ne soit nécessaire, sauf le renforcement et la croissance du prestige de l'Œuvre même, encore entravée par de nombreux et puissants ennemis non seulement invisibles, mais aussi visibles.


[4504]
Si sa renommée diminue en Europe, peu de vocations viendront à maturation pour ces Missions. Si avec la renommée, la confiance diminue aussi, les fonds de bienfaisance deviendront insuffisants. Si le prestige diminuait en Afrique, son influence morale perdrait de son importance, cette influence qui seule aide à ouvrir au Missionnaire la voie des cœurs des Noirs, mais aussi des cœurs fermés des Blancs, et qui estompe les torts et les offenses, auxquels les Missionnaires seraient exposés au milieu des gens, et des gouvernements très matérialistes et musulmans.


[4505]
Eh bien! Votre Eminence peut imaginer avec combien de ruses Satan agit, provoqué qu'il est sur son terrain, pour tirer parti des efforts des Missionnaires; et même si Votre Eminence ne connaît peut-être pas tous les nombreux adversaires visibles de la Sainte Œuvre de la Régénération de la Nigrizia, vous savez cependant comment cette dernière a été dénigrée en Europe par les Camilliens auprès non seulement de personnes privées, mais aussi auprès des Sociétés bienfaitrices de Cologne et de Vienne; ainsi qu'en Afrique auprès de la population et des autorités.

Ces derniers jours par exemple, le Père Carcereri a fait mettre en colère contre les chrétiens, le Mudir de Berber, le Gouverneur Général du Soudan, et le Vice-Consul de Prusse à Khartoum.


[4506]
Le Père Carcereri a écrit contre le Mudir de Berber au Vice-Consul susnommé, en lui annonçant que le Mudir de Berber avait déclaré aux musulmans que pour les fêtes de Bairam (24 décembre), les chrétiens de Berber et de Khartoum seraient tous tués. Le Consul a présenté des doléances auprès du Gouverneur Général à propos de la conduite du Mudir de Berber, et le Gouverneur Général a exigé des justifications du Mudir.


[4507]
Le Mudir a appelé le Père Carcereri, et lui demanda s'il était vrai qu'il avait écrit contre lui au Vice-Consul de Prusse. Le Père Carcereri le nia, et il lui en fit une déclaration par écrit, qui fut envoyée par le Mudir au Gouverneur Général; cela agaça le Vice-Consul de Prusse et le Gouverneur Général lui-même, sans avoir calmé pour autant le Mudir. De fait, deux Pères Camilliens qui étaient allés à Souakin, où j'avais été accueilli l'an dernier très courtoisement par les mêmes autorités, et où je pus y résoudre quelques problèmes entre chrétiens, reçurent l'ordre du Mudir susnommé de quitter immédiatement la ville.


[4508]
Ceci dit, Votre Eminence peut comprendre combien de dommages tomberaient sur la Mission si les conséquences du discrédit se vérifiaient.

Ce discrédit suffirait pour rendre vains les grands efforts que je ne cesse de déployer pour conserver et accroître le prestige que cette Œuvre avait il y a deux ans, Œuvre qui présentait cependant une marque de stabilité et de perpétuité, que la Mission d'Afrique Centrale, par une grâce spéciale de Dieu, garde encore aujourd'hui.


[4509]
La profonde conviction que Dieu veut le salut de la Nigrizia, m'encourage à espérer que sous la très sage direction de Votre Eminence et de la Sacrée Congrégation, un pareil obstacle sera levé.

Les vocations étant ainsi facilitées en Europe, les subsides augmentés, surtout ceux des célèbres Sociétés de Cologne, de Vienne, de Lyon et de Paris, le Ministère Apostolique sera plus efficace et plus fructueux dans une bonne entente et dans l'estime.

Pour un tel succès, encore maintenant, comme toujours, les grandes croix et les tribulations auront contribué à confirmer plus solidement l'Œuvre de la Rédemption de la Nigrizia.

Incliné pour baiser la sainte Pourpre, je me déclare avec la déférence la plus profonde



votre humble, dévoué et obligé fils

Daniel Comboni

Pro-Vicaire Apostolique de l'Afrique Centrale






690
Chanoine Giovanni C. Mitterrutzner
0
Rome
11. 4.1877
N° 690 (656) - AU CHANOINE GIOVANNI C. MITTERRUTZNER

ACR, A, c. 15/70



Vive Jésus, Marie et Joseph!

Rome, le 11 avril 1877



Très cher ami,



[4510]
Merci pour tout. J'ai reçu 3.000 francs de Vienne. Depuis le mois de septembre je n'ai reçu aucune lettre de Steiner, sauf la dernière. Je ferai le rapport et je vous l'enverrai.


[4511]
Monsieur A. Glis Passari vous salue. Le révérend Barduagni a tout reçu régulièrement et au courant de la semaine La Voce della Vérità ou l'Osservatore Romano publiera etc.

Merci. Je suis submergé par les occupations. J'ai déjà envoyé 20 feuillets à Cologne. Le thème de Episcopatu et Ecclesia sera présenté à la Congrégation Générale le 23 ou le 30 de ce mois.



Bien à vous dans le Christ

Daniel Comboni

Texte original en latin.