Lundi 28 mars 2022
La synodalité ne désigne pas un simple processus de fonctionnement, mais la forme particulière sous laquelle vit et opère l’Église. En grec ecclésiastique, la parole « synode » s’applique aux disciples de Jésus convoqués en assemblée, et dans certains cas, il est synonyme de la communauté ecclésiale. [AEFJN]
Saint Jean Chrysostome, par exemple, écrit que « l’Église est synonyme de ‘faire chemin ensemble’ » (σύνοδος). Il explique en effet que l’Église est l’assemblée convoquée pour rendre grâce à Dieu et chanter ses louanges à la manière d’un chœur, une réalité harmonieuse où tout se tient (σύστημα), puisque ceux qui la composent convergent, par leurs relations réciproques et ordonnées, dans l’ἀγάπη et l’ὁμόνοια (le même esprit).
La synodalité est une dimension constitutive de l’Église, qui, à travers elle, se manifeste et se configure comme le Peuple de Dieu en chemin et comme assemblée convoquée par le Seigneur ressuscité. Celui-ci, en face d’un défi décisif pour l’Église des origines, donne à voir en acte la méthode de discernement communautaire et apostolique qui est l’expression de la nature même de l’Église, mystère de communion avec le Christ dans le Saint-Esprit.
Textes Bibliques: « Là où deux ou trois s’assemblent en mon nom, je suis au milieu d’eux. » (Mt 18:20) « L’Esprit Saint et nous-mêmes, nous avons en effet décidé… (Ac. 15:28).
Développements historiques
Avec le début du deuxième millénaire, la pratique synodale a pris peu à peu des formes procédurales différentes en Occident et en Orient, en particulier après la rupture de la communion entre l’Église de Constantinople et l’Église de Rome au onzième siècle et la chute sous le contrôle politique de l’islam des territoires ecclésiastiques appartenant aux patriarcats d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem.
Les communautés ecclésiales nées de la réforme protestante promeuvent une forme spécifique de pratique synodale, dans le contexte d’une ecclésiologie, d’une doctrine, et d’une pratique sacramentelle et ministérielle qui s’écartent de la Tradition catholique.
Saint Jean-Paul II, à l’occasion du Jubilé de l’an 2000, dresse un bilan du chemin parcouru pour incarner, en conformité avec l’enseignement de Vatican II, l’essence même du mystère de l’Église au moyen des diverses structures de communion. On a fait beaucoup, souligne-t-il, mais « il reste certainement beaucoup à faire pour exprimer au mieux les potentialités de ces instruments de la communion, […] (et) répondre avec rapidité et efficacité aux problèmes que l’Église doit affronter dans les changements si rapides de notre temps . »
L’enseignement du Pape François. Le pape François enseigne que « marcher ensemble est le chemin constitutif de l’Église ; le code qui nous permet d’interpréter la réalité avec les yeux et le cœur de Dieu ; la condition pour suivre le Seigneur Jésus et pour être des serviteurs de la vie à notre époque blessée. Le souffle et le rythme du synode révèlent ce que nous sommes et le dynamisme de communion qui inspire nos décisions. Ce n’est qu’ainsi que nous pouvons réellement renouveler notre pastorale et l’adapter à la mission de l’Église dans le monde d’aujourd’hui ; ce n’est qu’ainsi que nous pouvons faire face à la complexité de notre temps, pleins de gratitude pour le chemin parcouru et déterminés à le poursuivre avec parrhesía … la confiance, la franchise et le courage pour entrer dans l’ampleur de l’horizon de Dieu.
Que Marie, Mère de Dieu et de l’Église, qui « était avec les disciples pour invoquer l’Esprit Saint (cf. Actes 1,14) qui a ainsi rendu possible l’explosion missionnaire advenue à la Pentecôte, accompagne le pèlerinage synodal du Peuple de Dieu. »
Textes bibliques
Réflexions
Jésus a commencé sa mission dans la ville de Capharnaüm. Sa prédication et ses guérisons de malades il était connu partout du jour au lendemain. Les gens venaient en masse le voir. Jésus avait suffisamment de travail à Capharnaüm pour le reste de sa vie. Mais était-ce ce que le Père voulait ? Jésus passait une nuit entière en prière dans une grotte et il était certain que sa mission était d’aller lui-même pour porter son message partout. Il choisit la vie d’un prédicateur itinérant, allant de village en village.
Jésus était toujours en route, mais jamais seul. Il se déplaçait avec un groupe de disciples. Il n’y avait pas de plan fixe. Jésus se laissait guider par l’Esprit et sa petite communauté le suivait en toute confiance.
Au fil des siècles, l’Église est devenue sédentarisée. Elle s’organisait localement en paroisses, fondait des monastères, construisait des écoles et des hôpitaux, encourageait les arts et créait un système juridique. Ces institutions ont fait un bien incroyable et ont changé la société pour le mieux. Mais l’Église est devenue puissante, trop puissante, et le pouvoir a corrompu. Elle pensait être « la société parfaite » et ne pas avoir besoin de changement, alors que le monde changeait de manière dramatique autour d’elle. L’Église semblait de plus en plus un fossile des temps passés. Dieu merci, le Concile nous a donné une autre image de l’Église comme « le peuple de Dieu en pèlerinage », une communauté qui est partie, le regard tourné vers l’avenir, et qui est maintenant en route comme Jésus avec ses disciples.
Dans le chemin synodal tel que toute l’Eglise l’a maintenant entamé, l’Eglise veut se mettre en route. L’objectif n’est ni d’établir un programme pastoral immédiat ni de réinventer l’Eglise. C’est un chemin long et difficile, dont nous ne savons pas où l’Esprit nous conduira. Comme tout voyage, il commence par un premier pas, par la question de savoir quel est l’appel que l’Esprit et notre monde nous adressent maintenant. Toutes les propositions des Eglises seront intégrées dans un synode mondial en 2023.
Prière
Conduis-moi, douce Lumière,
au milieu des ténèbres :
je t’en prie, conduis-moi.
La nuit est sombre, et je suis
loin de la maison :
je t’en prie, conduis-moi.
Veille sur mon chemin.
Je ne demande pas
à voir le but lointain :
un seul pas me suffit.
Cardinal John Henry Newman
Proverbe Africain
Nunya, adidoe, asi metunee O. (Akan: Ghana)
« La sagesse est comme un Baobab,
un homme tout seul ne peut pas l’embrasser. »
Dialogue : Ecouter – Parler – Célébrer
Textes bibliques
Réflexions
Comment les gens font-ils l’expérience de l’Église en tant que communauté aujourd’hui ? Pour les chrétiens convaincus, il peut s’agir d’une messe dominicale animé suivi d’un café communautaire. Autrefois, c’était surtout les associations et organisations catholiques qui donnaient une expérience de la communauté. Les institutions ecclésiales telles que les jardins d’enfants, les hôpitaux et les services caritatifs ont souvent perdu leur identité chrétienne et sont soumises aux mêmes contraintes bureaucratiques que les institutions laïques. Ils ne témoignent plus de la joie de l’Évangile. L’image de l’Eglise est perçue négativement par nos concitoyens sécularisés à travers les reportages sur les scandales impliquant des prêtres. La vie dans l’Église est très éloignée de sa forme originelle de communauté de foi et de vie. Le chemin vers l’avant devrait peut-être consister à revenir aux origines.
Dans les Actes des Apôtres, le message chrétien est souvent appelé « le chemin »… « le chemin du Seigneur… le chemin du salut ». Devenir chrétien, c’est se mettre en route avec Jésus, le suivre. L’Église, la communauté de ceux qui sont en chemin avec Jésus, sont ses compagnons de route.
La voie synodale veut nous aider à redécouvrir l’Eglise comme une communauté où les gens se connaissent, dialoguent entre eux, se soutiennent mutuellement et cherchent à changer leur vie et leur environnement dans l’esprit de Jésus. Le mot synode signifie en effet : « chemin commun » et « dialogue » signifie « conversation commune ». C’est en parlant ensemble et en priant que nous découvrons le chemin que Dieu veut nous montrer.
Nous n’en avons plus l’habitude nous sentir comme une communauté de vie.. Au fil des siècles, une dichotomie s’était formée dans l’Église. Il y avait ceux qui avaient le droit et le mandat de parler, la « hiérarchie », et ceux qui devaient écouter, les « laïcs ». Dans le processus synodal, tout le monde a quelque chose à apporter : les évêques, les prêtres, les religieux et toutes les personnes laïques, les femmes et les hommes, les universitaires et les ouvriers, les jeunes et les vieux. Nous devons tous réapprendre à nous écouter mutuellement et à exprimer ce que nous pensons, ressentons et vivons. C’est un processus d’apprentissage difficile.
Dans nos assemblées, ce sont souvent quelques-uns qui « mènent la danse » parce qu’ils savent bien parler. Le processus synodal veut encourager tout le monde à dire ce qu’il a sur le cœur. Tous doivent être suffisamment humbles pour savoir que chacun ne peut voir qu’un aspect de la vérité et a besoin de l’avis des autres pour connaître les voies de Dieu.
Le plus difficile est d’écouter sans préjugés et avec respect, sans répondre immédiatement, sans critiquer ou donner de bons conseils. Mais c’est la seule façon de créer une atmosphère de confiance qui permette de prendre de bonnes décisions.
Prière
Dieu, tu n’abandonnes pas ton Église et l’humanité que tu as créées,
mais tu t’occupes de nous. Nous t’en remercions.
Et nous te prions : laisse ta force créatrice agir en nous et à travers nous. Ouvre notre oreille à ta parole et fais-nous sentir que tu es avec nous.
Proverbe Africain
« Celui qui ne cherche pas l’opportunité aura du mal à la trouver » Fulbe (fulfulde)
Textes bibliques
Réflexions
Il y a quelques années, le diocèse de Limbourg a entrepris une expérience intéressante. Les représentants des Eglises du Sud qui étaient venus chez eux pour le mois missionnaire ne devaient pas, comme d’habitude, donner des conférences dans les paroisses, mais simplement vivre avec les paroisses pendant quatre semaines et raconter ensuite leurs observations. Qu’est-ce qui les avait le plus frappés ? Qu’ici, lorsque les chrétiens se réunissent dans les différents comités, ils discutent beaucoup, mais prient rarement. Pour eux, il était évident qu’en tant que croyants, on demande l’aide de Dieu pour tout ce que l’on planifie et décide.
C’est aussi le plus grand défi du processus synodal, que le pape François considère comme un processus de « discernement (des esprits) ». Nous sommes forts pour analyser les problèmes, en discuter et ensuite prendre des décisions à la majorité. Mais ces décisions sont-elles vraiment ce que Dieu veut pour nous, ou ne sont-elles pas plutôt ce que nous voulons ? Comment pouvons-nous sentir ce que Dieu veut maintenant pour son Église ?
Une condition préalable est que nous entrions dans le processus avec une ouverture totale et sans idée préconçue de ce qui doit en résulter à la fin. C’est un grand défi spirituel. Bien sûr, chacun et chacune arrive avec ses propres opinions, idées et expériences, qui doivent être exprimées. Mais alors, je ne dois pas m’y accrocher ; je dois les remettre à la communauté simplement comme ma modeste contribution, et puis accueillir en moi, avec une grande ouverture et une grande liberté intérieure, les contributions des autres. Cette liberté de ne pas vouloir m’imposer, mais d’attendre que quelque chose de nouveau naisse des différentes opinions, souvent contradictoires, ne vient pas d’elle-même. C’est un cadeau que nous devons demander au début de chaque échange.
Si nous écoutons sans préjugés et donnons la place à d’autres points de vue, différentes possibilités émergent. Alors il faut les confronter avec la lumière de l’Évangile. Quand nous avons écouté les uns les autres, il nous faut écouter Dieu. Que nous dit Dieu à travers la parole de l’Évangile ? Que dirait Jésus ? « Que dit l’Esprit aux Églises ? » Et à notre église d’aujourd’hui ? Cf. Apoc. 2
Donnons à l’Esprit de Dieu une chance de nous faire ressentir, dans un temps prolongé de silence, ce qui est bon pour construire le corps de l’Église ! Un tel processus de décision nécessite beaucoup de temps, de patience et la confiance que Jésus est avec nous lorsque deux ou trois sont ensemble en son nom, dans son esprit. Puis mettons en œuvre avec courage et confiance ce que nous avons reconnu comme volonté de Dieu.
Le processus synodal est comme la pâtisserie. De nombreux ingrédients entrent dans la pâte. En les pétrissant, ils interagissent les uns avec les autres. Il en résulte quelque chose de nouveau : un pain odorant et délicieux.
Prière
Que Dieu me donne la force de changer les choses que je peux changer ;
la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, et la sagesse de distinguer l’un de l’autre.
Friedrich Christoph Oetinger
Proverbe Africain
« Notre foi, notre représentation des choses a toujours besoin d’être incarnée ».
Textes Bibliques
Il y a diverses sortes de dons spirituels, mais c’est le même Esprit qui les accorde. Il y a diverses façons de servir, mais c’est le même Seigneur que l’on sert. Il y a diverses façons d’agir, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous. En chacun l’Esprit saint se manifeste par un don pour le bien de tous. 1 Cor 12:4-7
Réflexion
Le pape François a demandé aux Eglises locales d’inclure les autres Eglises dans leur préparation au Synode mondial à tous les niveaux. Dans leur histoire, elles ont souvent mieux préservé le caractère synodal de l’Eglise que l’Eglise catholique, qui a surtout insisté sur les structures hiérarchiques. Nous pouvons beaucoup apprendre de leurs forces et de leurs faiblesses.
La Synodalité de l’Église et « le principe de l’égalité d’importance entre les dons hiérarchiques et les dons charismatiques dans l’Église » ont été redécouverts lors du Concile Vatican II et ancrés dans de nouvelles structures pastorales à tous les niveaux : synodes épiscopaux réguliers, conférences épiscopales nationales et régionales, conseils pastoraux diocésains et paroissiales Le processus synodal a plusieurs objectifs :
– insuffler un esprit missionnaire à ces processus existants, afin qu’ils ne s’occupent pas uniquement de questions internes à l’Eglise, mais qu’ils se sachent d’abord responsables de la mission de l’Eglise dans le monde.
– Impliquer les laïcs dans la prise de décision non seulement en tant que conseillers, mais aussi en tant que coresponsables.
– ne pas considérer la prise de décision comme une dispute entre différentes opinions, mais comme la recherche commune de la volonté de Dieu pour nous aujourd’hui.
Prière
Nous nous tenons devant toi, Esprit Saint, alors que nous nous rassemblons en ton nom.
Nous sommes faibles et pécheurs ; ne nous laisse pas répandre le désordre,
ne laisse pas l’ignorance nous conduire sur un mauvais chemin ni la partialité influencer nos actions.
Fais que nous trouvions en toi notre unité,
afin que nous marchions ensemble vers la vie éternelle
et ne nous écartons pas du chemin de la vérité et de ce qui est juste.
Proverbe Africain
„Ba alu pamvu siri ru“ (Lugbara: Uganda) L’empreinte d’une seule personne est très faible.